Ce n’était point son souhait au début de son magistère. « Nous allons gagner ensemble et gouverner ensemble », avait proclamé le Président Macky Sall, entouré à l’époque par quatre ténors de Benno Bokk Yaakaar. En l’occurrence, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, Amath Dansokho et Abdoulaye Bathily. Empruntant le jargon du basket ball, on aurait pu dire qu’il y avait à l’époque à la tête de sa coalition et du pays un « cinq majeur », voire un « dream team », dont il ne reste hélas plus rien ou presque. Idem pour les compagnons de la première heure dans l’APR dont la plupart ont aussi vidé son entourage. Résultat : le Président est seul, très seul, au moment d’entamer la période la plus critique de son magistère.
Si la période était plus faste pour le Président, on aurait pu reprendre presque à l’identique le titre de ce célèbre ouvrage inachevé de Jean-Jacques Rousseau : « Les Rêveries du promeneur solitaire ». Sauf qu’il ne s’agit point de rêveries pour le Président Macky Sall, mais plutôt de cauchemars ou du moins de tracas. Il s’y est empêtré et peine visiblement à s’en extirper.
Entre le choix de son Premier ministre, la composition de son Gouvernement, la configuration de la prochaine Assemblée, l’avenir en pointillés de Benno Bokk Yaakaar et l’hypothèque sur le 3ième mandat, le Président traverse des moments difficiles ou, pour le moins, très délicats. Il doit faire des choix cruciaux et sans se louper. Mais le plus dur est qu’il devra les faire en solitaire.
Tout le contraire de l’époque où il était très bien entouré et pouvait compter sur les conseils avisés du quatuor de ténors qui composaient, avec lui, le « cinq majeur » de Benno Bokk Yaakaar. Feus Amath Dansokho et Ousmane Tanor Dieng ne sont plus à ses côtés, Abdoulaye Bathily a pris ses distances depuis belle lurette alors que Moustapha Niasse, qui vient de faire ses adieux à l’Assemblée, est en passe de se retirer de la scène politique.
Qu’est-ce qu’il aurait aimé avoir dans son entourage ces hommes d’expérience dont la seule présence suffisait à donner fière allure à son dispositif ! Hélas, Macky Sall va devoir faire sans eux et, surtout, à une période où il aborde un virage qu’il ne doit absolument pas rater. « Le Président Wade réfléchit seul, décide seul et se trompe seul », avait dit une fois Moustapha Niasse à propos de son prédécesseur lorsqu’il avait fini de se séparer de ses principaux alliés.
En l’occurrence, lui qui fut Premier ministre, mais aussi Dansokho et Bathily, faisant ainsi autour de l’entourage qui l’avait aidé à accéder au pouvoir. Certes, à la différence de Wade, Macky Sall n’a jamais pris l’initiative de la rupture avec ses principaux alliés (Dansokho et Tanor sont décédés alors qu’ils étaient en alliance avec lui et il est encore théoriquement en parfaite intelligence avec Niasse). Mais le résultat est pourtant le même.
Par un concours de circonstances, le Benno s’est vidé de ses principaux ténors comme le FAL à l’époque de Wade. Et, circonstances aggravantes, beaucoup parmi les compagnons de la première heure au sein de l’Apr ne sont plus à ses côtés. Bref, les rangs se sont dégarnis et surtout en éminences grises à un moment où le Président en a le plus grand besoin.
Certes, théoriquement, Benno tient toujours et a même le mérite d’avoir battu tous les records de longévité en tant que coalition au pouvoir. Mais, c’est plutôt dans l’entourage immédiat du Président que le bât blesse. Ceux qui s’étaient longtemps illustrés comme ses plus fervents défenseurs ne sont plus prompts à monter au front. De même, la communication au sein de Benno fait défaut au point que Farba Ngom a cru devoir appeler ses principaux responsables à monter au créneau.
Jamais, le Président Macky Sall ne s’était senti aussi seul pour prendre lui-même sa propre et, surtout, pour faire des choix aussi difficiles que ceux qui se présentent devant lui. Résultat : les solutions semblent si difficiles à trouver à un moment où tout le pays est suspendu à ses lèvres.
Le Vrai Journal
