Augmentation du prix du loyer à Dakar : Quand les agences, les bailleurs et les courtiers se sucrent sur le dos des locataires

Parallèlement à la montée en flèche des prix des denrées de consommations, le coût du loyer à Dakar grimpe de façon exponentielle. Pour trouver un logement, il faut casser sa tirelire à cause du montant de la caution fixée par les bailleurs, les courtiers et les agences immobilières. Ces derniers qui exigent jusqu’à 4 mois de loyer à l’avance, opèrent au nez et à la barbe des autorités sénégalaises qui, pourtant disent avoir encadré le secteur. Alerte

Trouver un logement à Dakar relève du parcours du combattant. Dans les zones de Yoff, Ouest Foire, Nord Foire, HLM Grand Médine, notamment, pour acquérir un appartement constitué de 2 chambres et d’un salon, il va falloir débourser mensuellement entre 250 mille et 350 mille francs CFA et pour un studio, c’est entre 175 et 200 mille FCFA, compte non tenue de la caution et de l’avance du loyer variant entre 3 et 4 mois. Et ceci est devenu la règle au grand dam des locataires qui, déjà asphyxiés par la cherté de la vie, peinent à joindre les deux bouts.

Pour le dépôt de la caution, les bailleurs, avec la complicité des courtiers exigent des montants faramineux aux locataires qui acceptent sans coup férir en violation flagrante de la loi qui, pourtant, a déjà réglé ce problème. Le ministre du commerce et des PME convoque le décret n⁰77‑527 du 23/06/1977 relatif au montant du loyer à usage d’habitation qui stipule en son article 7, alinéa 3 que « le montant du cautionnement et des loyers à verser d’avance à titre de garantie ne peut excéder une somme correspondant à deux (2) mois de loyer »

À ce titre, le ministre rappelle que les bailleurs et commissionnaires de bailleurs sont tenus au respect strict des dispositions réglementaires susvisées sous peine de poursuites judiciaires. Et dans un communiqué rendu public le 07 décembre dernier, le ministre du commerce rappelait ce qu’encourent les bailleurs véreux. Malheureusement, malgré cette sortie, les choses n’ont pas évolué dans le bon sens. Au contraire, la situation s’est empirée avec des bailleurs et autres commissionnaires qui continuent de dicter leur loi dans le secteur de l’immobilier en fixant les prix à leur convenance.

« Même En Europe, Le Loyer N’est Pas Aussi Cher »

Mme Gazal fait partie des victimes des agences et autres courtiers. Pour elle, trouver un appartement à moindre coût est devenu impossible à Dakar : « vous ne pouvez même pas imaginer ce que nous sommes en train de vivre. Le loyer est devenu très cher surtout à la cité Mbackiyou Faye de Ouakam. Je me demande même si je suis au Sénégal ou dans un pays européen ou américain. Même là-bas le loyer n’est pas aussi cher. J’ai l’ambition de déménager parce que j’habite dans un studio et je veux quelque chose de plus grand, mais c’est impossible.

Pour 3 chambres et un salon on nous annonce un coût de 450 mille francs par mois ; pour 4 chambres et un salon, c’est 580 mille francs. Certes, l’immeuble est très joli, le propriétaire a mis un ascenseur, mais ce n’est pas une raison pour fixer le prix à 580 mille », attelle dénoncé. Cette dernière renseigne que la cherté du loyer qui n’est plus à la portée des sénégalais, fait que la quasi-totalité des locataires de la cité sont des ressortissants étrangers.

« Dans la cité, 75% des locataires sont des étrangers qui travaillent à la banque centrale ou dans d’autres institutions. Et, eux, ne paient pas le loyer qui est pris en charge par leurs structures », attelle expliqué.

Selon Mme Gazal, le montant est beaucoup plus élevé aux Mamelles, dans la zone du Monument de la Renaissance. « J’ai appelé une agence qui gère un immeuble récemment construit à côté du monument, et le gérant annonce un coût mensuel de 750 mille francs Cfa pour un appartement de 3 chambres et un salon. Et, pire encore, l’agence réclame 4 mois de loyer : deux mois de caution, un mois de loyer et un mois de frais d’agence », attelle indiqué avant de préciser que ce sont les bailleurs « qui fixent eux-mêmes leurs propres lois ».

« J’habite dans un studio où je paie 175 mille francs par mois et je n’ai même pas de cuisine. Une connaissance m’a dit que si l’on prend en compte la surface du studio je ne devais pas payer plus de 90 mille par mois », ajoute notre interlocutrice avant de lancer très dépitée : « voilà la situation et personne n’ose parler ».

Cette dernière indique qu’à la cité Keur Gorgui, il est impossible de trouver un logement. « Là-bas c’est encore pire, il y a même des studios qui se louent à 750 mille francs Cfa. Et c’est très difficile », a‑t‑elle expliqué. « A Ngor et aux Almadies c’est pareil. Je connais bien le secteur du loyer parce que depuis 2016, j’ai déménagé à 5 reprises ou presque », a‑t‑elle souligné.

« Un courtier n’a pas vocation à fixer un prix de loyer »

Courtier de son état, M. Diouf s’active dans la zone de Yoff et environs. Au nom de ses collègues, il rejette toute implication dans la hausse constatée du coût du loyer à Dakar.

« Un courtier n’a pas pour vocation d’augmenter les prix, au contraire. Parfois quand c’est une agence qui fixe les prix ce ils ne sont pas négociables. Tandis que le courtier peut discuter avec le client jusqu’à tomber d’accord sur un prix de la commission », a‑t‑il expliqué pour se défendre. Ce dernier qui semble trouver une explication à l’explosion des prix du loyer dit être convaincu que c’est à cause des ressortissants étrangers qui acceptent tout ce qu’on leur propose.

« C’est à cause des ressortissants étrangers que la location a augmenté parce que, pour les décourager, les bailleurs font monter les enchères, mais ils sont toujours preneurs. Et c’est cette situation qui a fait que les bailleurs ont pris goût à la chose et, comme s’ils se sont passé le mot, augmentent le prix », explique M. Diouf.

Concernant les 4 mois exigés à la conclusion du contrat de location, il renseigne que c’est l’œuvre des agences immobilières. « Pour éviter les retards dans le paiement, les agences immobilières ont pris la décision de demander 4 mois au moment de signer le contrat. Je trouve que c’est une ruse de leur part pour se prémunir quand le locataire commence à avoir des soucis pour payer le loyer », a‑t‑il fait savoir avant de dénoncer cette pratique : « ce n’est pas normal. Ce qui est normal, c’est un mois pour l’avance, un autre pour la caution et un troisième pour la commission ; mais 4 mois c’est trop », a‑t‑il dénoncé.

Le courtier rappelle qu’il lui arrive même de raisonner les bailleurs en leur expliquant la réalité du terrain. « Un bailleur m’avait proposé un appartement composé de 4 chambres, d’un salon et d’un garage qu’il voulait louer à 700 mille à Yoff ; mais je lui ai dit qu’ici les villas sont entre 500 et 600 mille et par conséquent, le prix qu’il propose pour un appartement n’est pas raisonnable. Finalement, il a compris avant de revoir à la baisse le prix initial. L’appartement a finalement été loué à 600 mille francs CFA », se rappelle M. Diouf.

Alerte

Momar Diack SECK
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