Mamadou Yaya Diallo, Pr à l’UCAD, spécialiste en droit international : « Évoquer la grâce dans le cas Habré est inapproprié »

En marge du débat public organisé par le Consortium de sensibilisation sur les Chambres africaines extraordinaires (CAE), en partenariat avec l’Institut des Droits de l’Homme et de la Paix (IDHP), sur le thème : « Procès de M. Hissein Habré devant les CAE : un verdict très regardé en Afrique », Mamadou Yaya Diallo, professeur à l’UCAD et spécialiste en droit international estime que c’est inapproprié de parler de grâce présidentielle parce que c’est un procès international dont le Sénégal ne fait qu’abriter.

Selon Pr. Diallo, c’est un procès important pour assurer la protection du droit public au nom d’une certaine élite. Il estime que la décision rendue par les chambres est historique dans l’histoire judicaire africaine, c’est une décision qui montre que l’Afrique peut être dotée de juridictions capables de juger les africains comme les tribunaux internationaux.

C’’est une décision qui témoigne de la place grandissante qu’occupe aujourd’hui les droits de l’homme à la vie des africains, une décision salutaire qui apparaît comme une épée de Damoclès suspendu au dessus de la tête des dirigeants politiques, des présidents, des ministres.

« Si on parle de grâce, en réalité la grâce, mesure qui met fin une peine en cours d’exécution. La grâce est une prérogative présidentielle, on retrouve la grâce dans la constitution. Evidement, il n’y a de grâce dans le droit international, il n’y a pas de droit international prévoyant la grâce, c’est-à-dire la grâce ne peut être mise en œuvre que par le président de la république, hors c’est un procès international et non un procès du Sénégal, l’évocation de la grâce dans le cas Hissein Habré, c’est inapproprié parce que ce n’est pas un procès pour le Sénégal, c’est un procès que le Sénégal a abrité mais c’est un procès international et de ce point de vue, je ne vois pas juridiquement comment le président de la république du Sénégal peut accorder un droit de grâce à un détenu qui était condamné pour des crimes non des crimes de droit commun mais des crimes internationaux », a tenu à préciser Pr. Mamadou Yaya Diallo.
Quant à Mme Martien Schotsmans, juriste et directrice de RCN Justice et Démocratie, membre du consortium de sensibilisation sur les CAE, elle estime que la responsabilité directe de Hissein Habré a été retenue.
« Habré avait le contrôle de tous ses services. Il les donnait des ordres d’arrestation, il leur ordonnait des exécutions. Il a commis des actes de viol lui-même. Il avait le contrôle de tous les services qui faisaient ces crimes. Sa responsabilité comme supérieur hiérarchique est retenue », martèle le juriste Martien Schotsmans.
Le juriste souligne que Hissein Habré s’est fait acclamé à l’audience par ses supporters et il n’a fait aucun effort pour répondre aux questions de la cour.

Répondant à la question : « Les attentes des Tchadiens : après 25 ans de lutte pour un procès, ont-elles été comblées ? », M. Gilbert Maoundonodji, docteur en sciences politiques et responsable au Tchad de la mise en œuvre de la sensibilisation sur les CAE, estime que Hissein ne devrait pas être seul devant les CAE car il y a des co-auteurs qui ont été identifiés. Il précise que les attentes des tchadiens sont comblées partiellement et Habré ne devait être jugé seul et il y a des membres de la DDS qui occupent aujourd’hui des postes dans l’administration tchadienne.

Saër DIAL

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