Montée de l’immigration irrégulière et décès enregistrés au Sénégal : Une problématique à solutions multiples – Cheikh Moubarack Wade

L’immigration irrégulière demeure un problème alarmant au Sénégal, marqué par un nombre croissant de candidats et un nombre de morts toujours plus élevé. Il est essentiel de comprendre que ce phénomène est une problématique complexe qui nécessite la mobilisation de multiples parties prenantes, à savoir les citoyens, l’État sénégalais, ainsi que les États européens.

Les citoyens sénégalais doivent s’unir et agir de manière proactive pour endiguer ce fléau. L’immigration irrégulière reste un commerce lucratif pour certaines personnes et organisations sans scrupules qui ne cessent d’exploiter le désespoir de jeunes en quête d’un avenir meilleur.

Dans ce cadre, les familles jouent un rôle déterminant ! Certains parents investissent leurs maigres économies dans le départ incertain de leurs enfants, bien que les chances d’atteindre la destination soient minces, et que les risques pour leur vie soient élevés. Les efforts consentis par ces candidats à l’immigration irrégulière pourraient être redirigés vers la construction de leur avenir sur place. Il est crucial alors, de développer une résilience qui encourage les jeunes à rester et à réussir au Sénégal, plutôt que de risquer leur vie en haute mer.

Une autre dimension importante de cette crise concerne les accords de pêche signés avec des puissances étrangères. Ces accords ont considérablement réduit les opportunités pour nos pêcheurs, privant les eaux sénégalaises de milliers de tonnes de poissons en un temps record, au profit des chalutiers étrangers. Cela entraîne en conséquence, une précarité accrue chez les pêcheurs sénégalais, poussant certains d’entre eux à se tourner vers l’immigration irrégulière comme une solution désespérée.

L’obtention difficile de visa pour les jeunes africains contribue également à l’augmentation des départs clandestins. La frustration engendrée par les critères d’éligibilité, les longues attentes et les refus fréquents de visa pousse les jeunes à opter pour des méthodes irrégulières, se jetant ainsi dans les bras des passeurs.

De plus, les départs de pirogues surchargées, souvent avec plus de 200 personnes à bord, ne se font pas sans que des informations parviennent aux autorités. Des fuites d’information pourraient, en principe, alerter les services de renseignement et empêcher ces tragédies maritimes.

Face à l’hécatombe que nous constatons chaque année, il est impératif que chaque partie prenante assume ses responsabilités. Il est temps pour nous, citoyens et autorités, de reconnaître nos échecs et de chercher nos propres solutions à nos propres problèmes.

La responsabilité première incombe à l’État sénégalais qui doit créer et faciliter les conditions qui permettent aux jeunes de rester et de prospérer dans leur pays. Le rêve d’un avenir meilleur est légitime, mais l’immigration irrégulière ne doit pas être perçue comme la seule option.

En réalité, les efforts financiers et personnels investis dans le voyage clandestin pourraient être utilisés pour lancer des projets au Sénégal. Avec le soutien de l’État et des communautés locales, ces jeunes pourraient créer des initiatives porteuses en associant leurs forces et ingéniosité. C’est dans cet esprit que l’approche SOTOO, que nous avons développée depuis octobre 2020, prend tout son sens. Elle repose sur un état d’esprit qui vise à rester et à réussir au Sénégal, avec une mobilisation de ressources endogènes, tout en étant conscient que les opportunités existent dans notre propre pays.

La facilitation de la mobilité légale par les États, notamment européens, pourrait constituer une réponse pragmatique à cette crise. En permettant à nos jeunes de voyager légalement pour découvrir les réalités européennes, ils réaliseraient que des opportunités tout aussi enrichissantes existent en Afrique, et particulièrement au Sénégal. L’Europe n’est véritablement pas l’eldorado tant espéré, et nos terres regorgent de richesses culturelles, naturelles et économiques qui ne demandent qu’à être exploitées de manière durable.

Enfin, pour enrayer durablement le phénomène de l’immigration irrégulière, il est impératif que toute la nation sénégalaise se mobilise autour d’un intérêt commun. Nous devons dire non aux intérêts personnels qui minent nos efforts à tous les niveaux. En tirant parti des richesses de notre terroir, ainsi que de notre patrimoine culturel et spirituel, nous avons tout ce qu’il faut pour réussir chez nous, au Sénégal.

Cheikh Moubarack Wade

Président du Parti des Contributeurs du Sénégal

Dieyna SENE
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