Irrecevabilité de la liste de YAW et validation de celle de BBY : Une surenchère pour entériner la liste BBY ?

La décision du ministre de l’intérieur de déclarer irrecevable une partie de la liste nationale de la coalition de yéwi Askan Wi est contestée par beaucoup de constitutionnalistes. Avec une telle décision, Antoine Abdoulaye Félix Diome habitué à des manœuvres politiciennes, doit éviter de causer une tension politique dans ses moments où l’économie sénégalaise est morose.

Avec l’actuel ministre de l’intérieur, le code électoral est devenu ce qu’il lui en déduit. Même s’il est fort probable que le conseil constitutionnel ne suit pas la décision de la DGE, le respect des textes et leurs interprétations à juste valeur constitue un gage de stabilité pour les pays en voie de développement. Malheureusement depuis son arrivée à la place Washington, non seulement le dialogue politique est au point mort mais les agissements du ministre n’ont point de gages pour un apaisement dans le champ politique.

Après la publication des listes devant participer aux prochaines élections législatives, les spécialistes, presque à l’unanimité, ont contredit le ministre Antoine Abdoulaye Félix Diome. Ce dernier qui a été accusé d’avoir pour mission de combattre Ousmane Sonko qui reste le seul rescapé des candidats de la présidentielle de 2019 qui ont rejoint le camp présidentiel, semble continuer son acharnement contre la coalition YAW. Ainsi, la liste de BBY qui est frappée par une double irrégularité qui saute à l’oeil nu est repêchée par le ministre comme si de rien n’était.

En effet, lors du dépôt la liste de BBY, ce dernier a enfreint la loi sur le nombre maximum de parrainages qui est de 55 327 en déposant un parrainage de plus. L’application du code électoral comme prévu dans l’article 149 et précisé par l’arrêté du 03 mars allait donc rendre irrecevable la liste nationale et les listes départementales de la mouvance présidentielle.

Au lieu d’appliquer la loi comme ce fut le cas contre Malick Gackou en 2019, Antoine Diome a brandi un autre arrêté datant du 05 mai pour couvrir cette faute. Un tel arrêté dont lui seul était un courant car les mandataires des autres coalitions n’en disposaient pas. Avec un tel acte posé, Antoine Félix Diom est encore au front non seulement pour sauver les siens mais en a profité pour déclarer irrecevable la liste nationale des titulaires de YAW.

Pourtant, la liste des suppléants est interdépendante à celle titulaire. C’est pourquoi l’expert électoral estime tout simplement que le ministre de l’intérieur qui est un homme de droit en sa qualité de magistrat a outrepassé ses prérogatives. Pour Ndiaga Sylla, expert électoral, l’irrecevabilité d’une liste est prévue par le code électoral et la décision prise par le ministre de l’intérieur viole cette loi.

Mieux, dans le code électoral, pour un candidat qui a fauté, on ne peut pas rendre la liste d’une coalition ou d’un parti politique irrecevable. D’ailleurs l’article L 182 du code électoral est explicite en la matière.

« Après le délai de cinq jours prévus à l’alinéa premier de l’article L179 et ce, jusqu’à la date de prise de l’arrêté publiant les déclarations reçues, s’il apparaît qu’une déclaration de candidature a été déposée en faveur d’une personne inéligible, le Ministre chargé des élections doit saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans les trois jours de la saisine sur la recevabilité de la dite candidature ».

Dans ce cas précis qui pourrait frapper la liste de Yéwi Askan wi, c’est la candidature de la personne concernée qui pourrait être visée et non la liste.

Selon le constitutionnaliste, Seybani Sougou «Ni la double inscription sur une liste en qualité de titulaire et suppléant, ni l’inéligibilité d’un candidat (qui doit être notifiée au mandataire) ne peuvent entraîner l’irrecevabilité d’une liste de candidature au motif qu’elle serait incomplète. L’Alinéa 2 de l’article 179 du code électoral et l’Article LO.182 visent uniquement la recevabilité de la candidature concernée. L’impact est strictement limité à la candidature du candidat, mais ne porte jamais sur la liste » dit le constitutionnaliste.

Avec cette démarche de la DGE qui est aux antipodes de la loi électorale, le constitutionnaliste est convaincu que la décision d’Antoine Diom tendant à déclarer la liste nationale de Yewwi Askan Wi irrecevable (titulaires) est une grossière manœuvre de diversion vouée à l’échec, et une pirouette visant à déclarer à posteriori incomplète, une liste complète au moment du dépôt.

Et Seybani d’ajouter qu’il n’y a aucun doute que le Conseil Constitutionnel annulera la décision d’Antoine Diome en déclarant la liste nationale de Yewwi irrecevable car elle ne repose sur aucun fondement juridique. Et pour ce qui est de la prise de décision dont le ministre de l’intérieur est accusé d’avoir pris fait et cause pour la liste BBY, Antoine Diome malgré les dénonciations n’a pas notifié au mandataire Benoit Sambou le surplus de parrainages lors du dépôt.

Mieux la deuxième forfaiture commis par le mandataire de la mouvance en violation de la parité devrait pousser la direction générale des élections à sanctionner la liste nationale de BBY comme tel a été le cas avec la liste de YAW à Dakar. A ce titre la société civile sénégalaise avait bien soutenu que si la loi s’applique, la liste nationale de BBY ne participera pas aux élections. Malheureusement, pour Antoine Diome, lui seul, connaît l’interprétation de la loi. Pour le cas de BBY, le ministre évoque l’article 149 alinéa 8 et l’article 178 alinéa 2 pour justifier son acte pourtant en cas de violation de la parité et du nombre de parrainages c’est la liste (suppléant et titulaires) qui est visée et non une partie de la liste.

Antoine Diome et ses peaux de bananes dans le Processus Électoral

Le ministre de l’intérieur est un magistrat qui est réputé être un killer d’opposant. Après avoir eu la tête de Karim Wade à la cour de répression de l’enrichissement illicite, Diome a gravi les échelons et fut nommé agent judiciaire de l’Etat. Là, il a obtenu l’emprisonnement de Khalifa Sall, maire de Dakar et la confiscation de ses droits civique.

Pour le journaliste Pape Alé Niang, le chef de l’Etat, satisfait de la mission accomplie par le magistrat, lui a confié le ministère de l’intérieur. A son arrivée, les observateurs avaient prédit sur la nouvelle mission de l’homme qui selon eux, était soit de dissoudre le PASTEF soit d’emprisonner Ousmane Sonko et baliser le chemin à Macky Sall pour un probable troisième mandat.

Après un premier accrochage lors d’une journée de collecte de fonds organisée par le PASTEF soldée par un échec du ministre, les événements du mars 2021 durant lesquels le ministre a traité de terroristes et forces occultes les manifestants, il n’a pas fait marche arrière.

Paradoxalement, le même ministre qui est parvenu dans son imagination à détecter des terroristes n’a pas pu voir des nervis qui étaient à côté des forces de l’ordre pour s’attaquer à la population. Un an auparavant, le ministre de l’intérieur qui était interrogé par les journalistes sur le mutisme de l’Etat sur les 500 jeunes sénégalais candidats à l’émigration noyés dans l’océan atlantique, avait soutenu que le rôle de l’Etat n’est pas de compter le nombre de morts.

Lors des dernières élections locales, pour la première fois dans l’histoire politique du Sénégal, l’administration territoriale qui devait occuper une position neutre a donc pris parti pour la mouvance présidentielle entraînant le rejet massif des listes de la coalition Yewi Askan Wi

Avec cette manière de faire de la politique où tous les coups sont permis, cela a valu au Sénégal un mois de mars 2021 qui est désormais entré dans la page sombre de l’histoire politique du Sénégal. Pourtant, le dossier d’enquête (certificat médical) avait précisé qu’il n’avait pas de rapports sexuels à plus forte raison de parler de viol. Mais en s’entêtant à vouloir liquider un adversaire, le régime de Macky Sall a failli être écourté. Faire une mauvaise interprétation de la loi pour régler des problèmes politico-politiciennes pourrait causer une situation encore dramatique dans une crise économique qui gangrène déjà le pays depuis bientôt 3 ans avec la cherté de la vie.

Le Mandat

Mamadou Nancy Fall
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