La 14ème législature a été installée dans la douleur. Les images de Guy Marius Sagna debout sur l’urne, le 14 septembre 2022, lors de l’élection du président de l’Assemblée nationale, restent encore fraîches dans les mémoires. Même si on est loin de ce jour sombre de la démocratie représentative du Sénégal quand les gendarmes se sont introduits dans l’hémicycle, les confrontations continuent. Un fait : les protagonistes restent toujours sur le ring avec d’autres acteurs, notamment d’anciens députés et de la société civile.
Mais, le combat se joue en dehors de l’Assemblée nationale sur un tout autre sujet. Il s’agit de la date de la dissolution de l’Assemblée. Alors que le débat fait rage, l’expert électoral Ndiaga Sylla se signale avec une proposition. Il plaide pour des Législatives anticipées.
«Il serait judicieux de s’inscrire dans la logique d’organiser les élections législatives anticipées au plus tôt(mi-novembre) et d’installer la nouvelle Assemblée nationale pour qu’elle adopte le budget en décembre 2024 en mode fast track», a indiqué l’expert électoral dans un post sur ses pages sur les réseaux sociaux.
Mais face aux exigences du parrainage et le dépôt des listes de candidats à partir de 85 jours avant la date du scrutin comme l’indique l’article 176 du code électoral, il estime qu’un compromis entre les acteurs est nécessaire.
«Il faudra l’envisager avant la dissolution car l’article 87 de la Constitution dispose que l’Assemblée nationale dissoute ne peut se réunir. Par conséquent, elle ne pourra ni voter le budget ni modifier la loi électorale. Et le Conseil constitutionnel ne pourra pas torpiller les délais constitutionnels», a ajouté Ndiaga Sylla.
Sur le terrain, le vœu de l’expert électoral pour un compromis entre les acteurs politiques semble être impossible. Déjà, il faut dire que les députés, premiers concernés, ont des avis divergents sur la date de la dissolution de l’Assemblée nationale. Pour le président du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi, dominé par le Pastef, un des plus importants partis de la coalition au pouvoir, si dissolution il y a, le plus tôt sera le mieux.
«En tant que député, je n’ai pas à être pour ou contre une dissolution parce que c’est prévu par la Constitution. Je suis pour que tous les actes soient conformes à la Constitution et à la légalité. En tout cas, je lui donne carte blanche pour dissoudre au moment où il le décidera et où il le souhaitera», avait déclaré Mohammed Ayip Daffé.
Les positions sur la date de la dissolution de l’Assemblée nationale varient entre le jour du scrutin, la proclamation des résultats et l’installation de l’Assemblée nationale. Du côté de Benno Bokk Yakaar, l’actuelle législature, installée le 12 septembre 2022 ne peut être dissoute que le 12 septembre 2024. Car, à en croire le député Ibrahima Baba Sall, le député n’entre en fonction qu’après son installation et non le jour de son élection qui ne fait que lui reconnaître ses attributs de parlementaire. Il donne l’exemple du président de la République qui, dès son élection, bénéficie de tous les attributs de sa charge. Mais, il ne pourra signer des décrets qu’une fois installée.
Selon, l’ancien député, Alioune Souaré, par ailleurs, expert en droit parlementaire, la Constitution est muette sur le début de la législature. Il s’est référé, sous ce rapport, au règlement intérieur de l’Assemblée nationale en son article 51 qui stipule : «Le député est couvert par l’immunité à compter du début de son mandat qui prend effet dès la proclamation des résultats de l’élection législative par le Conseil Constitutionnel».
Alioune Souaré est du registre de ceux qui se réfèrent à la date de proclamation des résultats définitifs. Étant donné que le Conseil Constitutionnel a proclamé, le 11 août 2022, les résultats des élections législatives qui se sont tenues le 31 juillet 2022, la présente législature devrait boucler ses 2 ans ce dimanche 11 août. Se référant à la date des élections législatives qui s’étaient tenues le 31 juillet 2022, Aminata Touré pense que l’Assemblée a déjà deux ans.
C’est pourquoi elle avait appelé le président de la République à dissoudre l’Assemblée nationale le 31 juillet 2024. D’ailleurs, pour en avoir le cœur net, le chef de l’Etat aurait saisi le Conseil Constitutionnel pour avis sur la dissolution de l’Assemblée nationale.
Une Bonne Chose Pour Le Pouvoir ?
Malgré le résultat de la dernière élection présidentielle, le camp de Benno Bokk Yaakaar et celui du Pastef continuent de se livrer à une guerre de positionnement. La tenue d’élections législatives anticipées pourrait faire perdre à Benno Bokk Yaakaar, surtout dans le contexte actuel, son arme de contre-pouvoir contre le régime en place minoritaire à l’Assemblée nationale.
D’ailleurs, les partisans de Macky Sall, majoritaires à l’Assemblée, avaient déjà réalisé leur premier coup d’éclat en renvoyant la tenue du débat d’orientation budgétaire du ministre des Finances et du Budget. Une action consécutive à des propos du Premier ministre menaçant de tenir sa Déclaration de politique générale devant un jury populaire autre que l’Assemblée nationale.
Face à ce rapport de force, le groupe parlementaire avait menacé d’introduire une proposition de loi pour empêcher le président de la République de dissoudre l’Assemblée nationale.
La proposition n’a pas été déposée mais, selon des informations de «L’As», l’ancien président aurait demandé à son camp de revenir à de meilleurs sentiments et de rester «républicains». Pour le nouveau régime, la tenue de législatives anticipées pourrait lui permettre de prendre le contrôle de l’Assemblée nationale.
Une majorité parlementaire qui pourrait lui permettre de légiférer sans grande difficulté. C’est pourquoi, les membres du régime en place appellent le chef de l’Etat de leurs vœux à dissoudre l’Assemblée nationale et d’enterrer définitivement la page de la Coalition Benno Bokk Yaakaar à la tête de l’Etat
Source L’As