Saisine sur la proposition de loi criminalisant l’homosexualité : un colis « piégé » aux 7 sages ?

Le Président Macky Sall a beau donner des garanties aux initiateurs de la proposition de loi portant criminalisation de l’homosexualité, rien n’y fait. Au contraire, le débat sur l’homosexualité pourrait même se relancer avec la requête déposée par les députés Mamadou Lamine Diallo et Cheikh Bamba Dièye auprès du Conseil Constitutionnel pour contrôler la régularité de la procédure de leur proposition de loi. Faut-il y voir un colis « piégé » adressé aux 7 Sages à quelques semaines des législatives ? Le Vrai Journal

C’est en tout cas ce que pensent des sources proches de la juridiction qui redoutent une instrumentalisation de cette question très sensible pour servir de thème de campagne.

Je garde la même posture depuis toujours. Jamais je ne changerai la loi en vigueur, malgré les pressions. Que les gens arrêtent donc d’inventer des choses qui n’existent pas car cela ne saurait leur faire accéder au pouvoir ». C’est le Président Macky Sall qui s’exprime ainsi dans une vidéo postée récemment par Seneweb. Mieux, rappelant son soutien à la position de l’international sénégalais Idrissa Gana Guéye qui avait refusé de jouer avec un maillot du Paris Saint Germain au flocage arc-en-ciel et le vote du Sénégal contre une résolution de l’ONU sur les stratégies mondiales du secteur de la santé, le 28 mai dernier à Genèse, le chef de l’Etat martèle, dans cette vidéo, que « ni le pouvoir, ni l’argent ne (lui) feront changer la loi ». « Alors, que ce débat soit clos », tranche-t-il via la vidéo.

C’est à croire qu’il réagissait, sans la mentionner, à la nouvelle offensive lancée par les députés de l’opposition, initiateurs de la fameuse proposition de loi relative à la criminalisation de l’homosexualité. En effet, le 27 mai dernier, les députés Mamadou Lamine Diallo et Cheikh Bamba Dièye ont déposé auprès de Maître Ousmane Ba, greffier en chef du Conseil constitutionnel, « une requête aux fins de contrôle de la régularité de la procédure de proposition de loi modifiant l’alinéa 3 de l’article 319 de la loi 65-60 du 21 juillet 1965 portant code pénal modifié, criminalisant les actes contre-nature suivants : homosexualité, lesbianisme, bisexualité, transsexualité, nécrophilie et zoophilie ».

En clair, par cette requête enregistrée sous le numéro 4/C22, ces deux députés et les dix autres qui ont initié cette proposition de loi reviennent à la charge après que la commission de loi de l’Assemblée a purement et simplement refusé de l’examiner. Aussi, ont-ils joint à leur saisine du Conseil Constitutionnel, la lettre du 25 décembre 2021 portant dépôt d’une proposition de loi modifiant l’alinéa 3 de l’article 319 du code pénal, l’exposé des motifs de la proposition de loi, la proposition de loi, le communiqué du bureau de l’Assemblée nationale, la lettre numéro 1370 de Moustapha Niasse adressée à Mamadou Lamine Diallo. Bref, ils ont rassemblé toutes les preuves du refus du bureau de l’Assemblée d’examiner la proposition de loi pour filer la patate chaude aux 7 Sages.

Or, de sources proches du Conseil constitutionnel, « ni la démarche de saisine, ni le moment choisi pour introduire la requête ne sont pas fortuits ». « A quelques encablures des législatives du 31 juillet, insistent nos sources, la décision que devra rendre le conseil constitutionnel sur cette question éminemment sensible impactera forcément la campagne électorale. Et, naturellement, ça pourrait faire l’affaire de ceux qui ont souvent la propension d’en faire un thème de campagne contre le Président et sa majorité ». D’où l’embarras de Pape Oumar Sakho et ses six collègues du Conseil constitutionnel.

En effet, on imagine mal qu’ils aillent à contre-courant de la position affichée par Moustapha Niasse et le bureau de l’Assemblée. Or, s’ils se déclarent « incompétents » comme ils en ont souvent l’habitude, ils pourraient conforter la suspicion de connivence avec le Président et sa majorité et mettre ainsi de l’eau au moulin de ceux qui leur reproche de ne rien faire pour corser la législation en matière d’homosexualité. De quoi pourrir la campagne de Benno et nourrir l’argumentaire de leurs adversaires. Décidément, cette saisine, à ce moment précis, a tout d’un colis « piégé » adressé aux 7 Sages.

Le Vrai Journal

Pape Ismaïla CAMARA
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