Hantise d’une défaite aux prochaines élections législatives La machine de la transhumance en branle

A trois mois des élections législatives, le chef de l’Etat qui semble être hanté par la défaite symbolique des dernières élections locales veut à tout prix renverser la tendance. Au vu des actes qu’il pose, le coordonnateur national de la coalition Benno Bokk Yakar a entamé un véritable débauchage des responsables de la société civile et de l’opposition. C’est la transhumance tout azimut ces derniers temps et des audiences à tout bout champ. Le Mandat

Macky semble avoir tourné la page de l’État de grâce durant laquelle il disait « je vais réduire l’opposition à sa plus simple expression». Après les résultats des urnes lors des dernières élections locales, le patron du palais est depuis lors hanté par l’idée de perdre les élections législatives.

En effet ayant conscience qu’il est difficile de renverser la tendance pour un pouvoir en décadence, Macky est en train de tout faire pour sauver les meubles car la perte de la majorité à l’assemblée nationale pourrait précipiter sa chute avant 2024 et conduire forcément à la dislocation de la coalition benno bokk yakar qui compte de nombreux frustrés.

Sachant qu’il ne peut pas trop compter sur la jeunesse malgré son «jokko ak Ndaw yi» (être en contact avec les jeunes), le premier signal a été lancé par les jeunes de Pikine qui malgré la rencontre virtuelle n’avaient pas respecté leurs enga-gements pour se mobiliser en faveur du chef de l’Etat.

N’ayant pas confiance totale sur la jeunesse qui lui a causé du fil à retordre depuis mars 2021, Macky est donc en mode fast tract pour faire la promo-tion de la transhumance. Pour éviter le premier sort d’une cohabitation, le chef de l’Etat retourne sa veste et favorise cette pratique qu’il avait condamnée dans le passé afin de renforcer son camp. Depuis les élections locales, le chef du palais a lancé le mercato politique.

Bamba Fall, maire de la médina et candidat de la coalition Geum Sa bop a été la première per-sonne à mordre l’hameçon. Après avoir été reçu par le président de la république, il fut nommé ministre conseiller. Malgré le tollé médiatique entraînant une vague d’indignation de l’opinion, le chef de l’Etat conti-nue d’encourager la transhumance. Avant-hier, huit nouveaux élus de la coalition Wallu Sénégal dirigé par le parti démocratique Sénégal (PDS) et la coalition Yéwi Askan wi (YAW) ont déposé leurs baluchons dans la case des marrons et beiges pour soutenir le président Macky Sall aux prochaines élections législatives. Vue la réalité politique, le chef de l’Etat semble être obnubilé par la transhumance des opposants pour garnir son étoffe afin de faire face à la coalition Yéwi Askanwi (YAW) qu’il redoute le plus.

Depuis son arrivée au pouvoir, le président Macky Sall a retourné sa veste. Jadis, foncièrement contre la transhumance, ce qui était d’ailleurs à l’origine d’un organigramme très particulier de son parti Alliance pour république pour éviter que des leaders qui ont bénéficié d’une aura le trahissent et regagnent le camp présidentiel durant le règne de Wade, Macky n’avait quasiment pas de numéro deux. L’opposant d’alors était la seule constante autour de laquelle il y avait un cercle bien garni composé de Seydou Guèye, de feu Aliou Badara Cissé, Mbaye Ndiaye, Moustapha Cissé Lô et Mahmout Saleh.

Cet organigramme était conçu pour échapper au mercato de Abdoulaye Wade qui à l’image de Abdou Diouf avait aussi cassé le parti socialiste en recyclant ses anciens dignitaires. D’ailleurs avant l‘élection présidentielle de 2012 lors d’une émission à Walf tv dénommée « perspectives de 2012», l’opposant traité des transhumants de rats qui quittent le navire avant qu’il ne chavire.

«Lorsque les gens viennent avant la victoire, ce n’est pas la transhumance. C’est vrai que lorsque les rats quittent le navire le naufrage est imminent. Ce qui est déplorable, c’est d’attendre que des gens se battent et gagnent pour venir les bousculer. Cela n’est pas acceptable et nous ne l’accepterons pas. La porte ne leur sera pas fermée mais ils feront la queue et attendront le temps que cela nécessitera. On ne peut pas continuer à faire la transhumance telle qu’elle se fait aujourd’hui parce qu’il faut mettre de l’éthique dans tout ça. Il faut que les gens restent dans leurs valeurs parce qu’on ne peut pas changer le pays si les gens restent dans le boul falé (je m’en foutisme)» avait-il dénoncé face à Pierre Edouard Faye et Georges Nesta Diop.

Après son élection, le président s’est donc métamorphosé. Il décima le parti démocratique sénégalais et obligea tous les cadors à le rejoindre. Ainsi sur le dernier gouvernement de Wade sur 35 ministre, il ne reste plus qu’un seul sans tenir compte de la quasi-totalité des directeurs généraux et autres responsables qui, s’ils n’ont pas rejoint le camp présidentiel, ont gelé leurs activités

Transhumance, la solution des pouvoir en décadence

Depuis les indépendances, la transhumance a été encouragée par les tenants du pouvoir et entretenue par des opposants. Donc ce n’est pas un fait nouveau sous le régime de Macky Sall.

Après l’indépendance, Lamine Guèye et Léopold Sedar Senghor qui avaient entretenu des relations conflictuelles dont les affrontements de leurs militants avaient causé des dizaines de morts, ont fini de se retrouver. Après la crise de bicéphalisme opposant Mamadou Dia, Président du conseil au Président Senghor ; Lamine Guèye qui était l’ennemi du BDS (Bloc des socialiste) a rejoint Senghor et les deux ont fusionné avec SFIO (Section française de l’internationale ouvrière) et le parti de Senghor. Sous Abdou Diouf, le PDS a eu a subir à chaque élection une saignée.

Ainsi Wade aura perdu des dizaines de cadres de sorte que durant son accession au pouvoir en 2000, il ne restait que quelques-uns ; ce qui lui avait valu de faire la promotion des jeunes qui étaient dans les rangs de l’UJTL.

Rendant la pièce de la monnaie, Wade à son tour avait fagocité le PS qui était désormais dans l’opposition. En plus des anciens cadres qui l’ont rejoint, les responsables socialistes vont déposer leurs baluchons dans le PDS soit pour échapper à la prison soit grâce à des pressions venant des politiques, religieux et/ou coutumiers.

Le constat est qu’à chaque fois, un régime du moins celui de Abdou Diouf et de Abdoulaye Wade a été en décadence, le chef de l’Etat a usé de toutes sa puissance avec mallettes d’argents et postes pour favoriser un recrutement massif d’opposants afin de conserver son pouvoir. Pour l’opposition, wallu Sénégal et la coalition YAW sont entrain de ratisser large pour composer de listes attrayant et attirant les électeurs surtout qu’ils sont convaincus qu’une cohabitation n’a jamais été aussi opportune

Le Mandat

Momar Diack SECK
Up Next

Related Posts