Effets secondaires d’un putsch manqué : Des confrères racontant le calvaire de la traversée la Gambie

Le voyage du Balantacounda, dans le département de Goudomp, à Dakar, n’est pas de tout repos. Au calvaire de la longue distance, il faut ajouter les tracasseries sur la trangambienne. 

Les contrôles de police de part et d’autre de la frontière (Sénéba au Sénégal et Soma en Gambie) terminés, l’horaire de Samine ne s’immobilisera à Bamba Tenda, une rive du fleuve Gambie, qu’à 14h35. Auparavant ceux qui ne détenaient pas de pièce d’identité par devers eux avaient été conduits aux niveaux des deux postes de police des frontières cités ci-haut où ils ont payé 1000 F Cfa pour obtenir des laissez-passer sénégalais et gambien.

A l’intérieur du territoire gambien, c’est le début du calvaire. Ceux qui ont emprunté la trangambienne ce jour-là, lundi 4 mai 2015, ont eu une désagréable surprise: leur voyage coïncide avec la tournée du chef de l’Etat gambien Yahya Jammeh dans la zone de Soma située sur la transgambienne. En effet, depuis le coup d’Etat manqué du 30 décembre 2014 en Gambie, qui ne cesse de se barricader, quand le président Jammeh se déplace, c’est la sécurité maximale, … rien ne bouge.

En atteste, ici, des dizaines de soldats armés occupent, à environ une trentaine de mètres du quai, une sorte de hangar servant d’espace d’attente pour les passagers, en construction pendant que d’autres assistent les agents de la Gambia Ports Authority dans l’organisation de la traversée du bac de Farafenni. Tout est fait pour le «succès» de ce déplacement à travers un accueil populaire du président Jammeh. Donc priorité aux militants.

Jammeh bloque les voyageurs

Conséquence, le temps passe, le fil de véhicules immatriculés au Sénégal ne bouge presque pas. Pendant ce temps, de nombreux minicars et bus gambiens transportant des personnes habillées de tissus à l’effigie de Yahya Jammeh et de tee-shirts aux couleurs de l’APRC, le parti au pouvoir, des officiels et de nombreuses camionnettes remplies de matelas envahissent les trois ferrys qui assurent la rotation pour la traversée vers Yelli Tenda du côté de Farafenni.

C’est alors que les passagers ont commencé à comprendre et à se passer l’information: «Le président Jammeh est en tournée dans la zone de Soma. C’est ce qui explique ce retard dû aux convois de militants.»

L’on passera sur place le reste de la journée, tout comme de nombreux autres horaires provenant de différentes localités de la Casamance, plusieurs dizaines de taxis brousses communément appelés «sept places», des véhicules particuliers notamment des pick-up et autres 4X4 et des camions. Ce n’est qu’au-delà 20h30 que ces dizaines de voitures  traverseront le fleuve Gambie à bord des trois ferrys.

Une fois à l’autre rive, c’est la course poursuite pour arriver à Keur Ayip avant le blocage de la frontière.  Mais le soulagement des passagers ne sera que de courte durée puisse que les habitués du trajet vont rappeler à qui veulent les entendre que depuis le putsch avorté de décembre dernier à Banjul, toutes les frontières terrestres sont fermées à partir de 19 ou 20h.

Les commentaires vont train: «à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. C’est lui (Yahya Jammeh-Ndrl) qui nous a retardé, il doit pouvoir repousser la fermeture de la frontière ne serait-ce qu’aujourd’hui», lancent les plus optimistes. Les autres, très sceptiques préviennent: «il fait déjà presque 21h. Nous allons passer la nuit à Farafenni. Ne vous faites pas d’illusion, la frontière est déjà fermée à l’heure actuelle», martèlent-ils.

Au bout de moins d’une quinzaine de minutes, le car qui roulait à vive allure s’arrête à hauteur du poste frontalier des douanes de Farafenni, juste derrière plusieurs autres voitures. Un des apprentis, assis juste au premier siège derrière le chauffeur se lève: «la frontière est fermée, nous sommes obligés de passer la nuit ici jusqu’à demain matin 8h.»

C’est la désolation ! Alors que les clients faisaient du bruit, deux policiers montent à bord: «montrez vos cartes d’identités nationales s’il vous plait». Le contrôle terminé, une fois au dehors, l’ambiance est celle d’une gare routière. Plusieurs dizaines, voire une centaine de voitures de transport en commun, de particuliers et même des camions sont stationnées de part et d’autre de la route principale. Des militaires gambiens, armes en mains ou en bandoulières, surveillent la frontière et les moindres mouvements des personnes.

Source  »Sud Quotidien »

Momar Diack SECK
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