Sortie menaçante du président contre le maire de Dakar : Pourquoi Macky Sall ne peut pas révoquer Barthélemy Dias

La récente sortie du Président Macky Sall contre le maire de Dakar suite à des recrutements jugés illégaux a poussé plus d’un à croire qu’il pourrait être tenté de le révoquer. Mais, Barthélemy Dias peut-il connaître le même sort que Khalifa Sall ? La réponse est sans équivoque pour les experts en vertu de l’article 140 du Code des collectivités territoriales. Le Vrai Journal

Le Président Macky Sall, prétextant des recrutements jugés illégaux, peut-il rééditer avec Barthélemy Dias ce qu’il a fait à Khalifa Sall ? Autrement dit, signer purement et simplement l’acte de révocation du maire de la ville de Dakar. A ce propos, la réponse est on ne peut plus claire. C’est non ! Certes, l’article 135 du Code des collectivités territoriales dispose que «lorsque le maire ou tout autre conseiller municipal est condamné pour crime, sa révocation est de droit» (…).

Toutefois, l’article 140 du même Code est plus explicite et énumère les différents cas de figure où le chef de l’Etat peut révoquer un maire sans crier gare.

«Sans que la liste soit limitative, les fautes énumérées ci-dessous peuvent entraîner l’application des dispositions de l’article 135 du présent code : fait prévu et puni par la loi instituant la Cour des comptes ; utilisation des deniers publics de la commune à des fins personnelles ou privées ; prêts d’argent effectués sur les recettes de la commune ; faux en écriture publique authentique visés au Code pénal ; faux commis dans certains documents administratifs, dans les feuilles de route et certificats visés au Code pénal ; concussion ; spéculation sur l’affectation des terrains publics, les permis de construire ou de lotir ; refus de signer ou de transmettre au représentant de l’Etat une délibération du conseil municipal. Dans les sept premiers cas, la sanction administrative ne fait pas obstacle aux poursuites judiciaires», souligne avec précision l’article 140 du Code des collectivités territoriales.

En décentralisation : «il ne peut être révoqué…»

En termes clairs, un recrutement bien que jugé illégal, ne fait nullement partie de la palette des actes susceptibles d’entraîner la révocation d’un maire. Ce que confirme Amadou Sène Niang, expert en décentralisation qui fait savoir qu’«un recrutement illégal ne saurait être un motif de révocation d’un maire.» Interpellé sur le sujet par ‘’Le Vrai Journal’’, l’expert en décentralisation se veut formel. «Cela ne peut entrainer la révocation du maire de Dakar.»

Toutefois, il juge illégaux les recrutements opérés par Barthélemy Dias. «Je dis encore une fois que ces recrutements sont illégaux. Maintenant, il faut savoir que «dans le décret fixant le nouvel organigramme type des collectivités territoriales, le cabinet du maire a, entre autres, le directeur de cabinet, l’inspecteur des services municipaux, le chargé de la communication et des relations publiques et en dernier lieu, l’assistant ou assistante du maire. Il n’y a que ces quatre postes au niveau du cabinet du maire.»

A l’en croire, il faut étendre le pouvoir décisionnel du maire en élargissant son champ d’action, non sans faire remarquer qu’il appartient à l’autorité administrative de rappeler tout le monde à l’ordre en signifiant tout simplement que de tels recrutements sont illégaux du point de vue de la loi.

Donnant d’autres exemples, Amadou Sène Niang de défendre que l’«on parle de division de la santé alors que la ville de Dakar a déjà une direction de l’action sociale et de la santé. C’est le cas de Rufisque qui a déjà une direction de la culture au moment où on parle dans le nouvel organigramme type de division de la culture.»

De leur côté, Abass Fall, premier adjoint au maire de Dakar et le professeur Ngouda Mboup, enseignant-chercheur en droit public chargent le Président Macky Sall. «Macky Sall, après avoir essayé d’effacer Dakar des collectivités territoriales, après avoir tenté en vain de nommer un maire pour Dakar, après avoir été battu à Dakar et toujours rongé par cette défaite cuisante qui frôle l’humiliation, tente désespérément de menacer et de façon non courageuse le maire Barthélémy Dias de révocation. Les Dakarois attendent avec impatience qu’il passe à l’acte», a dit Abass Fall.

Pour sa part, le constitutionnaliste Ngouda Mboup croit savoir que «le président Macky Sall n’a pas à gérer le fonctionnement interne des collectivités territoriales. Le principe de libre administration des collectivités territoriales est un principe à valeur constitutionnelle (article 102 de la Constitution). Il doit s’occuper d’autres choses et laisser les maires travailler tranquillement.»

Non sans rappeler que «les maires sont élus au suffrage universel et jouissent d’une légitimité populaire surtout que tout contentieux doit être réglé par les juridictions.»

Mamadou Nancy Fall
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