Cheikh Marouba Guèye (1860-1940) : Le trait d’union entre Serigne Touba Mbacké et Seydi El Hadji Malick Sy

Cheikh Marouba Guèye de Tivaouane fut de ceux qui eurent très tôt répondu à l’appel du Cheikh Ahmadou Bamba (en 1885, déjà !). Fervent disciple du Fondateur du Mouridisme et ami de Maodo Malick Sy, il était l’interface entre les deux proches parents et hommes de Dieu. Sa contribution pour le rayonnement de la Mouridya a été déterminante.

Cheikh Marouba Guèye a vu le jour en 1860 à Ndiagne, dans l’ancien Cercle de Louga. Il est le fils de Malick Fatma Guèye et de Sokhna Mame Coumba Bakary Guèye.

Très tôt, le jeune Marouba fut confié au très célèbre maître coranique Serigne Matar Ndoumbé Diop. Ce dernier est le grand-père de Cheikh Mouhamadou Bassirou Mbacké Ibn Serigne Touba Khadimou Rassoul, père de l’actuel Khalife Général des Mourides, Se­rigne Mountakha Mbacké Bassirou. Il passa dans d’autres Daaras pour approfondir ses connaissances islamiques. Après la mort de son père, il alla s’installer à Keur Amadou Yalla (Thilmakha Ngol) en compagnie de sa mère et de sa soeur Codou Guèye. Là, il s’initia au commerce de tissus qu’il acheta chez les commerçants colons. Il y tenait un « bagg » (grand atelier de teinture).

Son allégeance au Cheikh en 1895

A en croire El Hadji Yatma Guèye, porte-parole de la fa­mille Keur Cheikh Marouba Guèye : « Un jour, le Cheikh Ahmadou Bamba passa à Thilmakha Ngol en quittant Mbacké Baol pour se rendre à Mbacké Kadior. Le marabout était en compagnie de quelques-uns de ses frères comme Serigne Mouhama­dou Lamine Lô Dagana, Se­rigne Ndame Abdourahmane Lô.

Comme tout le monde, le jeune Marouba attendit la fin de l’accueil pour aller faire son ziaar auprès du Saint homme. Il lui serra la main et sentit quelque chose similaire à de l’aimant. Il répartit chez lui. La nuit, il ne put fermer l’oeil. Il voyait le Cheikh Ahmadou Bamba défiler.

Le lendemain, il retourna chez lui. Sur les lieux, il vit Serigne Ndame Ab­dourahmane Lô. Ce dernier l’amena chez Borom Touba. Alors le Cheikh qui demanda à Serigne Ndame de lui expli­quer les chartes pour entrer dans la Mouridya. Puis, Se­rigne Touba lui demanda comment il a acquis son avoir qui était composé d’un cheval, d’un fusil et des tissus qu’il avait par-devers lui.

Après explications, le Cheikh lui dit de « restituer le cheval offert par Lat Dior Ngoné Latyr Diop et le fusil d’Ibra Fatim Sarr, alors chef de canton de Thilmakha. Ce qui fut fait. Cheikh Ma­rouba fit alors allégeance à Se­rigne Touba. C’était en 1985. Il avait 25 ans à l’époque. Il occupa donc la 11ème place dans le classement des « Cheikhs ». Après, il fut parti en compagnie du Cheikh à Mbacké Kadior. En dépit de la ténacité de certains de ses parents, il resta», a dit son petit-fils.

Un des derniers à parler au Cheikh avant son départ en exil

Cheikh Marouba Guèye était des rares disciples de Cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul qui étaient à Saint-Louis lors de son procès du 05 Septembre 1895. A Dakar, lors de son départ en exil, alors que le bateau s’apprêta à quitter le Port de Dakar pour le Gabon, il était parmi les derniers à lui adresser la parole (après Mame Cheikh Ibrahima Fall). Ce qui en dit long sur les relations entre le Cheikh et lui. Il donna la presque totalité de ses récoltes à Mame Thierno Birahim Mbacké en guise de contribution au rayonnement du Mouridisme.

Le passage de Serigne Touba en Juin 1903 à Tivaouane

Après son retour en exil, Se­rigne Touba fut appelé pour un autre voyage en Mauritanie. Il quitta Diourbel, passa à l’école des cadres ruraux de Bambey, à Touba Toul avant d’arriver à Tivaouane. Dans la Ville de Mame Maodo, il effectua la prière de l’aube et du petit matin. Alors, il demanda aux freys d’aller informer de sa présence Cheikh Marouba. Aujourd’hui, le lieu où il effectua la prière fait office de mosquée du quartier Keur Cheikh Marouba Guèye de Ti­vaouane. Le Cheikh avait aussi tracé les contours d’un cimetière et l’eut béni à l’image de ceux de Diourbel et Touba. Cheikh Marouba Guèye fut parti plusieurs fois en Mauritanie et à Thiéyène Djolof pour donner ses « adyas » tirés de son commerce et de ses exploitations agricoles.

Ambassadeur de Serigne Touba auprès de Maodo

Cheikh Marouba Guèye jouait le rôle d’interface entre Se­rigne Touba Khadimou Ras­soul et son proche parent et frère en Islam, Seydi El Hadji Malick Sy Maodo. Il fut un ami de ce dernier. Il était le missionnaire du Fondateur du Mouridisme auprès de Ndiol Fama (Seydi El Hadji Malick Sy).

« Il y avait une année où l’on éprouvait beaucoup de difficultés pour cultiver les vastes exploitations de Seydi El Hadji Malick Sy à Ndiarné. Serigne Touba demanda à Cheikh Ma­rouba Guèye et les disciples mourides de Tivaouane et environs d’aller lui prêter main forte. A la tête d’une impressionnante foule de talibés, Cheikh Marouba Guèye dirigea les travaux jusqu’au terme. On se rappelle que lors de la disparition de Mame Maodo en 1922, Serigne Touba qui était en résidence surveillée à Diourbel avait en­voyé une délégation composé de ses frères cadets Mame Cheikh Anta Mbacké, Serigne Balla Thioro Mbacké et son disciple Cheikh Marouba Guèye. D’ailleurs, dans son testament, El Hadji Malick Sy avait émis le souhait de voir Cheikh Marouba Guèye faire partie de ceux qui s’occupaient de lui », nous a confié El Hadji Yatma Guèye, membre de cette illustre famille.

Disparition de Cheikh  Marouba Guèye en 1940

Cheikh Marouba Guèye qui avait de bonnes relations avec toute la famille du Cheikh (il a fait porter les noms de filles et fils à Serigne Touba et à sa progéniture), avec les familles des différents « Cheikhs », ses frères en Islam, les autorités étatiques de son temps, s’éteignit en 1940. Il fut succédé à la tête de sa famille par son fils aîné Serigne Modou Guèye Khary(1940-1941); Serigne Touba Guèye (1941-1975); Serigne Mbaye Fsty Guèye (1975-2008); Serigne Massamba Guèye (2008-2015); Serigne Bassirou Guèye (2015-2018).

Depuis, c’est Serigne Mousta­pha Guèye qui a ouvert l’ère des petits-fils. Yala nafi yag lool té wër. Amine.

Rappelons que la famille de Keur Cheikh Marouba Guèye organise chaque année le Magal des deux « rakkats » en commémoration de la prière de 2 « rakkats » effectuée en juin 1903 à Tivaouane.

 

Source Vox populi

Mamadou Nancy Fall
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