Le Conseil constitutionnel peut-il éclairer ma lanterne ?

En allant au supermarché du coin, j’ai vu un événement malheureux qu’on pouvait éviter dans un Etat moderne et démocratique. Il s’agit de deux étudiants qui voulaient se battre à cause de leur compréhension divergente sur l’article 27 de la loi n° 2016/10 du 5 avril 2016 qui stipule que «la durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs».

L’un estime que la loi constitutionnelle vise strictement deux mandats de cinq ans, l’autre soutient que c’est uniquement deux mandats, quel que soit la durée. Un phénomène étrange à mon avis, car il peut remettre en cause l’enseignement du droit au Sénégal.

Les politiciens peuvent avoir des perceptions différentes sur les questions de droit ; ce qui n’est pas tolérable est de voir des universitaires avoir des compréhensions opposées sur un texte qui semble être clairement écrit par un Professeur agrégé des Universités.

J’interpelle le juge constitutionnel pour m’aider à comprendre la disposition 27 de la Constitution relative au mandat du président de la République. Je demande au juge, en tant que citoyen, de m’éclairer sur le mandat : un mandat tout court ou un mandat de cinq ans.

Au Sénégal, le Conseil constitutionnel assure la justice constitutionnelle. Il exerce un contrôle de constitutionnalité des lois et traités internationaux et juge de la régularité des élections, conformément à la loi organique n°2016/23 du 14 juillet 2016.

Personne n’ignore l’innovation majeure relative au Conseil constitutionnel lors de la révision : «L’élargissement des compétences du Conseil constitutionnel pour donner des avis et connaître des exceptions d’inconstitutionnalité soulevées devant la Cour d’appel.»

Je n’ignore pas l’article 74 de la Constitution relative à la saisine du Conseil constitutionnel. La démocratie est une remise en cause de situations en fonction de l’évolution des sociétés humaines ; ce sont des réformes et innovations régulières.

En France, il y a eu avec la réforme de 2008, un nouveau droit appelé «question prioritaire de constitutionnalité», qui permet à chaque justiciable de contester la conformité des lois déjà promulguées à la Constitution devant le Conseil constitutionnel.

Au Sénégal, il est temps de permettre aux particuliers de saisir le juge constitutionnel pour une bonne compréhension des dispositions juridiques.
Beaucoup d’Etats en Afrique traversent des tensions post-électorales à cause des décisions du juge constitutionnel.

C’est le moment de clarifier certaines dispositions juridiques confuses pour mettre à l’aise tous les acteurs du jeu démocratique et éviter les tensions sociales violentes.

Lorsque des incompréhensions juridiques majeures se posent dans la société, il est de la responsabilité du juge d’indiquer la voie de droit en toute impartialité, quelles que soient les formes de pression. C’est pour cela que je demande au juge l’appréciation qu’il porte sur l’article 27 de laConstitution du Sénégal.
L’écrivain Paul Van Tieghem disait par rapport à l’acte de juger ceci : «Il est plus difficile sans doute, mais il est peut-être plus courageux, il est à coup sûr plus juste, d’essayer de comprendre avant de juger.»

Alpha Youm Spécialiste de Gestion publique
et droit social Président de l’Apc

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