Prise en charge des urgences dans nos hôpitaux : Quand l’accueil rime avec écueil

Le décès d’Astou Sokhna à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye de Louga remet sur la table la sempiternelle équation de la prise en charge des urgences dans nos hôpitaux. Et pourtant, la question avait tellement agité le secteur de la santé, il y a quelques années, que la tutelle avait décidé de la mise en place de services d’accueil des urgences (Sau) dans toutes les structures de santé. Mais rien n’y fait. L’accueil rime toujours avec écueil dans nos structures de santé comme en témoigne la fin tragique de cette femme enceinte pour « négligence ». Le Vrai Journal

Autant la raison de son décès que les circonstances n’en finissent pas de susciter émoi et consternation. Entrée dans l’hôpital Amadou Sahir Mbaye de Louga à 9h 30 pour accoucher, la pauvre Astou Sokhna « décédera à 5 heures du matin après d’atroces douleurs, sans jamais réussir à donner vie », d’après le journal « Libération » qui a rendu compte de sa fin tragique.

Enceinte de 9 mois, raconte le journal, « elle s’est présentée avec son époux à la maternité pour subir en urgence une césarienne, comme mentionnée dans son dossier médical. Mais, elle n’était pas « programmée ». Malheureusement, l’histoire vire au drame après une attente de 9 heures à 5 heures 30 du matin ». Autant dire une énième victime pour défaut de prise en charge.

Pourtant, il y a de cela trois ans, l’évacuation laborieuse des victimes de l’accident de bus survenu dans la zone de Bignona, en août 2019, était symptomatique de ce mal profond qui gangrène le secteur de la santé au Sénégal.

A l’époque, ce terrible accident de bus survenu sur l’axe Bignona-Badiouré avait occasionné 5 morts et plus de 60 blessés du fait surtout des problèmes d’évacuation des blessés pour défaut d’ambulance. Mais aussi à cause aussi d’un manque d’oxygène. Une négligence qui, en son temps, n’avait laissé personne indifférent. Y compris, le président de la République qui avait particulièrement insisté sur la nécessité de renforcer, « dans les plus brefs délais », le dispositif de prise en charge des urgences dans nos hôpitaux.

Et pour cause, il s’est toujours posé un réel problème de prise en charge des urgences surtout au niveau des régions et des départements de l’intérieur. Interpellé à l’époque sur la question, le président de l’Alliance And Gueusseum, Docteur Mballo Dia Thiam, avait laissé entendre que des hôpitaux de deuxième génération de niveau I étaient d’une urgence absolue. Au-delà des problèmes de logistique, le syndicaliste avait aussi dénoncé « un problème de capacité d’accueil au niveau de nos hôpitaux ».

Les SAU plombés par les dysfonctionnements

Pour rappel, la question était devenue tellement préoccupante qu’au niveau de tous les hôpitaux de Dakar, il a été décidé du renforcement du service d’accueil

Hélas, pas grand-chose n’a évolué en la matière, au point que les patients et leurs accompagnants n’ont jamais cessé de décrier la qualité des services offerts dans les urgences.

Pis, les autorités, malgré les déclarations et autres effets d’annonce, n’ont jamais semblé prendre la pleine mesure de cette équation de la prise en charge des urgences. On se souvient de ces propos de l’ancienne ministre de la Santé et de l’Action sociale, Eva Marie Coll Seck lors d’un conseil régional sur les urgences à Dakar.

«Les soins sont de qualité au Sénégal et les meilleurs médecins officient dans les hôpitaux», s’était-elle défendue. Et de relativiser les insuffisances en la matière en indiquant «que dans tous les pays au monde, les urgences ont toujours été le noeud du problème dans les structures de santé et certains malades comme des accompagnants, malgré les services donnés, ne sont jamais satisfaits».

Il n’empêche qu’à la suite de cette remarque destinée visiblement à dédouaner l’action des pouvoirs publics, le ministère de la Santé et de l’Action sociale décidera, par la suite, de la mise en place du service d’accueil des urgences (Sau) dans toutes les structures de santé, en commençant par Dakar, afin de réduire certains problèmes liés à la prise en charge des malades accueillis en urgence.

Destinés à améliorer la qualité de l’accueil, les services d’accueil et des urgences appelé (Sau) devraient permettre la prise en charge des malades dans les urgences et en un temps record. Censés s’occuper du tri des malades et de leur orientation dans les différents services, ces Sau se situent à la porte d’entrée de chaque hôpital et sont ouverts 24h /24h. Ainsi, toute personne se présentant en situation d’urgence médicale ou chirurgicale y est reçue. Hélas, ce service peine encore à jouer pleinement son rôle, surtout quand il s’agit de la prise en charge des cas d’accidents. Pourvu que la mort tragique d’Astou Sokhna soit enfin un signal pour lever tous les dysfonctionnements qui plombent l’efficacité de ces fameux Sau.

Le Vrai Journal

Oumou Khaïry NDIAYE
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