Justice, cherté de la vie, lutte contre l’homosexualité et risque de forclusion de listes ; vers des élections de tous les dangers au Sénégal

Les prochaines élections législatives risquent de se dérouler dans un climat assez particulier au Sénégal si la tension continue de monter. La reprise des manifestations du collectif And Sam Djiko Yi, la cherté de la vie, le sentiment d’une justice aux ordres qui gagne de plus en plus l’opinion et un risque de forclusion de listes de l’opposition risquent de rendre la situation assez compliquée si l’Etat ne met en place des solutions de décrispation.

A ce rythme, le Sénégal court vers tous les dangers. Le climat délétère qui prévaut sur l’échiquier politique ne fait qu’envenimer une situation déjà compliquée. Le goorgoorlu qui peine à joindre les deux bouts pour trouver quelque chose à se mettre sous la dent, est frustré d’entendre à longueur de journée des malversations à coût de milliards des proches du régime sans pour autant que ces gens ne soient inquiétés. Depuis 2012, des rapports des corps de contrôle: OFNAC, IGE, cours des comptes, CENTIF, ARMP n’ont pas connu de suite. Ainsi au Sénégal les populations assistent à une série de scandales sans fin sans pour autant que la justice ne lève le petit doigt pour diligenter ces problèmes.

Paradoxalement, certaines personnes citées dans ces malversations connaissent des promotions. A l’exemple de Cheikh Omar Hann, ancien Directeur général du Centre des Œuvres universitaires de Dakar (COUD) qui s’était vu suggéré par l’OFNAC une interdiction d’exercer toute fonction dans les affaires publiques après avoir été épinglé par un rapport de ce corps de contrôle. Le président Macky Sall fait fi de ce rapport et fait nommer M. Hann comme ministre de l’Enseignement Supérieur. Des exemples de cette nature se comptent à la pelle sous la gouvernance du président Macky Sall.

Paradoxalement, les adversaires du régime et la société civile sont quasiment traqués par cette justice qui à la longue sera accusée d’être le bras armé du pouvoir exécutif. Le cas des activistes kilifeu et Simon et de la chanteuse Amy Collé en constituent de parfaites illustrations. Ils ont été poursuivis et arrêtés après que leurs discussions privées aient fuitées.

Il faut mettre aussi dans ce registre le cas de Khalifa Sall poursuivi dans l’affaire de la caisse d’avance de Dakar dont les droits de l’hommistes ont dénoncé les irrégularités de la procédure comme la violation de l’article 5 de l’UEMOA qui exige la présence de l’avocat au moment de l’audition sous peine de vice de procédure, puis la détention d’un député sans la levée de son immunité parlementaire. Cette procédure qui avait pris un temps record reste un caillou dans les bottes de la justice. Outre Khalifa et Karim Wade, une sordide accusation de viol, a causé la mort de 14 jeunes et 600 blessés en mars 2021…

Ce sentiment répulsif des citoyens sénégalais qui semblent être dans le viseur de dame justice, a fini par causer une rupture de confiance entre les justiciables et leur justice. La solution pour certains est devenue l’occupation de la rue. Ainsi, des marches sont organisées un peu partout et en tout temps, entraînant souvent des manifestations violentes.

La cherté de la vie

Durant cette crise économique qui a envenimé la situation qui était déjà morose, les populations sont dans la souffrance. A l’est du Sénégal plus de 500 mille personnes dans le monde rural sont menacées par la famine. En ville, la vie est tellement difficile que l’insécurité est devenue grandissante.

Certes l’invasion de l’Ukraine par la Russie en est l’une des causes mais force est de constater que la situation économique était déjà compliquée avant que les conséquences dramatiques de cette guerre accentuent la crise. Au Sénégal, le commerce est la principale activité économique car le secteur secondaire n’existe quasiment pas. Le taux de chômage reste très élevé.

Selon les chiffres de l’ANSD 300 mille diplômés arrivent dans le marché du travail chaque année et 30 mille seulement en trouvent ; et les autres sont au chômage. Le Sénégal est parmi les 25 pays les plus pauvres de la planète et l’un des pays où le taux de chômage reste le plus élevé malgré le fait qu’il dispose du zirconium, une mer poissonneuse, du phosphate, de l’or, du fer, du calcaire, du pétrole, une ouverture maritime…

Ceci reste un paradoxe qui a accentué la pauvreté et causé des frustrations dans un pays où les jeunes sont tenaillés par le chômage, et pour survivre certains tentent le chemin de l’émigration clandestine.

Lutte contre l’homosexualité

La lutte contre l’homosexualité entamée par le collectif And Sam Jikko Yi pour la préservation des valeurs met mal à l’aise le régime de Macky Sall qui a rejeté la criminalisation de cette pratique qui est une abomination.

Ce collectif soutenu par les chefs religieux et coutumiers déroule son rouleau compresseur pour exiger le vote de la loi. Très déterminés à faire face au régime de Macky Sall, le chef de l’Etat semble avoir été psychologiquement atteint car son image en a pris un sacré coup.

Ainsi, en plus de jouer un rôle néfaste contre le régime en le discréditant, dans ce bras de fer qui l’oppose aux membres du collectif dirigé par des religieux, une mauvaise gestion pourrait bien avoir un effet déclencheur d’une situation intenable car les fanatiques et autres croyants ne cessent d’indexer le régime de vouloir dérouler un agenda LGBTQ depuis quelques mois.

Forclusion de listes de l’opposition

Dans la phase de dépôt des listes, la ville de Dakar et de Mbacké qui sont des territoires que le régime ne parvient pas à conquérir depuis 2012 sont devenus des hantises du régime. Les anomalies dans la liste de la coalition yewi askan wi à Dakar qui sera la principale liste de l’opposition et de la coalition wallu Sénégal à Mbacké qui sera la principale liste sont très préoccupantes.

Pour le moment, c’est l’omerta pour les leaders de l’opposition même si celle de la région de Diourbel est réglée. Mais il y a des circonstances suspicieuses qui pourraient bien être causées par des opposants. L’invalidation des listes pourrait bien causer une résistance des opposants. Toutefois force est de constater que depuis un certain temps, le code électoral pose un sérieux problème surtout avec le parrainage malgré la décision de la cour de justice de la CEDEAO qui demande à ce qu’il soit revu.

Ce parrainage qui est quasiment assimilable à un vote avant l’heure du fait que le citoyen n’a le droit de parrainer qu’un seul candidat pourrait bien constituer une violation du secret de vote. Depuis la présidentielle de 2019, le processus électoral est devenu un point de discorde de la classe politique. Le rejet des listes est fréquent et les coups bas réguliers.

D’ailleurs lors des élections locales, pour la première fois l’administration territoriale a pris parti dans un jeu où elle devait garder la neutralité en causant le rejet massif des listes de l’opposition. La disparition des mandataires dont Djibril Ngom qui fut par la suite reçu par le Président est le symbole d’une inélégance républicaine dont l’objectif est d’enterrer l’opposition radicale. Cependant l’apaisement du climat politique et social doit être la préoccupation du chef de l’Etat qui est le principal concerné en tant gardien de la constitution mais de l’opposition et des chefs religieux.

Le Mandat

Dieyna SENE
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