Le Président de la République Monsieur Macky Sall, en compagnie de deux maires et alliés politiques, a effectué, ce jeudi 23 juin 2022, une visite de prospection des chantiers des travaux du projet d’aménagement et d’embellissement de la corniche ouest.
Nous tenons à informer l’opinion sur des cas de manquement grave au respect de la législation en matière de décentralisation. En dépit des dispositions légales et règlementaires de la décentralisation, le gouvernement du Sénégal a entrepris les travaux d’aménagement et d’embellissement de la corniche ouest sans l’implication de la ville de Dakar et des collectivités territoriales adjacentes. Grande a été notre surprise d’entendre le président Macky Sall, lors de cette cérémonie, demander, tardivement, à son ministre de l’urbanisme, du logement et de l’hygiène publique de travailler étroitement avec le maire de la ville de Dakar « pour une plus grande cohérence et une plus grande complémentarité » (sic).
Cette déclaration sonne comme un aveu de l’illégalité de la procédure tant il est évident, au regard des dispositions du Code général des Collectivités territoriales, que l’aménagement de la Corniche ne pouvait se faire sans l’implication en amont de la ville. En demandant à ses ministres d’associer après coup la ville de Dakar, le PR tente maladroitement de réparer une illégalité manifeste. De qui se moque-t-on ?
Dans le cadre de la territorialisation des politiques publiques de développement, les exécutifs locaux ont été investis de pouvoirs importants en matière d’aménagement du territoire et de gestion du cadre de vie et du domaine maritime.
L’article 297 du code général des collectivités territoriales est on ne peut plus évocateur. Il stipule in extenso que « pour les projets ou opérations initiés par l’Etat sur le domaine public maritime et sur le domaine fluvial, soit dans le cadre de l’exercice de la souveraineté, soit dans l’optique de la promotion du développement économique et social, l’Etat prend la décision après avis des conseils départemental et municipal sauf impératif de défense nationale ou d’ordre public. L’Etat communique la décision pour information aux conseils départemental et municipal. ».
En outre, il apparaît clairement que les compétences transférées dans ce domaine ont théoriquement renforcé l’interdépendance entre les politiques de l’État central et celles des collectivités territoriales.
Ainsi, la loi contraint l’administration centrale à associer plus étroitement toutes les parties prenantes, principalement la ville de Dakar et les autres communes du département, dans les étapes de conception, de mise en œuvre et du suivi-évaluation de tout projet touchant le domaine maritime du périmètre départemental de Dakar. La démarche non-inclusive du ministre de l’urbanisme, du logement et de l’hygiène publique constitue une entrave grave aux principes de la territorialisation des politiques publiques inhérents à l’importance accrue donnée aux élus locaux dans le système de décision.
En réalité, la tentative d’isolement de la ville de Dakar, par l’Etat central, dans ce projet d’aménagement de la corniche ouest est injuste et injustifiée. De Mamadou Diop à Khalifa Sall, la ville de Dakar s’est toujours investie à rendre cette façade maritime attrayante. Pour rappel, les activités sportives et de loisirs sur la corniche ouest ont pris une dimension importante grâce à l’aménagement du parcours sportif par la ville de Dakar.
Cependant, l’Etat central, par le biais de son ministre de l’urbanisme, du logement et de l’hygiène publique, excelle de plus en plus dans la confiscation des compétences transférées sur la gestion du littoral. A ce titre, les interrogations incessantes des acteurs, surtout des élus locaux, sur la révision et la publication du nouveau code l’urbanisme et du plan de masse demeurent sans réponses.
A l’heure actuelle, le ministre précité semble moins préoccupé par les difficultés de la population de la banlieue et des autres régions du Sénégal en proie à la résurgence des inondations et à la dégradation de leur cadre de vie. Un ministère a toujours une envergure nationale. Par conséquent, son intervention doit être englobante et moins orientée vers des manœuvres politiques et concurrentielles.
Pape Konaré Diaïté