Parc zoologique de Hann : Entre dénégation ministérielle et réalité alarmante (Les Chroniques citoyennes d’Adama Diop)

Le ministère de l’Environnement et de la Transition écologique (METE) a récemment publié un communiqué en réponse à la diffusion sur les réseaux sociaux d’images montrant un lion en mauvais état. Selon le ministère, ces images, bien que choquantes, datent de 2017 et l’état de l’animal serait attribuable à son âge avancé. Cependant, cette explication n’a pas convaincu tout le monde. Activistes et citoyens ont exprimé des doutes, soulevant des questions sur les conditions de vie des animaux au parc zoologique de Hann et sur la gestion de l’établissement.

 

Des visiteurs récents du parc ont également apporté leur témoignage, confirmant certaines préoccupations. L’un d’eux raconte : « Je jure avoir été au parc il y a deux semaines, et l’état des lions était déplorable. » Ces témoignages mettent en évidence un écart entre le discours officiel, qui assure que les animaux sont bien nourris et soignés, et les observations directes des visiteurs, qui décrivent des lions amaigris et en mauvais état.

 

  1. Le vieillissement des lions : un facteur, mais pas une excuse suffisante

Le ministère justifie l’état des lions en évoquant leur âge avancé, un facteur qui peut effectivement expliquer certaines conditions physiques. Toutefois, comme le souligne l’activiste Vanessa Alexandra Saint-Jean Berrouët, une consultante internationale canadienne en poste à Dakar et fortement impliquée dans la cause animale, « Même vieux, les lions ne devraient pas être confinés dans des espaces restreints, mais dans des lieux comme la réserve de Bandia. » Vanessa Alexandra est connue pour son engagement sur le terrain, où elle aide les animaux abandonnés en les mettant en relation avec des personnes capables de les prendre en charge dans son réseau à Dakar. Sa remarque met en lumière un point essentiel : l’âge des animaux ne doit pas servir d’excuse pour les maintenir dans des conditions de vie inadaptées. Un environnement plus vaste et naturel, tel que celui offert par une réserve, permettrait à ces lions vieillissants de mieux profiter de leurs dernières années dans des conditions plus dignes.

 

  1. L’avis des autorités : relâcher les lions serait risqué

Cependant, la Direction des Eaux et Forêts, Chasses et de la Conservation des sols (DEFCCS) nuance cette approche. Selon eux, les lions du parc de Hann, « nés, grandis et apprivoisés en ces lieux, ont perdu toute aptitude à vivre à l’état sauvage. » Relâcher ces lions dans un milieu naturel serait donc, selon eux, « synonyme d’une condamnation à une mort certaine. » En effet, ces animaux, habitués à la captivité, ne possèdent plus les compétences nécessaires pour survivre dans un environnement naturel, où ils seraient confrontés à des dangers auxquels ils ne sont plus préparés.

 

  1. Une alternative possible : la réserve naturelle de Bandia

Malgré ces réserves, recaser les lions dans une réserve naturelle comme Bandia, tout en leur offrant un suivi rigoureux, pourrait constituer une solution plus éthique et respectueuse de leurs besoins. Ce transfert permettrait aux lions de bénéficier d’un cadre plus naturel sans les exposer aux risques d’une vie sauvage non contrôlée. Cependant, une telle initiative nécessiterait une gestion minutieuse pour garantir une transition en douceur et éviter que ces lions, habitués à la captivité, ne soient confrontés à des situations qu’ils ne sauraient gérer. En définitive, bien que la Direction des Eaux et Forêts insiste sur les difficultés de réintroduction des lions dans la nature, une solution intermédiaire, comme un transfert vers une réserve avec un encadrement approprié, pourrait améliorer leur bien-être tout en respectant les contraintes biologiques et pratiques liées à leur état actuel.

 

  1. Une gestion du parc qui soulève des questions

Outre les conditions de vie des lions, plusieurs citoyens ont exprimé leur mécontentement face à la gestion générale du parc. L’absence de signalisation, le manque de guides et l’état de certaines cages sont souvent mentionnés. Un autre visiteur déclare : « Cinq minutes au parc suffisent pour se faire une idée. Le zoo, autrefois un joyau de Dakar, se détériore de manière alarmante. » Ces observations pointent du doigt un manque de moyens ou d’attention dans la gestion du parc, qui était autrefois un lieu emblématique de la capitale sénégalaise. D’autres se remémorent le parc dans les années 1970, époque à laquelle il jouait un rôle éducatif important. Aujourd’hui, il semble loin de ce passé glorieux, et certains citoyens expriment le souhait que le zoo redevienne un lieu de diversité animale, avec des animaux de tous âges, et non uniquement un refuge pour des animaux vieillissants.

 

  1. L’implication de la société civile

Des organisations telles que Luttons contre l’indiscipline au Sénégal, un groupe Facebook de 248 000 abonnés, et la Ligue de Protection pour Animaux jouent également un rôle crucial dans la sensibilisation sur l’état des animaux au parc de Hann. Ces groupes, bien que n’ayant pas de pouvoir décisionnel, dénoncent régulièrement les conditions de vie des animaux et lancent des alertes pour inciter les autorités à agir. Selon un employé du parc qui a souhaité garder l’anonymat, « les lions souffrent de problèmes musculaires à cause des carreaux sur lesquels ils vivent. » Il ajoute que même si les lions sont vieux, cela ne justifie pas leur état pitoyable, et que leurs conditions de vie actuelles ne sont pas adaptées. Ces déclarations offrent un aperçu inquiétant des réalités internes du parc, et soulignent la nécessité d’un examen plus approfondi de la part des autorités.

 

  1. L’environnement du parc, une autre source de préoccupation

Les visiteurs ont également dénoncé l’insalubrité aux abords du parc. « Le parc de Hann, le seul à Dakar, est entouré d’ordures », déplore un citoyen. Ce constat est d’autant plus inquiétant que de nombreuses écoles de Dakar visitent régulièrement le parc, exposant ainsi les enfants à un environnement peu propice à l’éducation écologique.

 

  1. Un appel à l’action

Les Sénégalais, particulièrement ceux attachés à la protection de l’environnement, attendent des réformes immédiates. Le zoo de Hann, qui a longtemps été une fierté nationale, ne peut pas rester dans un tel état de délabrement. Les citoyens espèrent des actions concrètes de la part des autorités, comme le souligne un visiteur : « Nous attendons des actes, Monsieur le ministre, surtout de la part d’un ministre qui se présente comme un passionné de biodiversité, d’écologie, d’agroforesterie et de développement durable. »

 

Si le ministère souhaite rétablir la confiance, il doit aller au-delà des déclarations et entreprendre des actions visibles. Une recommandation clé, répétée par plusieurs citoyens, est que le ministre ou ses représentants visitent incognito le parc pour observer les conditions réelles. Des initiatives, comme celles proposées par la réserve de Bandia, pourraient aussi servir d’exemples de bonne gestion et offrir des solutions viables pour améliorer les conditions de vie des animaux vieillissants.

 

En conclusion, la situation au parc de Hann nécessite une intervention rapide et une révision complète de sa gestion. Les animaux, tout comme les visiteurs, méritent mieux. Si des actions concrètes ne sont pas prises, la réputation de cet établissement autrefois prestigieux continuera à se détériorer, et avec elle, la confiance du public dans les institutions censées protéger la biodiversité du Sénégal.

 

Cet article fait partie de Les Chroniques citoyennes d’Adama Diop, une série dédiée à l’analyse des défis et des espoirs qui façonnent le Sénégal. En tant que citoyen sénégalais engagé, je m’efforce de dévoiler les réalités du développement de notre pays et de proposer des solutions pour un avenir plus équitable et prospère. À travers chaque chronique, je cherche non seulement à analyser les problèmes, mais aussi à inspirer des actions concrètes et à célébrer les initiatives qui contribuent à un Sénégal meilleur. Les Chroniques citoyennes sont un espace pour réfléchir ensemble sur les chemins à suivre et pour encourager un dialogue constructif en faveur du progrès de notre nation.

 

Adama Diop
Natif du village d’Agnam-Goly résidant au Canada

 

Oumou Khaïry NDIAYE
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