Samira Daoud, Amnesty international : «Dans tout le Sénégal, les droits à la liberté de réunion pacifique et d’expression sont menacés »

Selon Amnesty, «les autorités sénégalaises intensifient la répression à l’approche de l’élection présidentielle de 2024 en s’attaquant aux droits humains, en restreignant l’espace civique, en interdisant les manifestations et en plaçant en détention un journaliste et des personnalités de l’opposition ».

«A l’approche de l’élection présidentielle de 2024, les autorités sénégalaises affaiblissent la protection des droits humains dans le pays, notamment en restreignant les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique et la liberté de la presse, en interdisant les manifestations organisées par les partis d’opposition et en ne respectant pas les droits à la justice, à la transparence et à la vérité des victimes de l’usage de la force », a fustigé Samira Daoud, directrice régionale d’Amnesty international pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.

«Au lieu de réprimer les libertés, les autorités devraient respecter les droits humains, cesser de faire un usage excessif de la force lors des manifestations, autoriser les médias à couvrir les manifestations, cesser de détenir arbitrairement des journalistes et des membres de l’opposition, et respecter les droits à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique. Cette tendance à la répression doit cesser maintenant afin de désamorcer les tensions », a‐t‐elle ajouté.

«Le 16 mars, Ousmane Sonko, chef du parti d’opposition Pastef, a comparu devant un tribunal de Dakar pour diffamation après que Mame Mbaye Niang, ministre sénégalais du Tourisme, a porté plainte contre lui. Alors qu’il se rendait au tribunal, la police a tiré des gaz lacrymogènes et Ousmane Sonko a été extrait de force de son véhicule et conduit par la police au Palais de justice, après une altercation au sujet de son itinéraire. Alors que le procès s’ouvrait, des affrontements ont éclaté à Dakar entre les forces de police et des manifestants exprimant leur soutien à Ousmane Sonko. Quelques heures plus tard, le tribunal a ajourné le procès au 30 mars.

Depuis le 15 mars, Ousmane Sonko a été empêché de quitter son domicile par un important déploiement policier, qui a également empêché des personnalités de l’opposition de lui rendre visite. Guy Marius Sagna, un député de l’opposition, a été touché par des gaz lacrymogènes tirés par la police, le 15 mars, alors qu’il tentait de rendre visite à Ousmane Sonko à son domicile », rappelle l’organisation avant d’ajouter :

«Suite à l’ajournement du procès, l’opposition a été empêchée d’organiser une conférence de presse par la police, qui a restreint l’accès au siège du Parti républicain du progrès (Prp), où elle était prévue. En fin de journée, au moins une personne est décédée, percutée par un véhicule conduit par des voyous armés, dans le quartier des Parcelles Assainies. Ousmane Sonko a été hospitalisé dans une clinique privée pendant la nuit, après avoir souffert de vertiges, de maux de tête et de douleurs au bas‐ventre en fin de journée. S’il est condamné, Ousmane Sonko pourrait ne pas être éligible aux élections de 2024 ».

D’après Amnesty, «au cours des derniers mois, les voix dissidentes de la classe politique et des médias ont été réprimées. Le 9 mars, l’ancien Premier ministre Hadjibou Soumaré a été placé en détention pour «diffamation » après avoir demandé au Président Macky Sall, dans une lettre publique, s’il avait fait un don de 12 millions d’euros à une femme politique française anonyme connue pour sa «haine et son rejet des autres » ‐ une allusion à la visite de Marine Le Pen au Sénégal en janvier 2023. Deux jours avant sa détention, le gouvernement a démenti ces allégations, les qualifiant de «lâches et infondées ». Le Premier ministre Had­jibou Soumaré a été libéré le 13 mars et placé sous contrôle judiciaire ».

Amnesty a aussi cité l’arrestation de Mohamed Samba Djim dit Hannibal, de Fadilou Keita et du journaliste Pape Ndiaye ainsi que les événements de Mbacké après le meeting interdit de Pastef.

«Dans tout le Sénégal, les droits à la liberté de réunion pacifique et d’expression sont menacés. Il est essentiel que les personnes soupçonnées d’avoir fait un usage illégal de la force lors des répressions de manifestations passées soient traduites en justice, et que les droits humains soient effectivement respectés, protégés et promus à l’approche de l’élection présidentielle de 2024 » , a conclu Samira Daoud.

Libération

Dieyna SENE
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