Litige foncier à Mbeye Bambilor : «Après investigations, on a découvert des choses très graves dans cette affaire que nous allons révéler…», prévient le Collectif

Les scandales fonciers se suivent mais ne se ressemblent pas. Malgré la décision de l’Etat du Sénégal de suspendre tous les attributions et travaux dans certaines zones du pays, le litige foncier opposant le village de Mbaye et Serigne Souhaibou Seck est toujours d’actualité. Et d’après les derniers éléments révélés par les habitants de cette bourgade jadis très paisible où l’activité principale est le maraîchage et l’élevage, ce scandale foncier risque de prendre une autre tournure.

«Le titre Bertin est le Ndingler de la région de Dakar. Depuis des années ce problème perdure. Il s’agit de 22 ha et d’autres ha alloués à un particulier. Ce qui est grave dans cette affaire, c’est qu’il y a toujours des surprises. On a fait des investigations et on a découvert des choses très graves dans cette affaire que nous allons révéler le moment venu», a annoncé le porte-parole du jour, Abdoulaye Ndiaye, du collectif.

A l’en croire, c’est un titre foncier de l’Etat que l’ancien président de la République Me Abdoulaye Wade avait racheté aux héritiers de Ber­tin pour le redonner aux villageois. «La question qu’on se pose c’est comment ce titre est arrivé entre les mains du sieur Seck.

Il dit qu’il le détient depuis 2016 alors que ce titre est vieux de 100 ans. Et il dit détenir un Titre foncier. Ce qui est aberrant. Maintenant, avec cette décision des nouvelles autorités, on verra plus clair dans cette affaire qui a fait trop de mal au village de Mbèye. Des vies ont été détruites, des espoirs anéantis. Plusieurs maisons ont été détruites et des champs qui permettaient à des familles de vivre dignement rasés», a-t-il déploré, lors d’un rassemblement organisé ce week-end.

En effet, niché au cœur de la manne foncière de la commune de Bam­bilor, le village de Mbèye attise la convoitise des promoteurs immobiliers. Un problème foncier qui s’ajoute à cette liste déjà longue où le litige foncier centenaire, le domaine du Général Bertin, figure en première ligne avec plus de 200 ha en jeu. Le mis en cause, Sergine Souhaibou Seck déclare à qui veut l’entendre avoir «acquis légalement ces terres depuis 2016».

Lors des manifestations des jeunes de Mbeye qui avaient occasionné des arrestations massives dont l’adjoint au maire de Bambilor, le chef de village et le maire de la Commune Ndiagne Diop, le promoteur immobilier avait révélé qu’il était le détenteur du TFN1975 de Rufisque, appartenant à l’Etat du Sénégal. Le sieur Serigne S. Seck est bien, par droit de bail, propriétaire d’un terrain d’une superficie de 22 hectares 03 ares 83 centiares, situé à Bambilor. Ce dernier annonce même s’être acquitté des impenses pour un montant avoisinant les 200 millions.

Pour rappel le contentieux sur le domaine débute en 1994 lorsque l’héritier du général vient prendre possession de ses terres. Les occupants installés depuis deux décennies ou plus s’opposent aux bulldozers envoyés pour les déguerpir.

Face à l’impossibilité d’expulser les centaines de familles habitant et cultivant le site, le président Abdoulaye Wade décide d’exproprier les héritiers Bertin pour cause d’utilité publique à un coût pour l’Etat de 7 milliards de FCFA, ce qui sera fait tout début 2011. Mais contrairement aux promesses, le passage du terrain dans le domaine privé de l’Etat n’a pas signifié sa rétrocession intégrale aux acteurs locaux. Seules les terres occupées par les habitations et leur immédiat environnant ont été laissées aux habitants et aux propriétaires de vergers.

Une partie importante des terrains agricoles, y compris des vergers et des poulaillers, a été cédée par l’Etat, par dizaines d’hectares, à des entrepreneurs et hommes politiques proches du pouvoir, qui les ont ensuite revendus à des sociétés publiques (Caisse des Dépôts et Consignation) et à des coopératives d’habitat comme la Coopérative militaire de construction (Comico).

Loin de permettre de rétrocéder les terres aux habitants et exploitants, comme ceux-ci l’avaient espéré, le passage des 2500 ha du domaine des particuliers vers le domaine privé de l’Etat, via l’expropriation, a en fait permis une allocation d’une partie importante des terres (au moins 18 %) au profit de projets de lotissement.

Seuls 7 % ont fait l’objet d’un titre foncier en faveur des villages. Mais l’opération a aussi permis l’enrichissement d’intermédiaires ayant bénéficié de la vente, par l’Etat, à un tarif certes légal, mais largement en dessous du prix du marché, au détriment des détenteurs coutumiers et des personnes ayant acheté des terres localement et créé des vergers, mais aussi de l’Etat.

S Vox populi

Oumou Khaïry NDIAYE
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