L’émigration irrégulière est en train de prendre de nouvelles tournures. Aujourd’hui, ce ne sont plus que la police, la gendarmerie et la Marine nationale qui sont aux aguets pour barrer la route aux candidats de ces voyages périlleux appelés ‘’Barça ou Barsakh’’, les acteurs de la pêche veille eux aussi aux grains. Et ce, pour veiller sur les pirogues qui aujourd’hui font l’objet de beaucoup de vol. Pour preuve, après Yarakh où, il y a moins d’une semaine de jeunes pêcheurs ont volé une embarcation avant de prendre le large, Rufisque a été avant-hier, le théâtre de violentes bagarres entre acteurs de la pêche local.

Des recoupements faits, il ressort que tout est parti d’une tentative d’émigration irrégulière entreprise par un pêcheur rufisquois. Celui-ci ayant embarqué les candidats au voyage vers l’Espagne avait jugé utile de faire, loin du rivage, le tri des clients. Dès lors, il a approché son embarcation de celles qui étaient amarrées près des plages rufisquoises pour pouvoir faire la sélection à bord des deux embarcations qui continuaient de tanguer. Cette approche n’a pas été du goût des autres pêcheurs qui surveillaient leurs biens.

Croyant alors à une tentative de vol de pirogues, ceux-ci se sont lancés à leurs trousses. Il y eut de violentes altercations et des échanges de coups et de propos désobligeants. Les choses se sont envenimées et au finish, pas moins de deux pirogues et des filets ont été incendiées et quelques 4 personnes arrêtées.

Des pirogues et filets de pêches de plusieurs millions réduits en cendres, en plus des interpellations

Pour mettre leurs outils de travail à l’abri, certains ont dû tirer des eaux, des pirogues dites «fil à tourner». Ces précautions prises n’ont pas pu profiter à toutes les embarcations qui se trouvaient sur les lieux. Parce que certaines pirogues d’une valeur, chacune de près de 8 millions et des filets de pêche récemment acquis ont été réduits en cendre, par les pêcheurs lors de leurs confrontations.

Après avoir été pris pour cibles par leurs collègues, à Rufisque, dans la nuit du dimanche au lundi dernier, les conducteurs de la pirogue remplie de candidats voulant se rendre en Espagne ont dû rebrousser chemin. «Nous avons embarqué les passagers dans les embarcations. Ils étaient trop nombreux. Nous avons alors voulu profiter de ces pirogues amarrées pour trier les candidats. Pour ce faire, nous sommes alors allés approcher une pirogue de pêche. C’est alors que des pêcheurs armés de bâtons, nous sont tombés dessus. Ils nous ont versé de l’essence et menacé de nous brûler vifs. Nous avons tenté en vain de leur faire comprendre que c’était pour trier les passagers, mais ils n’ont pas voulu entendre raison. Nous avons alors pensé aller à Diockoul pour pouvoir faire le tri. C’est alors que nous avons vu 3 pirogues se lancer à nos trousses avec des gens qui manifestaient leur désir de nous verser de l’essence pour ensuite mettre le feu, c’est alors que nous avons riposté et ce fut des confrontations musclées, certains se sont versés mutuellement de l’essence. Il y eu alors des pirogues qui se sont percutées jusqu’à endommager gravement ma pirogue qui avait à son bord les passagers de ce voyage vers l’Espagne».

Le corps sans vie d’un jeune domicilié à Diockoul repêché à la plage de Rufisque

Leur embarcation gravement endommagée pour avoir été plusieurs fois percutée de plein fouet par les autres pirogues, les pêcheurs ont finalement fait cap vers Diockoul. «Ils ont eux aussi attaqué et ont déversé leur colère sur les autres pirogues à la plage avant d’y mettre le feu. Même les autres pirogues qui y étaient amarrées n’ont pas été épargnées. Cela a poussé B. Nd, un des propriétaires de ces pirogues incendiées à porter plainte».

Dans cette histoire, il était fait état de personnes portées disparues, à l’issue de ces confrontations en mer. Ce climat tendu à Rufisque qui oppose des acteurs de la pêche locale a poussé Pierre Mboup à appeler au bon sens et au calme. Défenseur des acteurs de la pêche, il a profité d’une déclaration filmée pour inviter les uns et les autres à savoir raison garder. «Il y a déjà un mort déploré. Il s’agit d’un jeune qui habite à Diockoul. Son corps a été retrouvé à la plage de Diockoul Ndiayène, la police a fait le constat, les éléments des sapeurs-pompiers ont récupéré la dépouille, a-t-il indiqué. «J’invite tous ceux qui assuraient la traversée de l’Atlantique pour conduire des candidats à l’émigration irrégulière en Espagne, à l’arrêt. Selon des infos, plus de 30 pirogues ont été saisies et plus de 2000 acteurs de la pêche arrêtés. Cela, sans compter plus d’une trentaine de pirogues interceptées par les forces de défense et de sécurité sénégalaises», dit-il. A l’en croire, «aujourd’hui, il sonne la fin de l’émigration irrégulière. Parce qu’il y a aujourd’hui autant de morts que de migrants arrivés à destination. Le temps n’est plus favorable à ces voyages à cause des vents forts. Le temps se dégrade. Pis, de nombreux vols de moteurs, de bidons de carburant et de pirogues sont déplorés. Et rien que cette semaine, beaucoup de pirogues ont été obligées de rebrousser chemin à cause du mauvais temps en Europe», signale Pierre Mboup.

Vox Populi