Le coup de semonce des Patriotes (Par Mangue Sène-Pastef Italie)

Il y a deux ans, 14 personnes sont mortes dans des émeutes qui ont éclaté à la suite de l’arrestation du député et leader de Pastef-Les Patriotes, Ousmane Sonko. Ces martyrs, tous des jeunes, se sont dressés contre les forces de l’ordre pour défendre un homme, mais également pour protéger un projet noble, cher à nous tous : rendre au Sénégal (et à l’Afrique) sa liberté et sa dignité.

De 2012 à aujourd’hui, plusieurs Sénégalais ont perdu la vie dans des manifestations où ils exigeaient plus de liberté, de démocratie et de justice sociale. Au regard de la lourde situation sociopolitique que nous vivons, notre pays risque, hélas, de plonger de nouveau dans l’engrenage des violences pré et post électorales aux conséquences imprévisibles.

Depuis une décennie, les avancées démocratiques acquises de haute lutte n’ont cessé de s’effriter. Le recul démocratique qu’a connu notre pays est indéniable : des élections dans lesquelles sont écartés de sérieux prétendants, intimidations ou arrestations tous azimuts d’opposants ou de toute voix discordante, interdictions de manifestations…Le tableau qu’offre la démocratie sénégalaise est bien sombre pour un pays qui, naguère, était une vitrine démocratique. Cependant, cet état de déliquescence de notre démocratie est loin d’être fortuit ; il est en effet l’aboutissement d’un processus de mise au pas et d’instrumentalisation de nos institutions, notamment la justice.

Dans une véritable démocratie, la séparation des pouvoirs doit être une réalité palpable. « L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais des institutions fortes », a dit B. Obama. Au Sénégal, depuis l’avènement de l’actuel régime, les autres pouvoirs sont inféodés à l’exécutif qui règne en maître absolu. Le chef de l’État ne cesse d’instrumentaliser la justice et les forces de l’ordre pour traquer et réduire au silence nombre d’opposants et de voix critiques. Dans l’espace public sénégalais, Ousmane Sonko a été, sans aucun doute, le plus attaqué et le plus diffamé de tous les hommes politiques.

La traque commence le 29 août 2016 quand l’actuel chef de l’État signe, à l’encontre d’Ousmane Sonko, un décret de radiation de la fonction publique pour « manquement à l’obligation de discrétion professionnelle ». Le seul tort du futur député était de dénoncer la concussion, les prévarications et toutes ces mauvaises pratiques dans la fonction publique qui font le lit de la mal gouvernance. Le patriote en chef subira d’autres épreuves, les unes plus viles que les autres, car il sera régulièrement calomnié et diabolisé, étant tour à tour traité de salafiste, de rebelle ou même de terroriste.

Pastef-Les Patriotes non plus ne sera pas épargné par cette méthodique entreprise de démantèlement. La nuit du 23 au 24 janvier 2019, des nervis armés font irruption dans le siège du parti et détruisent tout sur leur passage : équipements informatiques et mobilier de bureau. Le 6 octobre 2018 à Keur Massar, Mariama Sagna, une militante, sera sauvagement tuée après un meeting. En septembre 2018, un élément de la gendarmerie nationale se présente au domicile familial du président de Pastef pour récupérer des fiches de parrainage. En janvier 2019, à quelques encablures de l’élection présidentielle, des journaux sénégalais révèlent que Tullow Oil avait versé 195.000 dollars à Ousmane Sonko pour financer sa campagne. La compagnie pétrolière ne tardera pas à démentir l’ « information » qui en réalité était une infox.

Le comble de l’infamie sera atteint le 2 février 2021 quand une employée d’un salon de massage accuse le président de Pastef de viol et de menaces de mort. La justice le convoque, sans qu’au préalable ses collègues députés ne lèvent son immunité parlementaire. Ce sera le début de plusieurs jours d’émeutes sanglantes avec 14 morts, près de 600 blessés et des dégâts matériels incalculables.

Depuis sa naissance en 2014, Pastef-Les Patriotes n’a cessé d’être la cible d’attaques de toutes sortes ; son président et ses militants sont régulièrement stigmatisés et accusés d’entretenir un discours violent et haineux dans les réseaux sociaux et l’espace public. Le dénigrement et la diabolisation se sont multipliés lorsque l’oligarchie en place s’est aperçue que Pastef constitue une réelle menace pour la pérennisation du système fait de corruption, de prébendes et de pillage en règle de nos ressources naturelles et deniers publics.

Dès lors, les agressions contre le leader de Pastef ne sont plus uniquement verbales. Ils ont mis en place une véritable stratégie de liquidation politique, sociale, morale, voire physique d’un homme qui est davantage considéré comme un dangereux ennemi qu’un opposant.

Toutes les manœuvres machiavéliques orchestrées contre Ousmane Sonko se sont avérées vaines et contre-productives puisque l’estime et le succès acquis par Pastef et son leader auprès des populations se sont accrus au fil du temps. En termes de vote, la progression du parti est fulgurante, passant de 37.535 voix aux législatives de 2017 avec 1 député (coalition Ndawi Askan Wi) à 1.071.139 voix avec 56 députés aux dernières législatives de juillet 2022 (coalition Yewwi Askan Wi). Les élections locales de janvier 2022 ont été tout aussi satisfaisantes avec un nombre conséquent d’élus locaux. Lors de l’élection présidentielle de 2019, la coalition Sonko Président est arrivée troisième avec 687.523 voix, soit 15.67 % des suffrages exprimés.

Pastef-Les Patriotes et son leader cristallisent les espoirs de toute une nation, notamment parmi les plus jeunes, ce qui constitue un motif supplémentaire d’inquiétude et de désarroi pour des politiciens qui cherchent à se maintenir à tout prix au pouvoir. Dans cette logique de conservation du pouvoir, ils useront de tous les procédés, légaux et illégaux, pour éliminer un adversaire politique. Le seul dessein (inavouable) du pouvoir en place est d’empêcher, par tous les moyens, Ousmane Sonko de participer à l’élection présidentielle de 2024. Pour y parvenir, tous les leviers, notamment judiciaires, seront actionnés pour évincer le président de Pastef-Les Patriotes, qui est l’adversaire le plus redouté par un régime aux abois. En ce sens, la machine judiciaire a été mise en branle pour enclencher deux procédures judiciaires contre Ousmane Sonko.

L’affaire Sweet Beauty, un dossier aussi vide que grotesque, qui aurait dû être classée sans suite à l’issue de l’enquête préliminaire, vient de faire l’objet, de la part du juge d’instruction, d’une ordonnance de renvoi devant la chambre criminelle. La seconde affaire, sur la base d’un rapport de l’Igf, concerne un détournement de 29 milliards au Prodac. Le mis en cause a réfuté toute accusation avant de porter plainte contre Ousmane Sonko pour « diffamation ». À chaque fois qu’un opposant a maille à partir avec la justice, le parquet fait preuve d’une diligence et d’une fermeté suspectes.

La mission de la justice, entre autres, est de garantir le respect des droits de chaque citoyen et de trancher, en toute impartialité, les conflits entre les personnes. L’autorité judiciaire, pour être forte et indépendante, doit s’affranchir de la tutelle du pouvoir exécutif afin de ne plus subir aucune pression, ni de recevoir d’ordre venant d’en haut lieu. Au demeurant, la justice, de par sa posture souvent tendancieuse, donne raison aux nombreux citoyens qui la soupçonnent d’être le bras armé de l’exécutif. Ce qui est à l’origine de cette attitude de défiance, voire de révolte à son égard surtout lorsqu’il s’agit d’un procès aux relents politiques. Car, chacun le sait, les deux procès qui attendent le leader de Pastef sont d’abord des procès politiques. Or, un procès politique se gagne dans la rue et au niveau de l’opinion nationale et internationale.

C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre le premier jalon posé avec la manifestation monstre de Keur Massar, le 22 janvier dernier. Cette démonstration de force est un coup de semonce des Patriotes et de toutes les personnes assoiffées de paix et de justice. Nous n’avons pas d’autre choix : Gatsa ! Gatsa ! C’est désormais le mot d’ordre et le cri de guerre à assimiler si nous ne voulons pas mourir en tant que parti, mais aussi en tant Patriotes. D’autant que la résistance est un droit inaliénable inscrit dans notre constitution.

« Tous les peuples du monde qui ont combattu pour la liberté ont finalement éteint leurs tyrans », dixit Simon Bolivar. Plus qu’un droit, la résistance est devenue un devoir pour tout citoyen épris de démocratie et d’équité sociale. Ce qui est en train de se passer au Sénégal est une tyrannie inacceptable et il nous appartient d’y faire face avec courage et détermination.

Mangue Sène, Pastef Les Patriotes Italie

Pastef Rome/Lazio

Saphiétou Mbengue
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