Embargo contre le Mali : les pertes du Sénégal surestimées

C’est au mois de janvier dernier que la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) avait décidé de mettre sous embargo le Mali. Des sanctions économiques pour forcer la junte au pouvoir à aller dans le sens de donner un délai raisonnable pour un retour à l’ordre constitutionnel.

Cependant, Assimi Goïta, homme fort de Bamako avait clairement indiqué qu’il n’allait pas se plier aux injonctions des Chefs d’Etat de la communauté sous-régionale. Et malgré plusieurs rencontres pour entamer un dialogue productif, il n’y a pas eu finalement d’entente, surtout que le peuple malien, hyper déterminé, ne cessait de démontrer par de vastes mouvements de foule, son soutien au pouvoir militaire en place.

Destiné avant tout à sanctionner les autorités maliennes, il faut dire que cet embargo a été aussi fortement ressenti par des Sénégalais qui effectuaient la navette entre Dakar et Bamako. Commerçants ou chauffeurs pour la majorité, ils ont dénoncé à haute voix, les sanctions contre le Mali, réclamant la levée d’un tel embargo. A ce propos, ils ne cessaient de dénoncer les grosses pertes pour le Sénégal. Des pertes estimées à près de 600 milliards francs CFA. D’autant qu’entre le Sénégal et le Mali, les échanges commerciaux sont extrêmement denses et variés.

Toutefois, un économiste prend le contre-pied des nombreuses voix qui se sont élevées pour parler de pertes économiques énormes pour le Sénégal. Et pour cause, interpellé par ‘’Le Vrai Journal’’, l’économiste, astreint au «devoir de réserve» et qui a donc préféré parler en «off», signale que le Sénégal n’a pratiquement «rien perdu par rapport à l’embargo économique contre le Mali qui était en vigueur depuis le mois de janvier dernier »

A l’en croire, «c’est plutôt le Mali qui a énormément perdu.» Se voulant plus précis, il déclare : « Certains disent que le Sénégal a perdu près de 600 milliards francs CFA. Ce n’est pas conforme à la vérité. Il faut dire que ces produits concernés par les échanges entre les deux pays ne sont pas fabriqués au Sénégal. Ils transitent seulement par le Sénégal. Ce que notre pays a perdu se mesure donc simplement en termes de recettes douanières. Alors que pour les marchandises, ce n’est pas trop méchant si on compare ce que le Sénégal a réellement perdu par rapport au Mali.»

L’économiste va encore plus loin en faisant savoir ceci : «Toutes les marchandises n’étaient pas d’ailleurs concernées par l’embargo. Les denrées alimentaires, les médicaments et le pétrole passaient.

De ce point de vue, c’est l’économie malienne qui était asphyxiée et non celle du Sénégal. C’est le Mali qui a beaucoup senti l’embargo car, au-delà des sanctions économiques imposées par la Cedeao, il faut également rappeler que les partenaires techniques et financiers internationaux ont aussi bloqué certaines aides économiques en direction de Bamako»

Selon lui, seules des entreprises comme les «cimenteries basées au Sénégal ont un peu senti l’embargo, même si à ce niveau, il est permis de relativiser parce que certains camions passaient aussi la frontière.» Il termine en rappelant que la levée des sanctions est une véritable bouffée d’oxygène pour le Mali parce qu’en faisant passer «des produits depuis la Guinée ou encore la Mauritanie, c’était financièrement plus onéreux pour les autorités maliennes que de faire passer des produits directement par le Sénégal ou la Côte-d’Ivoire.»

Le Vrai Journal

Momar Diack SECK
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