19 mars 2000 pour Wade , 25 mars 2012 pour Macky : Alternances et goût d’inachevé

19 mars 2000 et 25 mars 2012. Les alternances ne suivent et se ressemblent à bien des égards. Abdoulaye Wade a fait 12 ans avant que les électeurs n’aient limité son mandat à deux par les urnes. Macky Sall en aura fait autant en 2024. Et une éventuelle tentative d’une 3ème candidature pourrait subir le même sort. La prochaine sera-t-elle encore en mars. Si c’est en février, ce sera au premier tour.

19 mars de Abdoulaye Wade

Mars est l’un des mois de la démocratie sénégalaise. 19 mars 2000 est encore dans les mémoires. Un dimanche. Mais cette année, ça tombe sur un samedi. Comme ce samedi du 18 mars, veille du scrutin qui devrait sceller définitivement le sort du régime socialiste, disons celui d’Abdou Diouf, après 20 ans de règne. Une «jeunesse malsaine», qui affûtait… son arme, la carte d’électeur, pour en finir.

Parce qu’en envoyant le Président sortant au second tour, rien ne pouvait plus arrêter cet espoir de changement. Avec 41% au premier tour, Abdou Diouf n’avait plus d’autre choix que d’espérer des retrouvailles avec ceux qui avaient sauté du navire socialiste : Djibo Ka et Moustapha Niasse.

Le leader de l’union pour le renouveau démocratique (Urd) joue la carte imprudente, même s’il se considérait comme la clé du changement. Qui n’a rien à avoir avec le «Sopi» que réclamaient les jeunes. La jeune génération. Niasse, lui, reste constant dans son Appel du 16 juin et participe à l’alternance avec 17%. Diouf stagne à 41, 33%. Wade est élu président de la République avec 58, 49%. Le Sénégal respire, souffle.

Démocratiquement. Le coup de fil de félicitation d’Abdou Diouf à Abdou ­laye Wade. Point besoin de rembobiner cette histoire… historique. Wade déroule son premier mandat avec une grâce plus ou moins longue. En dépit d’énormes scandales et écarts.

Les chantiers de Thiès qui ont conduit Idrissa Seck en prison ont failli limiter son mandat à un. Il s’en dort avec 56% en 2007. Réélection contestée par une opposition groggy qui ne la reconnaît pas et boycotte les Législatives de juin de la même année. Et commence le goût d’un 3ème mandat. Ou la route vers le sommet pour le fils, disait-on.

Mais que d’embuches : Défaite aux Locales 2009 dans plusieurs grandes villes, 23 juin, des morts… ça n’a pas été de tout repos pour le vieux qui tente d’imposer sa candidature. Le premier goût est toujours différent des autres qui suivent.

25 mars de Macky Sall

C’est ainsi que le 19 mars est consacré plus que l’alternance du 25 mars 2012. Même si la génération qui n’a connu que Wade peut sentir une autre saveur. On ferme la parenthèse Wade. On recommence. Celle de Macky Sall s’ouvre avec beaucoup d’espoir. Comme en 2000, la gauche qui avait, en partie, porté Wade au pinacle, tient l’échelle pour Sall qui monte au sommet.

En attendant un second tour qui «achève» son adversaire qui n’a pu se relever de ses 34%. 13 candidats, dans une détermination du «tout sauf lui» et «tous contre un», bousculent un pan déjà à terre… Personne, ou en tout cas, peu de gens l’avaient vu venir. Même s’il est vrai que Macky Sall a été favorisé par l’éclatement d’un Benno siggil Sénégal, issue des Assises nationales, incapable de trouver ce candidat unique et consensuel entre Niasse et Tanor.

Les leaders de l’Afp et du Ps, mais aussi de Rewmi, ont alors accompagné Macky Sall dans la coalition Benno bokk yaakaar. Le Président Sall n’a pu, à son tour, résister à la réalité et la pratique politiques. A l’épreuve, il y a quelques points d’héritage têtus.

La traque des biens mal acquis, comme celle de 2000 avec Wade, est lancée. Des dignitaires du régime défait sont poursuivis. Des opposants emprisonnés et même exclus d’élections. Des élections contestées comme celle de la Présidentielle de 2019 avec les 4 qui ne reconnaissent pas la réélection de Macky Sall à plus de 58%. Une intention prêtée de tenter un 3ème mandat, comme son prédécesseur…

Mais, tout compte fait, la démocratie électorale fonctionne. Bien sûr avec ses démons de la violence, de la trahison, de la répression, de la contestation… qui l’accompagnent. Mais l’alternance reste, «l’aboutissement d’un processus démocratisation», pour reprendre le juriste Alioune Badara Fall dans son article «La démocratie sénégalaise à l’épreuve de l’alternance», paru dans la revue Afrilex. Le Sénégal va vers d’autres échéances électorales et qui pourraient encore aboutir à une troisième alternance en 2024 ou après.

Besbi

Saphiétou Mbengue
Up Next

Related Posts