Inauguration Du Stade Abdoulaye Wade : après Reubeuss, Conakry, le protocole de Diamniadio ?

Le président Macky Sall est un politicien qui ne pose pas des actes sans pour autant attendre des dividendes. Dans la ville de Diamniadio, il a inauguré le stade qui a coûté 136 milliards au contribuable. Ce joyau qui porte désormais le nom de son prédécesseur, Abdoulaye Wade, pourrait ne pas être fortuit. A l’approche des législatives, cela sent déjà un parfum d’un rapprochement et d’un énième deal entre les deux hommes surtout que le PDS qui s’approche de la coalition YAW pourrait poser les pas d’ici peu. Le Mandat

Macky honore Wade Abdoulaye son prédécesseur, cela donne des fourmis au plus sceptique des sénégalais vues les relations heurtées entre les deux hommes de 2008 à aujourd’hui. Macky qui est un produit libéral ayant obtenu toutes les responsabilités grâce à la confiance que lui avait accordée le Pape du Sopi. Malheureusement l’élève a fini par décimer le parti démocratique sénégalais (PDS) aux fins de mieux contrôler son pouvoir.

Nommé directeur de Petrosen, puis ministre de l’énergie, ministre de l’intérieur, premier ministre et enfin président de l’assemblée nationale, Wade aura tout donné à Macky et a participé à son ascension en politique. A cause d’une gouvernance peu orthodoxe dont Macky Sall est lui-même comptable et un troisième mandat de trop, les sénégalais ont exigé la réédition des comptes pour le régime libéral déchu. Ce qui est normal dans une démocratie. En exigeant que justice soit faite, les sénégalais venaient de donner au nouveau président l’arme qui allait anéantir ses adversaires.

Ainsi, Macky dépoussière la cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) avant d’aller à l’assaut des pontes libérales. Dans une liste de 44 personnalités ciblées, 25 dossiers seront mis en examen. Au finish en dehors de Karim Wade du moins pour le moment tout ce beau monde finira dans le giron marron et beige pour chercher une immunité et échapper au glaive de dame justice.

Ainsi, Macky massifie son parti avec des décombres du régime de son prédécesseur. A quelques mois de la tenue des élections législatives et après avoir annoncé la venue de  »Gloria » qui va massifier la mouvance présidentielle, les sénégalais avaient déjà indexé Karim Wade surtout que son père annonçait les retrouvailles de la famille libérale.

Le PDS qui joue au chaud et froid, a fini par perdre son hégémonie dans la politique. C’est pourquoi certains observateurs pensent que cette nomination cache beaucoup de non-dits comme ce fut pour la libération de Karim Wade. Un deal nouveau ne serait point une surprise surtout que les relations entre Abdoulaye Wade et Macky Sall ont été marquées par des «protocoles secrets» méconnus du grand public.

Macky, Le Bourreau Du Pds

Avec Macky Sall, l’on reconnaîtra qu’il a pu anéantir la force de mobilisation du PDS grâce à la promotion de la transhumance. Outre cela, il parvient à mettre Wade hors circuit grâce aux « protocoles » qui feront croire à Abdoulaye que demain son fils sera libéré.

Ainsi, grâce à sa démarche, ceci laisse présager qu’il y aura un troisième protocole qui sera dit le protocole de Diamniadio ! Le PDS a été le symbole d’une opposition radicale d’un Sénégal démocratique.

Ce parti a eu le mérite de mener tous les combats de Senghor Léopold Sédar, premier président de la république du Sénégal à Abdou Diouf. Malheureusement à partir de 2012 suite à 12 années de règne, le retour dans l’opposition a été un véritable fiasco. Le PDS a perdu les repères d’un parti d’opposition jouant un rôle de non-alignés. Depuis lors, ce parti joue au figurant et contribue à saper l’unité de l’opposition mais évite de rejoindre la mouvance présidentielle.

Pour faire libérer son fils, Wade père a fini par devenir le jouet politique de son ancien élève qui tire les ficelles du jeu comme et quand il veut. En 2017, à la veille des élections législatives, le PDS quitte la coalition taxawu Sénégal pour faire cavalier seul. En 2022 lors des élections locales, c’est le même scénario qui se pose puisqu’il quitte la coalition yewi askan wi (YAW). Déjà pour les législatives du mois de juin, certains pensent que s’il rejoint le YAW c’est pour leur jouer un mauvais tour vu ce qui s’est déjà la fois dernière. Pour preuve les protocoles qui se sont succédés dans le passé prouve que c’est un parti dont les rapprochements avec le pouvoir dépend de l’offre du président Macky Sall envers Karim Wade.

 

Le Protocole De Conakry

A la veille de l’élection présidentielle, Abdoulaye Wade dont le fils n’avait plus le droit d’être électeur et éligible, était retourné à Dakar pour tenter d’empêcher le bon déroulement du vote. De son retour, il refusa de passer par mbadate nom du pavillon présidentiel réservé aux hôtes de marque. Le pape du Sopi emprunte un vol régulier et atterrit à l’aéroport Blaise Diagne.

Devant la porte, l’attendait une foule immense qui a organisé une caravane jusqu’à sa demeure du point E, sa demeure. Sachant qu’il y avait de forts risques que l’élection soit perturbée, son camarade Alpha Condé, avec qui il a partagé des moments de lutte est intervenu pour apaiser la tension.

Dans un entretien accordé à des journaux sénégalais, le président de la Guinée déchu disait «Vous savez, je suis très lié au Sénégal. Lorsqu’on m’arrêtait, il y avait des comités de soutien créés par les hommes politiques partout, mais la particularité au Sénégal, c’est que c’est la population qui s’est mobilisée. Ousmane Ngom qui était mon avocat m’a dit que c’est dans la rue qu’il a appris que j’étais libre. Je n’oublie pas que le comité international créé par Albert Bourgi, accompagné par Babacar Touré, ont fait l’essentiel des réunions à Dakar. Donc, je ne peux pas rester indifférent lorsqu’il s’agit d’un pays comme ça, étant donné que Macky Sall est un jeune frère ».

Et Alpha Condé de poursuivre en soutenant que « dans une médiation, l’essentiel est d’arriver à une conciliation des deux parties ; ce que nous avons fait. C’est vrai que l’incompréhension était à un tel niveau, mais avec la volonté des deux positions, nous avons pu arriver au résultat que vous connaissez ».

Toutefois, le président de la Guinée n’est pas entré au fond du deal qui a fait revenir Wade sur sa décision soit de saboter le scrutin soit de donner un consigne de vote en faveur du candidat Ousmane Sonko. D’ailleurs c’est ce protocole que certains appelaient le protocole de Massalikul Jinan (à l’image d’une entente secrète qui a été tenue lors de l’inauguration de la mosquée de Massalikoul Jinan).

Le président Macky Sall lors de la présidentielle de 2019, victoire dans la poche, en a profité pour libérer Khalifa Sall qui n’était pas demandeur. Ce dernier a été forcé de sortir de sa cellule après avoir refusé à maintes reprises un deal politique avec le régime. Macky qui avait réussi à écarter ses deux principaux concurrents (Karim et Khalifa) en entachant leur carrière n’avait plus intérêt de les garder prisonniers.

Le Protocole De Doha

Avant le protocole de Conakry il y avait le protocole de Doha. Après l’arrestation et la condamnation de Karim Wade le 23 mars 2015 (6ans de prison avec une amende de 138 milliards CFA), le président Abdoulaye Wade a usé de toutes ses relations pour faire libérer son fils. Des chefs d’Etat, hommes d’affaires et chefs religieux ont usé de leur influence mais en vain. Karim Wade qui par le passé était le mal aimé à cause d’un ministère taillé sur mesure que son père lui avait confectionné dont l’appellation péjoratif fut ministre de la terre et du ciel avait fait de lui un homme plus fort et plus convoité que le président de la république, Abdoulaye Wade. Macky l’emprisonne et le libère nuitamment dans des conditions que lui-même, Me Madické Niang et les Qataris connaissent le secret.

Depuis lors, l’ancien puissant ministre est exilé au Qatar. Malgré les demandes de révision de son procès à cause des irrégularités qui ont été notées durant le processus, la posture du régime prouve que l’actuel chef de l’Etat voulait à tout prix finir avec un adversaire politique.

Pourtant Karim n’est pas exempt de reproche car il a contribué à la gestion peu catholique que le régime libéral a commise, suffisant pour Mody Niang de soutenir qu’une juridiction normale pourrait se charger du cas Karim.

Le 23 juin 2016, le procureur du Qatar rencontre le Ministre de la justice Sidiki Kaba et le Président Macky Sall. Ils se sont entretenus sur les débuts de coopération judiciaire et du cas Karim Wade. L’ambassadeur du Qatar au Sénégal, Bin Ali Al Qahtani a assisté, encore une fois, à la réunion. Tout a commencé le 21 février 2016, lorsque Sidiki Kaba, ministre de la justice s’est rendu au Qatar. Et il y a bel et bien eu négociations entre le Qatar et le Sénégal.

Ce sont nos confrères de Canal France Info qui avaient défloré les secrets du « deal » en retraçant les faits depuis le voyage de Sidiki Kaba au Qatar en février de la même année, jusqu’à la rencontre au palais entre Macky Sall et le procureur général du Qatar le 23 juin, veille de la libération de Karim Wade

Le Mandat

Oumou Khaïry NDIAYE
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