Présenté comme étant membre du «Commando de Pastef», Mamadou Diémé, arrêté par les éléments du commissariat, suite à une géolocalisation, a été lavé à grande eau par ses proches. Des membres de sa famille le décrivent comme un homme timide et peureux, «incapable de faire mal à une mouche».
Son nom a été prononcé en boucle lors de la conférence de presse organisée par le Procureur général près la Cour d’appel, Ibrahima Bakhoum.«Mamadou Diémé qui se réclame, d’après ses propres déclarations, membre du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc), serait l’organisateur de toutes les manifestations violentes du parti Pastef à Bignona. Dans cette entreprise, il serait en lien avec d’autres individus qui sont recherchés dans le cadre d’un groupe du commando Pastef, notamment des anciens militaires présumés.»
Ce sont en substance les lourdes accusations portées à son encontre par le Procureur Ibrahima Bakhoum qui ajoute : «Mamadou Diémé est chargé de recruter d’anciens militaires pour mener ses opérations insurrectionnelles. Il habite dans le village de Sindian, département de Bignona. Il a eu à organiser les manifestations du 14 et 16 mars à Bignona. Mais il se fond dans la masse. Mamadou Diémé se présente comme le responsable des affaires mystiques de Ousmane Sonko.Il avait prévu de se rendre à Dakar dans le but de planifier, avec son groupe, des manifestations dans le cadre du procès du 30 mars où il compte impliquer des combattants du Mfdc.»
Des accusations qui ont fait froid dans le dos des proches de Mamadou Diémé. Elles ont été tout bonnement balayées d’un revers de la main par ces derniers. Aïssatou Diémé, petite sœur de Mamadou, cache mal son amertume.
Elle hurle de rage :«Je suis une Musulmane et j’observé le jeûne, donc je suis tenue de dire la vérité. Je suis persuadée que mon frère est accusé à tort. Mamadou Diémé ne peut pas faire du mal à une mouche. A la limite, c’est un peureux. D’ailleurs, les membres de notre famille sont restés unanimes, il n’est jamais mêlé dans des histoires. Lorsqu’il a été arrêté, nous pensions qu’il a été raflé. Mais, quand les policiers en civil sont venus avec lui à la maison, sise à Dalifort, nous avons commencé à prendre au sérieux cette affaire-là. Ils m’avaient trouvée dans la véranda et ils voulaient faire une perquisition de la chambre de mon grand-père. A cause de sa petite taille, je peinais à le voir parce qu’il a été entouré par des hommes de forte corpulence.
Ces derniers, informés que Mamadou Diémé passe la nuit au quartier Darou Salam, dans une chambre prise en location par son jeune frère étudiant, se sont rendus sur les lieux, mais ils n’y ont rien trouvé de compromettant. J’ai tout fait pour le voir, mais les éléments du commissariat central nous ont demandé d’attendre lundi. Nous sommes aujourd’hui déboussolés. Je jure que mon grand frère n’a jamais rencontré OusmaneSonko. Il militait au Pastef, mais il n’était même pas très engagé. Il travaillait comme technicien de surface à la mairie de Tenghory, dans le département de Bignoma. D’ailleurs, le jour de l’attaque sanglante de cette ville, il était en voyage à Ziguinchor. Il est innocent et il n’est pas assez intelligent pour se défendre. J’ai peur pour lui…»,tonne-t-elle.
Selon un autre membre de la famille Diémé qui a préféré garder l’anonymat, Mamadou Diémé, quinquagénaire et père de trois enfants, est d’une timidité maladive. Même s’il prenait parfois part aux réunions organisées par la section Pastef de sa localité, il ne prenait jamais la parole. C’était un militant à part.
«Il ne prend rien au sérieux dans la vie. Seul son troupeau qu’il conduisait dans la brousse l’intéressait. A cause de sa timidité, on l’appelait Bocandé pour ironiser, car il ne savait même pas jouer au football. Donc, comment peut-il manier une arme ? Mamadou Diémé n’ose même pas sortir la nuit. Il est tout sauf courageux. C’est un homme de paix.(…) C’est pourquoi, lorsqu’il était en âge de se marier, deux femmes ont refusé sa proposition de les marier, parce qu’elles ne le considéraient pas comme un homme normal.
Certains le prenaient pour un attardé mental à cause de son port vestimentaire. Il s’habillait toujours en costume, même sous le chaud soleil (…). Finalement, il a épousé une Gambienne. Son fils aîné porte le nom du Général Babacar Gaye. Il travaillait comme «Boy» chez lui. Après le décès de son grand frère, il est rentré au village. Cependant, durant le mois de Ramadan, il vient à Dakar pour continuer son travail de «Boy». Après avoir gagné un peu d’argent, il rentre au bercail quelques jours après la Korité. Quand j’ai entendu le Procureur citer son nom, je ne pouvais pas m’empêcher de pleurer, parce que j’ai compris que Mamadou Diémé est incapable d’attaquer une autre personne.
Et puis, il n’a jamais été un membre du Mdfc. Il passait une bonne partie de sa vie à Dakar. Il est rentré au village vers les années 2000. Également, Ousmane Sonko est assez responsable pour confier ses affaires mystiques à Mamadou Diémé qui ne sait rien dans la vie, à part nettoyer les carreaux ou conduire les troupeaux dans la brousse…»
Pour l’heure, de lourdes charges pèsent sur lui. Ainsi, il a été inculpé des infractions d’association de malfaiteurs, tentative d’assassinat, acte de violence, acte à compromettre la sécurité publique et autres chefs
L’Obs