Wagner : le cheval de Troie dans la tension entre Bamako et Paris

Depuis la prise de pouvoir par Assimi Goïta après l’arrestation et la démission forcée de l’ancien président de la transition Bah NDaw, les relations entre Paris et les nouvelles autorités semblent être tendues. La prolongation de la transition paraît inévitable à seulement 5 mois du délai imparti pour la transition. Initialement prévues en Février 2022, les élections présidentielles sont presque intenables à la date prévue et ne sont plus à l’ordre du jour malgré les mises en gardes de la CEDEAO et de la communauté internationale.

D’une part les nouvelles autorités n’excluent pas l’hypothèse d’une possible prorogation et d’autre le gouvernement risque de s’offrir les services de Wagner comme substitution de l’opération Barkhane dont la fin a été annoncée en juin dernier par Emmanuel Macron. Ceci pourrait bien être un coup de poker pour la transition afin de ne pas plier face aux exigences de la communauté internationale.

Le Mali vit une situation d’insécurité, malgré la présence des forces internationales, la situation sécuritaire se détériore de jour en jour et les djihadistes gagnent de plus en plus de terrain et menacent d’étendre leur influence dans les pays du golfe de Guinée.

L’élection du nouveau président qui marque la fin de la transition, se veut inclusive et doit prendre en compte l’aspect sécuritaire du pays et bon nom­bre de territoires échappent au contrôle de l’État central après un an de transition il n’y a pas eu d’avancée significative.

Le silence énigmatique du président de la Transition s’avère intriguant pour Paris. En effet, depuis le second coup de force du colonel Assimi Goïta con­tre l’ancien président de la transition Bah Ndaw et de son premier ministre Moctar Ouane, les pressions ne cessent d’accroître de part et d’autre. Malgré le poids international, Assimi Goïta semble intrépide et compte asseoir son autorité sur le plan géopolitique au Sahel.

La CEDEAO redoute une prorogation de la transition et se montre intransigeante bien que le président de la transition dit vouloir respecter les engagements pris par le Mali. Le premier ministre quant à lui n’exclut pas un prolongement du délai imparti à la transition. Néanmoins rien ne laisse présager avec exactitude que les élections pourraient se tenir conformément à la date prévue.

Il est à noter que la pratique de la guerre a évolué et le monde de la guerre s’est quelque peu libéralisé. L’une des stratégies développée par les pays développés est la création de société de mercenaires, qui leur permet d’intervenir de façon non officielle dans les zones où ils ne devront pas pour ainsi échapper au droit international en cas de bavures.

Les propos du premier ministre malien lors de son discours à La Tribune des Nations Unies n’a pas laissé indifférent Paris qu’il accuse d’avoir pris une décision unilatérale avec la fin annoncée de Barkhane.

Lors de son intervention il déclare: « La nouvelle née de la fin de Barkhane, plaçant le Mali devant le fait accompli et l’exposant à une espèce d’abandon en plein vol, nous conduit à explorer les voies et moyens pour mieux assurer la sécurité de manière autonome avec d’autres partenaires ». Ce partenaire ne serait autre que Wagner.

L’arrivée de Wagner pourrait bien évidemment changer la donne. Même si aucune source officielle ne fait état d’un quelconque contrat ni du contenu. Les militaires semblent avoir pris le dessus dans la bataille médiatique depuis la révélation par des médias nationaux et internationaux de la volonté de l’État malien à recourir aux services de Wagner. Cette situation crée une agitation du côté de Paris.

L’influence Russe gagne du terrain au Sahel, elle qui n’a pas d’antécédent colonial avec l’Afrique, veut étendre son influence sur le continent le plus convoité. Sergueï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, aux Nations unies a affirmé que le Mali est entré en contact avec Wagner même s’il nie toute implication de la Russie dans cette affaire. Tout porte à croire que le Kremlin joue un rôle capital dans l’expansion de Wagner dans le monde parce que ces mercenaires opérant uniquement dans les zones où la Russie a des intérêts géostratégiques comme en RSA, Libye ou économique comme en Syrie.

Plusieurs partenaires du Mali se sont érigés contre ce projet et l’Union européenne, la CEDEAO et l’Allemagne. La France affirme avec clarté sa présence et ne quittera pas le Sahel contrairement à ce qu’elle avait laissé entendre en juin dernier avec la fin annoncée de Barkhane en tant que opération extérieure, par le président français Emmanuel Macron même si les autorités françaises sont loin d’être enchantées de partager le territoire avec d’autres, qu’elles soient privées ou non.

La transition ne semble plus respecter le délai qui lui est imparti. Lors d’une interview accordée à RFI et France 24, Choguel n’exclut pas la possibilité de proroger la transition de quelques semaines ou quelques mois car les élections ne sont plus à l’ordre du jour.

Selon lui, ce sont les assises nationales sur la Refondation qui définiraient un nouveau chronogramme électoral. La carte Wagner reste entre les mains des autorités maliennes qui semblent avoir compris l’enjeu, pour calmer les ardeurs de leurs partenaires de longue date dont la sincérité est remise en cause par une bonne partie de la population malienne qui ne manque pas d’occasion pour manifester pour leur départ.

A quelques mois des élections présidentielles françaises prévues en Avril 2022, l’administration de Macron se retrouve dans une situa­tion perplexe. Sa politique au Sahel est décriée par l’opinion publique malienne et l’avenir de la présence française au Sahel risque de dominer les débats de campagne.

Bah Traoré, Stagiaire à Timbuktu Institute

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