Sénégal-Présidentielle 2019 : À Gauche Toute

L’instinct de Gauche revenu en diplomatie sera assurément le bilan de campagne du candidat Macky Sall pour 2019, à défaut ou en plus d’un programme d’infrastructures plus proche des éléphants blancs de Me Wade que le président sortant a coloriés.

Une diplomatie plus à gauche entamée avec les résolutions sur la Palestine et la Gambie a relancé les supputations sur le programme de campagne du candidat Macky Sall en route pour un second mandat présidentiel au Sénégal. Empêtré jusque-là dans une coalition-boulet et un calendrier de réalisations d’ infrastructures rappelant plus les « éléphants blancs » de Me Wade qu’il a aidés à peindre (en bleu et en marron), le candidat à un second mandat présidentiel donnait l’impression d’être un otage de formations à l’intérieur desquelles il a quelques difficultés à se mouvoir, qu’il s’agisse de son propre parti ou des coalisés et même dans les formations de l’opposition où son ombre ne cesse de planer : Malick Gakou, pour ce qui est de l’Alliance des Forces de Progrès du président Niass, Oumar Sarr le puîné, pour Rewmi d’Idrissa Seck, les remous au Parti démocratique sénégalais depuis l’affaire Aïda Mbodj et la présidence du groupe parlementaire, le refus d’un Parti socialiste de rouler vers une mort programmée en investissant de facto et dès 2012 le maire Khalifa Sall comme le dernier des Mohicanssont autant de goumbé, ndawrabine et autres thiakass vers ou contre le pouvoir ; il en est jusqu’au premier Premier ministre de 2012 qui doit sa descente dans l’arène politique à son dépit amoureux contre son ancien patron, malgré le retour d’intérêts mis en quarantaine sous Me Wade. Le président Macky Sall est donc bien au cœur de tous les partis politiques et il fallait sortir de ce cercle vicieux qui rejaillissait négativement sur la démocratie sénégalaise.

La diplomatie de ce début d’année semble ainsi venir au secours d’un président qui se pose un peu plus à gauche, faisant travailler l’Organisation des Nations-Unies avec deux résolutions adoptées coup sur coup à une très grande majorité, en moins d’un mois, avec la paix et la lutte pour la démocratie comme fond de commerce : les textes adoptés le 23 décembre (2334) et le 18 janvier (2337) sont d’autant plus adaptés qu’ils épousent les contours d’une détente internationale qui s’amorce avec une victoire plus qu’assurée sur le terrorisme international, donc de retour à la nouvelle quête identitaire internationale qui entraîne cependant le monde vers la Droite.

Aussi bien sur la Palestine avec le souhait de cohabitation de deux États souverains que pour la Gambie, Macky Sall revenu de la visite de son adolescence française s’est comme souvenu de son socialisme d’antan : freiné dans son désir de rupture par le boulet du soutien sans flamme du candidat de l’opposition le mieux placé, il a perdu un temps précieux à essayer de régler les querelles byzantines de ses alliés et de ses propres militants réglant leurs comptes dans le sang, sans plainte d’aucun bord ou (auto) saisine d’un quelconque magistrat.
Au sein de l’opposition même, les tentatives de positionnement sur l’échiquier politique national sont une menace à une démocratie penchant vers un totalitarisme faute de garde-fou, ce qui eût pu atténuer la crédibilité internationale du jeu politique sénégalais.

Le Sénégal a fait montre d’une maturité diplomatique sans égal ces derniers temps et mérite d’être cité en exemple. Sur la Palestine, en décembre, mais surtout sur la Gambie, la diplomatie de solidarité menée par l’État a mérité des éloges de toutes parts; jusques et y compris au Vatican. Le pays en tirera certainement profit sous peu : la paix et la démocratie comme fonds de commerce nourrira ceux de l’extérieur qui ont une très grande influence économique sur la majorité de l’intérieur.

Limité donc par les formations politiques en quête de légitimité populaire, le président sénégalais semble se retourner vers l’international pour se poser en garant d’une vision philosophique chère à l’Occident : le combat pour la sauvegarde de la démocratie et des libertés. Ce fut d’autant plus aisé que le Sénégal joue au début de chaque alternance au gendarme ouest-africain avec le baptême de feu des nouveaux venus :Abdou Diouf s’est opposé à Kukoi Samba Sanyang (opération « Fodé Kaba« ) comme Macky Sall à Yaya Jammeh, toutes choses étant égales par ailleurs, après un premier baptême du feu en 2012 avec le Mali, et la crise gambienne de décembre-janvier ; quant à lui, Me Wade a échangé le tir avec la rébellion ivoirienne de 2002. Dakar sert ainsi depuis plus de trente ans de hub pour le repli et l’évacuation de populations nationales ou étrangères, et de base de déploiement de forces internationales devant intervenir dans la sous-région.
(Pathé MBOD Journaliste, sociologue).

Saër DIAL

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