La Caisse des Dépôts et Consignation allait tout droit vers sa fermeture, vers sa belle mort, a déclaré hier, Fadilou Keïta, le directeur général de ladite structure. Et ce, à cause de «choses extrêmement graves s’y sont passées». Ce qui est illustré par le fait qu’à son arrivée aux commandes, «il n’y avait pas plus de 300 millions de FCFA». Au moment où «la CDC gère plusieurs centaines de milliards».
A en croire Fadilou Keïta, au jour de sa passation de service, «les ressources qui étaient mobilisables en vue, dans les comptes de la CDC ne faisaient pas 300 millions, mais aujourd’hui, ça a été multiplié par 30 voire 40. Parce qu’on a trouvé une situation sur place avec de l’argent qui sortait à gauche à droite. On y a tout de suite mis à terme ce qui nous a permis de faire régénérer l’affaire».
Avant son arrivée, «les gens faisaient des prises de participation, achetaient des sociétés à gauche à droite (…) remettaient de l’argent ‘’gracieusement’’ aux gens.
Il en veut pour preuve, «quelqu’un a pris un milliard, l’autre 6 milliards, 7 milliards, un autre 10 milliards». De l’argent dont profitaient «des gens les mieux aguerris en finance publique : c’est les inspecteurs des Impôts et des Domaine, c’est des magistrats de la Cour des comptes, c’est des gens qui sont très bien formés et formés à bonne école. C’est à dire, aujourd’hui ce qui s’est passé, c’est du banditisme financier et l’IGE est en train de faire ses rapports», prévient le DG de la CDC qui signale que les choses vont sortir et les gens devront aussi prendre leurs responsabilités.
En attendant, il a promis que «ceux-là qui en interne ou en externe ont participé à ce carnage vont tous répondre». Pour tout récupérer, il signale avoir «dit à qui veut l’entendre même ces gens-là qui ont bénéficié de la CDC, je leur avais clairement dit qu’aucun centime de la CDC ne restera pas entre vos mains». Ce qui fait qu’aujourd’hui, «il y en a qui me propose directement pour venir rembourser les ressources qui sont prises à la CDC et ils sont mis en rapport avec les avocats de la CDC, les copies sont envoyées à l’IGE et à la Direction juridique de la CDC».
Le niveau de corruption est très élevée dans certaines stations a dit Fadilou Keïta, au Grand Jury. A preuve, il dit avoir «reçu des gens qui lui «ont remis de la documentation (lui) disant que (ses) prédécesseurs avaient 3,6 milliards FCFA sur ça. Si vous acceptez on vous donne les 3milliards, avant même de prendre fonction à la CDC». Alors, en réponse, il dit avoir «tourné le dos à plusieurs types de véhicules. Je n’en ai pas touché. Des gens m’ont proposé des 500 millions, 1 milliard. Je n’ai pas besoin de ça», a-t-il fait remarquer.
La bonne gouvernance point faible du régime sortant
A en croire le nouveau Dg de la CDC, «il y a des institutions pour lesquelles depuis 5 ans 7 ans 10 ans, aucun corps de contrôle ne les a contrôlés». Des affirmations qu’il a faites, avant de rappeler que le nouveau régime hérite «de 12 ans de gouvernance pour laquelle le tendon d’Achille était la bonne gouvernance, la transparence dans la gestion des choses publiques».
En parlant de transparence, M. Keïta renseigne que «tous ces rapports qui étaient sous le coude du président Macky Sall sont des rapports dont le président de la République peut tout de suite disposer parce qu’ils sont consignés au niveau de l’IGE qui travaille directement pour le président de la République». Il en est de même pour ceux au niveau de la Cour des comptes, du contrôle financier de l’IGF etc. Tous ces rapports sont disponibles». Mais signale-t-il, «c’est des dizaines, des centaines de rapports. Et les rapports du CENTIF dont personne n’entend parler, c’est des centaines de rapports, des rapports de l’OFNAC».
Samuel Sarr et Ahmed Khalifa Niasse cités dans un détournement de 3 milliards FCFA
En fait, poursuit-il, il y a assez d’éléments aujourd’hui pour pouvoir apprécier les uns et des autres. «Il m’est arrivé de faire un peu de revue. Il y a quelques jours, je suis tombé sur un rapport de 2013 ou 2014 qui avait été rendu public dans lequel il est clairement mentionné que Messieurs Ahmed Khalifa Niass et Samuel Sarr doivent 3,5 milliards à l’Etat du Sénégal qu’ils doivent rembourser. Et c’est consigner noir sur blanc dans le rapport, parce qu’il y a des voitures qui ont été offert à l’Etat du Sénégal. Ces personnes-là ont détourné et on dit que ces véhicules-là, ils les avaient achetés et les ont vendus à l’Etat du Sénégal. Donc, si on consigne dans ce rapport public qu’ils doivent 3,5 milliards, ces gens-là, jusqu’à cette date, doivent rembourser ces 3,5 milliards là. Et il y en a plusieurs comme ça. Et ça ces des rapports publics», a-t-il précisé.
L’affaire des 94 milliards supposés détournés par Mamour Diallo, abordée, Fadilou Keïta évoque «des choses beaucoup plus graves. Il y a des acquiescements qui ont été signés à gauche et à droite. Moi, je suis tombé sur une lettre de confort pour 15 milliards en location de véhicules». D’où sa question de savoir «qu’est-ce qui peut justifier une location véhicule à hauteur de 15 milliards ?».
A l’en croire, avant d’être nommé, plus exactement «avec les élections du 24 mars et l’installation effective du gouvernement, c’est-à-dire la prestation de serment du président de la République, certains ont fait un peu du n’importe quoi. Les gens se sont empressés de faire des ordonnancements et de tirer des milliards sur les comptes du Sénégal. Nous, étant informés de cela. Nous avions saisi le Premier ministre qui, tout de suite, a pris des mesures conservatoires qui a stoppé la saignée. Et c’est de cette même manière que ça se passe au niveau des ministères, ça se passait sur l’ensemble des administrations».
Banditisme financier : Macky Sall pointé du doigt
Pour Fadilou Keïta, le nouveau DG de la CDC, promet que «les choses basiques qui nous faisaient perdre des ressources, on va les maîtriser bientôt. Avec aujourd’hui les amnisties et tout ce qui est pertes fiscales dans sa globalité vont être maitrisées». Mieux, fait-il savoir même le président Macky Sall doit rendre compte.
«Je crois que la responsabilité du président Macky Sall dans cette affaire-là est clairement établie. Le président Macky Sall a dit ici devant tout le monde qu’il avait des rapports sous le coude. Pendant ce temps, tous ceux qui avaient dit 2ou 3 choses qui le gênaient avaient été radiés ou simplement mis en prison sur le prétexte de diffusion de fausses nouvelles».
A l’en croire, l’affaire Petrotim, a été remise sur la table. »Aujourd’hui, les gens ont beau citer de Monsieur Aliou Sall. Mais, Aliou Sall n’a pas signé les décrets. Celui qui nous lie, c’est Macky Sall qui avait nos décrets. C’est lui qui a signé nos décrets», dit-il.
De l’avis de M. Keïta, «en un moment donné les gens vont parler de Aliou Sall, c’est bien mais c’est le président Macky Sall qui était au niveau de la Petrosen qui connaît la cartographie de nos ressources naturelles qui avait la latitude de ne pas signer ces contrats-là qui les a signés, ça c’est une situation aggravante d’autant plus qu’il avait été averti par un rapport de l’IGE».
Pour avoir été aux responsabilités, Macky Sall doit faire face à toutes ses responsabilités. C’est des gens qui ont été là et non pas su maîtriser, en fait, toutes ces prérogatives qu’on leur avait données et aujourd’hui il est question de tirer les conséquences. Il faut en attirer les conséquences le président Macky Sall a fait doublement mal au Sénégal». La preuve, dit-il, «aujourd’hui, le président Macky Sall a fait trop de mal. Les gens ont été tués au Sénégal, mais derrière ce qu’il y avait c’est la prébende, la prédation foncière, le vol, le détournement».
Achat d’armes pour la présidence
Après avoir suscité un houleux débat, la question des armes dans laquelle avaient été citée le ministère de l’Environnement a été encore agité hier. Fadilou Keïta a pointé du doigt vers le président Sall qui, dit-on, «a reçu au palais de la République des cargaisons de munitions et d’armes. Les contrats sont là. Les voitures qui les ont transporté, les transitaires qui ont amené ce matos-là, les chauffeurs qui les ont convoyés… toutes ces informations-là sont disponibles», rassure le Dg de la CDC qui persiste et signe qu’«aujourd’hui la responsabilité du Président de la République est clairement engagée et personne ne peut venir démentir l’affaire parce que ce sont les éléments probants que les gens ont. Il devra en un moment donné, lui et ses acolytes, répondre de tout cela».
«Il y a des responsabilités qui sont clairement établies par des rapports des corps de contrôle»
Membre de PASTEF, donc du camp présidentiel, Fadilou Keïta signale que beaucoup de milliards dorment dans des comptes bancaires, au Sénégal. Pour preuve, dit-il, «les déclarations de soupçons sont par milliers au niveau de CENTIF». Et cela dit-il, «personne n’en a entendu parler alors que les rapports dorment par centaine par milliers là-bas au niveau du CENTIF. Les gens ont dans leurs comptes des dizaines voire des centaines de milliards ici au Sénégal. On devait peut-être essayer de voir tout ça, mais c’est le président Macky Sall qui a organisé tout ça», indique- t-il.
Le Pool financier judiciaire installé, des convocations lancées, il trouve qu’il n’existe pas de traque contre personne. «Je suis certain qu’aujourd’hui il n’y a pas de traque. Il n’y a pas de préjugés négatifs sur qui que soit. Ce qu’il y a c’est qu’il y a des responsabilités qui sont clairement établies par des rapports des corps de contrôle».
Vox populi