Poste d’Envoyé Spécial du Chef De L’état : entre « utilité publique et récupération-recasement-isolement », les avis divergent

Le moins que l’on puisse dire, la nomination du père de Barthélémy Dias, maire de Mermoz Sacré Cœur, à ce poste d’Envoyé spécial a remis au goût du jour la pertinence d’une telle station.

Prenant le contre-pied de certains observateurs, l’Enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint Louis, Moussa Diaw, pense que le poste d’Envoyé spécial créé par le chef de l’Etat n’est pas une coquille vide. Même s’il admet que ce sont des nominations éminemment politiques, M. Diaw reste persuadé qu’il y a bel et bien un poste, une personnalité et une mission bien déterminée pour ce siège.

Marquant ainsi son total désaccord avec ceux qui soutiennent le contraire, l’Enseignant chercheur fait noter que c’est un poste occupé par des personnalités qui ont des missions bien précises à remplir, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. «Il y a bien un poste. Il y a bien une personnalité qui exerce une fonction bien définie par le décret présidentiel», a-til estimé

Quid du silence d’Aïssata Tall Sall, remplaçante d’Aminata Touré à ce poste d’Envoyée spéciale ?

Sur ce point, l’Enseignant à l’Ugb fait comprendre que ces derniers nommés à ce poste ne vont pas faire les radios pour informer des missions que leur confie le président de la République. Il a rappelé à cet effet que récemment, «on a vu Aïssata Tall Sall en Corée du Sud, avec une délégation, représenter le Chef de l’Etat». Une représentation du président Sall qui s’est faite, selon lui, sans tambour ni trompette.

Pour autant, il admet qu’il y a une dimension politique derrière ces nominations, car ce ne sont que des personnalités politiques qui sont mis à ce poste. «Il faut voir aussi que derrière tout cela, il y a des dimensions politiques. C’est des sensibilités politiques, ce sont des gens qui le soutiennent dans ses projets et politiques, ça peut être des missions diplomatiques », soutient-il.

Mieux, poursuit-il dans la même logique, «c’est vrai que quelque part, ça permet de nommer des personnalités qui n’avaient pas de poste. Ou bien de récompenser certaines personnalités. Ce sont des actions politiques, ces nominations-là. C’est éminemment politique» fait-il remarquer. Cela dans la mesure où il estime que le président peut bien nommer des experts comme Envoyés spéciaux dans divers domaines, notamment économique, culturel et même diplomatique.

 

Pour Dr Atab Cheikh Badji le poste d’Envoyé Spécial «C’est de la récupération-recasement- isolement»

Contrairement au poste de Premier ministre, qui est bien connu car porteur d’une politique publique plurisectorielle clairement définie, on en connait moins de celui de d’Envoyé spécial du président de la République. C’est du moins l’avis du Dr Cheikh Atab Badji, MBA en Science politique qui pense que ce poste «dont l’existence ne vaut en rien plus que son inexistence», suit une logique politique, notamment de «récupération-recasement-isolement»

«Le poste d’Envoyé spécial du Président de la République ne peut en aucun cas combler le vide occasionné par la suppression du poste de Premier ministre pour des raisons assez simples : les deux postes n’ont pas le même profil dans l’échiquier politico-administratif. L’un est acteur, porteur à un niveau tactique d’une politique publique plurisectorielle clairement définie avec une responsabilité et une certaine initiative d’action alors que l’autre est tout simplement un héraut, un porteur de message à qui il pourrait revenir tout au plus de bons offices.

Mais il est important de préciser que les termes d’une comparaison sont de très loin déséquilibrés tant qu’il s’agirait de comparer du bien connu à du peu-connu. En effet, si on connait bien à quoi renvoie le poste de Premier ministre, par contre la seule certitude à ce jour à propos du poste d’Envoyé spécial, c’est qu’on en connait moins la spécificité du contenu qui justifie sa greffe dans l’architecture actuelle.

Politiquement on est dans une sorte d’invention politique donnant une curiosité administrativo-politique, une sorte d’électron libre dans la galaxie présidentielle dont l’existence ne vaut en rien plus que son inexistence, du moins du point de vue administratif, sachant que politiquement il s’agit d’une opportunité de création de poste à pouvoir et dont la pertinence peut être discutable. Quoiqu’il en soit, la création de ce poste atypique dans notre paysage actuel n’est pas gratuite et obéit forcément à une certaine logique politique, tout au moins de récupération-recasement-isolement.

Par ailleurs, vu que le poste d’Envoyé spécial présente à priori la consonance d’un ambassadeur spécial voire circonstancié de monsieur le Président de la République auprès de cibles spéciales pour des circonstances ou mobiles spéciaux exige, à défaut d’un profil panoramique, des profils variables selon les spécificités de chacun de ces facteurs (circonstanciel ou humain), la question légitime qu’on peut se poser, est que ne risque-t-on pas d’aller à long terme vers un collège professionnalisé d’Envoyés spéciaux de son Excellence Monsieur le Président de la République à côté des classiques

Sud Quotidien

Saphiétou Mbengue
Up Next

Related Posts