Ce mercredi 06 avril 2016 s’est tenue à Ziguinchor, dans l’enceinte de la « Maison des Citoyens de la CEDEAO », une grande rencontre d’échanges sur les défis et les impacts occasionnés par le blocus de la frontière entre la Gambie et le Sénégal sur les opérateurs économiques et les populations de cette sous-région.
La rencontre a réuni tous les délégués de quartier de la ville de Ziguinchor, des représentants des organisations de commerçants, des regroupements de chauffeurs et transporteurs, des leaders d’associations de la société civile, de mouvements citoyens, de représentants des jeunes pour l’intégration régionale et d’ONG œuvrant pour la paix et la fraternité entre les peuples, entre autres.
Les participants ont constaté que le différend ayant occasionné ce blocus serait engendré par la hausse brutale du tarif appliqué par la Gambie sur les camions traversant le territoire Gambien pour se rendre au Sud au Sénégal ou en Guinée Bissau. Même s’ils ont regretté le manque de concertations préalables entre les deux pays avant une telle hausse, les participants ont reconnu qu’au-delà de ce cas récurrent, toutes sortes d’autres entraves à la libre circulation, de faux-frais, de pratiques anormales et de tracasseries irrégulières sont monnaie courante sur les corridors routiers de cette sous-région et constatables dans tous les trois pays au grand dam des populations.
Or de telles pratiques sont non seulement de nature à compromettre la compétitivité du commerce, mais ont aussi un impact négatif sur les prix et sur la vie concrète des populations de la Casamance, de la Gambie et de la Guinée Bissau, qui sont pourtant parmi les plus pauvres économiquement et les plus vulnérables de l’Afrique de l’Ouest.
Les participants ont regretté les discours tenus par certains acteurs et les messages envoyés par certaines personnes qui ne subissent pas directement les effets du blocus de la frontière. Dire que le Sénégal doit profiter de cette situation pour « étouffer la Gambie et lui montrer sa force » n’est pas une option humainement et économiquement responsable.
Il n’appartient pas à des regroupements socioprofessionnels de bloquer les frontières ou de décider de ce que les Etats doivent faire entre eux. Car ce sont toutes les populations des deux pays qui en souffrent, en particulier celles de la Casamance, c’est pourquoi il est légitime que les populations de Ziguinchor donnent leurs avis et se fassent entendre.
- La pénurie commence à s’installer sur certains produits de première nécessité dont le sucre;
- Les prix de certains produits comme le sucre, l’huile et d’autres denrées de première nécessité connaissent une hausse importante;
- Plus de 27 camions immatriculés au Sénégal, contenant des marchandises de commerçants Sénégalais, sont bloqués à la frontière, en territoire Sénégalais, sans aucune raison et aucune explication, la police et les Douanes Sénégalaises se renvoyant la responsabilité;
- Certains de ces camions commencent à connaitre des problèmes techniques du fait de la chaleur tandis que les produits périssables qu’ils contiennent se dégradent. Les commerçants propriétaires de ces marchandises risquent la banqueroute car certains ont contracté des crédits bancaires pour importer leurs marchandises;
- Le tarif du transport par les « 7 places » par le contournement par Tambacounda est passé de 9000 à 18.000FCFA, soit plus du double, supporté par des populations parmi les plus pauvres du Sénégal. Sans compter la fatigue physique supportée par de vielles personnes ou des familles entières voyageant sous une chaleur pouvant atteindre 45%.
- De plus, en cas de contournement par Tambacounda, la tonne de marchandises passe de 12.000FCFA à 19.000FCFA, ce qui se répercute sur les prix au détail.
- Au delà de ces effets économiques, les populations de la Casamance souffrent encore pour voyager de Ziguinchor à Dakar ou vers les autres régions du Sénégal.
Compte-tenu de ces faits, les participants demandent avec insistance au Président Macky Sall, Président en exercice de la CEDEAO, de ne ménager aucun effort pour trouver une solution diligente à cette situation qui a trop duré, en particulier en ouvrant dans les meilleurs délais la frontière pour libérer les camions qui y sont bloqués arbitrairement.
Les participants ont en outre demandé aux deux Présidents, Son Excellence Monsieur Macky Sall et le Président Yaya Diammeh, de privilégier le dialogue et la concertation pour raffermir les relations entre les deux peuples afin de créer les conditions d’un co-développement dans la paix, plutôt que de chercher à « s’humilier » mutuellement.
Les participants ont appelé les deux Chefs d’Etat à accélérer la construction du pont sur le fleuve Gambie, dont le financement est déjà acquis, qui sera un véritable outil d’intégration entre les peuples du Sénégal, de la Gambie et la Guinée Bissau. Ils ont en outre invité les deux Chefs d’Etat à trouver une solution durable et pérenne à tous les problèmes de circulation entre les pays à travers la concertation et le dialogue permanents.
Les participants rappellent aux deux Chefs d’Etat que les peuples de la sous-région sont les mêmes et ils aspirent à l’intégration effective et à la libre circulation des marchandises et des personnes dans un territoire régional en paix et en prospérité.
Le Sénégal ne peut pas se développer sans la Gambie et la Guinée Bissau et les autres Etats de la CEDEAO. Aucun des autres pays ne peut aussi se développer sans le Sénégal. Nous sommes condamnés à vivre ensemble dans la paix et la fraternité.
Fait à Ziguinchor le 06 avril 2016