Il Se Fait Tard …! Par Babacar Louis Camara

« Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir et n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.»

Ce n’est pas sans doute une tâche herculéenne que de comprendre que le Senegal, si on n’y prend garde va droit vers la catastrophe, pour ne pas dire vers le chaos.

Il y’a urgence à élever la voix de la Sagesse et de la Raison dans le contexte politique actuel très chargé, miné par l’ampleur des cris de désespoir du peuple, doublé d’une morgue arrogance de nos hommes politiques.

Nous assistons à une gesticulation et à une escalade puérile qui nous mènent irréversiblement à un naufrage collectif qui va hypothéquer durablement l’existence de la nation sénégalaise.

La rhétorique de la peur, de l’angoisse, s’est installée partout dans le pays, anéantissant tout espoir d’un avenir meilleur.

L’agrégation et la cristallisation des multiples frustrations, des scandales financiers répétés, ont cimenté la désapprobation d’une large frange de la jeunesse sénégalaise. Ce fort ressentiment de détestation avait provoqué auparavant un total désintéressement de la jeunesse à la gestion de la Cité.

Aujourd’hui, la jeunesse sénégalaise est consciente  qu’elle doit métamorphoser la trajectoire du développement économique et social du Sénégal. Et que demain ne sera pas pareille qu’hier, avec les certitudes du passé de nos hommes politiques qui jouent à contre temps de la musique du monde.

Les besoins de la jeunesse d’aujourd’hui ne sont pas ceux de la jeunesse d’hier. Les réalités évoluent, les priorités changent et la société aussi.

La jeunesse doit constituer une réelle priorité, placée au centre de toutes les préoccupations de l’action de l’Etat. Les jeunes veulent être des acteurs décisifs de leur développement, persuadés qu’ils sont les principaux maillons de l’identité nationale, de la cohésion sociale et du vivre ensemble.

Ils sont convaincus que la mondialisation est une opportunité qui s’offre à eux et qu’une bonne et meilleure gouvernance politique et économique est celle qui intègre leurs désirs d’épanouissement.

Il nous faut prendre la mesure que toute la jeunesse africaine conteste vigoureusement l’hégémonie de l’Occident sur les pays africains.

Ce vent de révolte qui souffle un peu partout en Afrique deviendra bientôt une bourrasque qui n’épargnera aucun pays du continent. Le SENEGAL doit sortir du mimétisme pour emprunter courageusement le chemin de l’histoire qui s’écrit présentement d’une manière inéluctable.

L’Etat du Sénégal doit affirmer la cohérence de sa vision sur notre Souveraineté Nationale dans toute sa globalité, pour dire qu’elle est exercée par le peuple sénégalais, dont la très grande majorité est composée de jeunes. La grande vision d’ensemble du développement du Sénégal d’aujourd’hui et de demain doit se mesurer à la quadruple dimension que sont : Justice – Démocratie – Sécurité – Bonne gouvernance.

La politique quadrangulaire ainsi définie devrait être le viatique et le bréviaire de notre marche vers l’Emergence.

« Aux grands maux les grands remèdes ». Le Chef de l’Etat, le Président Macky Sall doit mettre fin à la récréation afin de ne pas ternir son bilan des deux mandats consécutifs ; lesquels nous semblent positifs et élogieux à bien des égards.

Dès à présent, le Chef de l’Etat doit tenir un discours structurant, avec une Voix Forte et une Main Ferme qui ne tremblent point pour exorciser les démons de la division et de l’apocalypse. Le Président de la République, Maitre des horloges, doit mettre les pendules à l’heure car « tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse ».

Son fabuleux destin lui impose de sortir d’une certaine solitude en se débarrassant du corset de l’immobilisme et de s’affranchir des thuféraires du pouvoir qui ne sont que dans la fourberie et de l’ignominie. Le Président de la République sera le seul redevable devant la Nation. Il faut extirper la gangrène de la cupidité et de l’accaparement qui s’est installé au cœur de l’Administration sénégalaise et de ses démembrements.

A l’épreuve des faits et des constats, se pose la problématique de la société sénégalaise gangrénée par l’obsession des richesses.

La manifestation de la vérité pour le mensonge a provoqué la désacralisation de l’Etat du Sénégal avec ses Institutions. La déliquescence de notre société nous a fait perdre toute notre capacité d’indignation pour installer dans l’imaginaire collectif la culture de la prédation et de la corruption sur le lit de l’impunité.

Il est urgent de s’attaquer à toutes les formes de corruption, de concussion et de prédation en restaurant la prééminence de l’Institution Judiciaire, la remettant à l’endroit avec toutes ses prérogatives d’Indépendance. A cette fin, il faut la dépossession du Pouvoir Exécutif sur le bon et plein droit, comme cela se pratique dans tout Etat démocratique et soigneusement spécifié dans notre Charte fondamentale qu’est la Constitution.

En Afrique de l’Ouest où la situation géopolitique est trouble, le Sénégal demeure encore un fragile havre de paix, de stabilité politique et sociale.

Ne mettons pas la poussière sous le tapis, au moment où nous nous attendons à plus de confrontation, sinon nous risquons de passer de l’autre côté du miroir pour sombrer dans un horrible tourbillon de violence. Il n’est pas difficile  d’identifier les actions à privilégier pour accélérer l’Emergence du Sénégal.

L’Etat du Sénégal, pays pauvre, endetté, est dispendieux, vivant dans un insolent confort, très éloigné  de son niveau de développement.

Il nous semble aussi important que l’Etat du Sénégal doit avoir une plus grande confiance et empathie envers son secteur privé.

Il y’a un complexe et une immoralité manifeste dans l’attribution de certains marchés de travaux d’envergures aux entreprises étrangères,  alors que l’expertise et les ressources humaines qualifiées ne font pas défaut au Sénégal. Le secteur privé sénégalais est outillé pour exécuter toute ingénierie technique et financière. Il a de l’entregent, disposant d’un portefeuille relationnel important à travers le monde pour trouver des partenaires financiers et techniques de références.  Malheureusement l’Etat n’est pas à leur écoute, préférant traiter et négocier dans de lugubres officines avec ceux qui ont été initiés et informés des projets.

Ces délits d’initiés font le lit de la corruption, de la concussion et de la surfacturation.

Dans tous les pays réellement souverains, existe une discrimination positive pour protéger et appuyer son secteur privé. Cela doit être un engagement volontaire de l’Etat comme dans les pays émergents de l’Asie qui ont pu fabriquer des économies fortes dont les locomotives sont tirées par le secteur privé national. Nous devons cesser de jeter l’opprobre sur la France et d’autres pays pour reconnaitre que nous sommes les fossoyeurs de notre développement économique et de notre avenir.

La négation de notre responsabilité se mesure aussi par l’immoralité que nous constatons dans le traitement des dossiers sur la lutte contre la corruption et l’impunité. La multiplication des arguments politiques pour protéger des prédateurs, des malfaiteurs, donne l’impression d’une parodie d’équité et de justice.

La Justice est le rempart de la démocratie. Elle est la vertu morale qui sous-tend toute activité humaine. Dans un Etat où la Justice n’est pas indépendante tous les pans de la société risquent de s’effondrer. Elle doit être impartiale, équidistante à toutes les forces d’influence pour dire le droit dans l’intérêt supérieur de la Nation.

Une Justice indépendante crée les conditions de la Bonne Gouvernance en permettant l’épanouissement de tout citoyen en se prononçant souverainement sur toutes les affaires litigieuses conflictuelles ou délictueuses.

Nous devons renforcer l’Etat de droit qui ne doit nullement se départir du socle  de notre Constitution ; à savoir la séparation des pouvoirs.

L’exemplarité du fonctionnement de la Justice permet de pacifier la société sénégalaise ; car dans le désordre rien de grand et de durable ne peut se construire.

En démocratie, la durée et la limitation des mandats sont souhaitables car elles permettent la maitrise de l’horizon et de l’agenda politique.

Si dans la langue française les mots ont un sens, la Constitution sénégalaise est assez précise pour être interprétée. Laissons à Monsieur le Président de la République Macky Sall, citoyen sénégalais, de prendre la décision que lui dictera sa Haute Conscience devant le tribunal de l’Histoire.

Sur toutes les échelles ou l’on mesure la démocratie sénégalaise, reconnaissons qu’elle existe réellement, malgré qu’elle soit chahutée assez souvent par des interprétations partisanes.

Certains sénégalais ont manifesté leur désapprobation sur le dépôt de la candidature du citoyen Macky Sall auprès du Conseil Constitutionnel, et d’autres la soutiennent.

C’est cela la Démocratie !

Devant cette situation classique en Démocratie ; notre Constitution donne toutes les prérogatives au Conseil Constitutionnel à se prononcer en interprétant juridiquement le sujet de la discorde.

Dans tous les cas de figure, seule la Souveraineté du peuple sera déterminante sur le choix du prochain Président de la République à travers des élections inclusives, transparentes et démocratiques.

La légitimité présidentielle sera donné par le Peuple Souverain.

Il serait donc souhaitable qu’aucune candidature ne soit écartée pour des raisons fallacieuses, sordides et abjectes.

Pour des raisons de transparence et permettre au Peuple Souverain de choisir librement, il faudrait un compromis politique dynamique dans un large Dialogue National, dirigé par une personnalité indépendante, reconnue pour sa probité et son intégrité.

Nous pouvons citer entre autres aux Généraux Babacar Gaye et Pape Khalif Fall, anciens CEMGA qui ont eu à servir loyalement la République.

Alors, des  discussions pourraient tourner sur les points suivants :

  • Réformer et alléger le parrainage comme le conseille la Haute Cours de Justice de la CEDEAO
  • Voter avec le bulletin unique pour permettre une fluidité du vote et la réduction des dépenses du scrutin.
  • Revoir le code électoral pour restaurer les droits politiques illégalement enlevés à de potentiels candidats.
  • Elargir des lieux de détention tous les détenus « politiques » pour amorcer un apaisement salutaire.

Le dialogue national vaut mieux que la confrontation nationale avec son effarant cortège de stratégies et de scènes surréalistes qui ne peuvent  déboucher que sur le chaos. Le problème sociétal de la Nation sénégalaise a été grandement posé et résolu par les Conclusions des Assises Nationales avec la Refondation de la République, dont la boussole est la Charte de la Bonne Gouvernance. Ce serait une belle opportunité lors du Dialogue National de ce 30 Mai 2023 de convoquer cette monumentale et historique contribution pour retrouver le chemin de la Démocratie et de l’Emergence.

Il n’y a pas lieu de désespérer du Sénégal, pays de la Teranga.

Et ce n’est pas au moment où le Tout Puissant Allah vient à notre secours en nous dotant d’importantes réserves d’hydrocarbures que nos hommes politiques veulent devenir des pyromanes. Aujourd’hui il y a lieu de cesser les harcèlements et les persécutions sur d’honnêtes citoyens dont le seul tort est d’avoir exprimé leur position sur la marche et la gestion du pays.

Il faut absolument et urgemment un sursaut salvateur de décrispation de la situation politique et sociale du pays.

C’est la première problématique que devrait résoudre le Dialogue National afin que notre système démocratique, structurellement déficitaire de dialogue soit remis sur le bon chemin.

Depuis quelques mois, notre cher Sénégal est devenu la risée de l’Afrique qui voyait en notre pays le phare lumineux de la Démocratie.

Et nous pouvons dire que « Tel est pris qui croyait prendre » tant la situation du Sénégal est burlesque et saugrenue.

Au rythme du film qui se déroule sous nos yeux, se taire serait une forme de trahison en assistant silencieusement à la sortie du Sénégal de l’Histoire de l’Afrique.

 

Ce N’est Pas Encore Tard !

 

Babacar Louis Camara

Président de La Convention des Dakarois

 

Momar Diack SECK
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