Après le braquage de l’hôtel Riu : Grande psychose sur la Petite-Côte

Saly et Pointe-Sarène, deux pôles touristiques majeurs du Sénégal, sont en proie à une inquiétude grandissante après un incident récent impliquant des échanges de coups de feu entre une vingtaine d’assaillants encagoulés et des gendarmes à Riu, un établissement hôtelier. Vingt-quatre heures après cette attaque, les acteurs du tourisme, les habitants et les experts s’alarment des conséquences potentielles de cet événement sur l’image de la destination et sur l’économie locale.

Selon Ismaïla Sow, Secrétaire général de Compact Yataal et consultant en tourisme, membre du Réseau des universitaires touristiques, cet incident ne peut qu’avoir un impact négatif, notamment sur les clients présents lors des faits et sur ceux qui envisagent de visiter ces destinations à l’avenir. «Même un impact psychologique suffit à perturber le flux touristique», souligne-t-il.
D’ailleurs, M. Sow met également en garde contre l’éventualité de scénarios plus graves : «Si une organisation terroriste mieux préparée s’infiltrait, cela serait catastrophique.»

Cette attaque de l’hotel Riu met à nu les lacunes des dispositifs de sécurité dans la station balnéaire de Pointe Sarène, mais également dans celle de Saly. Le rôle de la police touristique, installée récemment pour garantir la sécurité dans ces lieux, est vivement critiqué par les acteurs. «Il faut qu’on donne un contenu à la police touristique qui n’est là que pour faire du racket et s’occuper de réglementation, au lieu de sécurité. Depuis son installation, on ne la sent pas du tout. Elle est plus là pour interpréter la réglementation sur le tabagisme, sur les heures d’ouverture et de fermeture des bars ou restaurants, sur les autorisations d’ouvrir une résidence ou autre chose, alors que pour ça, il y a un service, il y a la Division régionale du tourisme (Drt) qui est représentée au niveau local par le Service régional du tourisme (Srt), c’est leur travail et le reste ce sont les impôts et les autres, cela ne doit pas être le travail d’une police touristique», déclare-t-il. Les professionnels appellent à une refonte de ses missions et à un renforcement de son efficacité.

Du côté des hôtels, la sécurité est jugée insuffisante et parfois confiée à des personnels non qualifiés. Doudou Ndiaye Copa, ancien directeur de la maison communale du Tourisme de Mbour, estime que «les services de sécurité doivent être assurés par des agences spécialisées et professionnelles. Vous ne pouvez pas prendre quelqu’un qui n’est pas issu du milieu de la sécurité pour lui confier une tâche aussi importante», se désole M. Ndiaye. A l’en croire, les populations locales ont un rôle-clé dans la sécurité. «La participation des populations locales à la sécurité est également cruciale, notamment à travers des collaborations entre les villages et les hôtels pour surveiller les allées et venues», assure- t-il.

Le secteur du tourisme sénégalais, encore en convalescence après la pandémie du Covid-19, se trouve à nouveau confronté à un défi majeur. Ablaye Diop, vendeur d’objets d’art, exprime son inquiétude : «Nous craignons de voir moins de clients. Le touriste ne badine pas avec la sécurité. C’est pourquoi les autorités doivent tout faire ainsi que les hôteliers pour que pareille situation ne se reproduise plus.»

Pour éviter une situation pareille, les professionnels appellent l’Etat à agir rapidement pour restaurer la confiance des marchés émetteurs. L’Agence sénégalaise pour la promotion touristique (Aspt) doit non seulement promouvoir la destination, mais aussi garantir la sécurité des visiteurs. «Il faut former des agents qualifiés et établir des standards de sécurité clairs pour tous les acteurs du secteur», plaide M. Ndiaye.

Aujourd’hui, le braquage survenu à l’Hôtel Riu le week-end dernier,  illustre la fragilité de l’industrie touristique sénégalaise face aux défis sécuritaires. Pour préserver l’attractivité du pays, il est impératif de renforcer la sécurité et de mobiliser tous les acteurs, l’Etat, hôteliers, populations locales et institutions spécialisées, pour rendre la destination plus sûre, mais aussi plus agréable.

LeQuotidien

Fatima Seck

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