Arts-Culture : à Dakar, une formation pour que les femmes se fassent une place dans le milieu du graffiti

Un collectif de street-artistes a proposé une formation 100% féminine début mars. Dans ce milieu encore très masculin, les femmes commencent à se faire une place. Pendant une semaine, les volontaires ont été formées aux techniques de dessin, mais aussi à l’entrepreneuriat pour tirer des revenus du graffiti.

Devant un grand mur blanc, recouvert de brouillons de graffitis colorés, une vingtaine de femmes tracent des grandes lettres, pinceaux et bombes à la main.

Yanka est rappeuse et danseuse dans la vie. C’est la première fois qu’elle peint sur un mur et l’expérience est un peu intimidante. « Quand je dessinais au crayon, je faisais des ronds pour donner un peu de perspective, mais là, c’est un peu différent. Ce n’est pas la même chose, on va pratiquer », dit-elle, pleine de volonté.

C’est la septième fois que la formation Passer’elle est organisée par le collectif de graffeurs et graffeuses Doxandem Squad. Parmi les participantes, Kiné Diop, 30 ans. Elle travaille comme agent de développement, et fait de la teinture en parallèle. Elle a sauté sur l’occasion. « J’aime dessiner, j’aime créer, j’aime bricoler… Je suis dégourdie ! (rires) C’est une opportunité pour moi de toujours parfaire mon expérience sur l’art. Pourquoi ne pas faire du graffiti sur des boubous, du tissu », lance-t-elle.

Faire changer les mentalités

Au programme, cours de lettrages, de dessin de visages… Mais c’est surtout pour les cours d’entrepreneuriat culturel que Yanka a choisi de suivre cette formation gratuite. « On a vu comment monter un projet, comment le structurer, comment faire un plan de financement, à qui faire appel pour les subventions, à quel organisme on peut faire appel au Sénégal pour avoir des aides ». Yanka accorde aussi de l’importance au développement personnel, « parce que pour aller toquer aux portes pour revendre son projet, il faut avoir confiance, être convaincue et être convaincante. »

Le collectif n’a reçu qu’une trentaine de candidatures. Il existe encore quelques barrières dans les mentalités. « Ma famille n’était pas d’accord pour que j’intègre ce milieu », explique Neye Mareme Fall. À 20 ans, elle en est à sa deuxième formation de graffiti. « Ils croyaient que c’était un milieu désastreux, ils croyaient que les graffeurs fumaient de la drogue », ajoute t’elle.

« Ce sont les clients qui viennent vers moi »

Pourtant, on peut faire carrière dans le graffiti. C’est le cas d’Aïda, nom d’artiste Dasha, qui est venue encadrer les étudiantes. Diplômée des beaux-arts, elle est l’une des premières graffeuses du pays. « De mon côté, je n’ai jamais démarché de clients. Ce sont les clients qui viennent vers moi. » raconte Dasha. « J’ai travaillé avec l’ONU tout récemment. J’ai aussi des marchés qui sont privés. C’est quelque chose qui paie, parce que c’est connu actuellement. Surtout au Sénégal », souligne-t-elle.

Le projet de fin de formation des apprenties graffeuses : une grande fresque qui représente une reine traditionnelle, une lingère, à côté d’une ingénieure d’aujourd’hui. Pour montrer que tout est possible pour les femmes.

RFI

Oumou Khaïry NDIAYE
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