Transparency International : La démocratie d’abord, le Big Tech profitera plus tard

L’utilisation des publicités politiques en ligne se développe rapidement dans le monde entier. Ce sera bientôt la plus grosse dépense médiatique pour les campagnes politiques au Royaume-Uni et aux États-Unis. On estime que plus de 3 milliards de dollars américains ont été dépensés en publicités en ligne lors des seules élections américaines de 2020. Non pas qu’il faille le répéter – mais c’est énorme.

La publicité en ligne a été révolutionnaire pour la politique, permettant aux acteurs politiques de se connecter aux électeurs, rendant la participation civique plus efficace et aidant les politiciens moins conventionnels avec moins de ressources. Mais cela met également en péril la transparence et la responsabilité dans le financement des campagnes politiques. Facebook a interdit la publicité politique à l’approche des élections américaines de 2020 – une décision qu’il a inversée plus tôt ce mois-ci.

Notre dernier rapport met en évidence les problèmes déclenchés lorsque les réglementations sont loin derrière la vitesse à laquelle les publicités en ligne transforment la politique

Six pays sur 10 dans le monde n’ont aucune restriction sur la publicité politique en ligne. Dans de trop nombreux pays, les grandes entreprises technologiques comme Google et Facebook autorisent un degré élevé d’opacité dans les publicités politiques en ligne, ce qui signifie que nous ne savons souvent pas qui place une annonce, qui la paie ou à qui elle est montrée.

Entre autres menaces, cela ouvre la porte à une ingérence étrangère dans les élections.

Plus tôt ce mois-ci, la Chambre des représentants des États-Unis a adopté le «For the People Act», qui rend les plateformes technologiques chargées d’empêcher les ressortissants étrangers d’influencer les élections américaines par le biais de publicités en ligne. Le Sénat devrait l’approuver rapidement.

L’UE devrait également adopter un cadre contraignant pour accroître la transparence et la responsabilité de la publicité politique en ligne.

À Bruxelles, cependant, les grandes entreprises technologiques dépensent des millions en lobbyistes pour influencer la réglementation qui aurait un impact sur leurs responsabilités en matière de publicité. Google, Facebook, Amazon, Apple et Microsoft ont déclaré un total de 19 millions d’euros de dépenses de lobbying au cours du premier semestre 2020: égal à ce qu’ils avaient déclaré pour l’ensemble de 2019 et contre 6,8 millions d’euros en 2014. Combiné à des règles de transparence inégales dans le lobby, cela jette une ombre sur deux textes législatifs susceptibles de changer la donne: la loi sur les services numériques et un projet de loi sur mesure sur la transparence du contenu politique sponsorisé.

De la désinformation aux risques de cybersécurité et au micro-ciblage, les démocraties du monde entier ressentent déjà les effets du contenu politique sur les plateformes numériques qui ont mal tourné. Nous ne pouvons pas laisser Big Tech fixer les termes de nos processus politiques et mettre en danger nos démocraties.

C’est pourquoi la préservation de l’intégrité politique est l’un des sept piliers de la stratégie de Transparency International pour la prochaine décennie. Nous défendrons des normes et des pratiques en matière de lobbying et de campagne politique, de communication et de publicité – en particulier en ligne – pour éliminer toute influence indue de la politique. L’intérêt privé étroit ne doit pas l’emporter sur l’intégrité lorsqu’il s’agit de questions d’importance commune.

Transparency International

Mamadou Nancy Fall
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