Guinée Bissau : La force militaire de la CEDEAO de retour suite à la tentative de coup d’état *Par Paul Ejime

Les dirigeants de la CEDEAO ont terminé jeudi leur sommet extraordinaire à Accra, au Ghana, ordonnant le retour d’une force militaire régionale en Guinée-Bissau pour aider à stabiliser la situation après la tentative de coup d’État sanglante du 1er février contre le gouvernement du président Umaro Sissoco Mbalo.

 

Un nombre non divulgué de personnes sont mortes dans le long échange de coups de feu près du siège du gouvernement à Bissau, la capitale nationale, alors que le coup d’État manqué se déroulait.

 

Lors de sa prise de fonction en 2020 après un scrutin contesté, le président Mbabo aurait demandé le départ de la force de la CEDEAO en Guinée Bissau, ECOMIB.

 

La force, qui a été déployée à la suite d’un précédent coup d’État en 2012, a finalement quitté le pays en septembre 2020.

 

Le communiqué de sept pages du Sommet extraordinaire, le deuxième en moins d’un mois par les dirigeants de la CEDEAO, a condamné la tentative de coup d’État et a promis le soutien de l’organisme régional au rétablissement de l’ordre constitutionnel en Guinée-Bissau et dans trois pays sous régime militaire de la région – Mali, Guinée et Burkina Faso.

 

Aucun calendrier n’a été donné pour le déploiement de la nouvelle force en Guinée-Bissau, qui reste dans l’incertitude politique avec le trafic de drogue comme un autre problème national majeur.

 

La CEDEAO a utilisé la force militaire dans le passé pour renforcer la sécurité dans la région en commençant par l’ECOMOG, qui a facilité la fin des guerres civiles au Libéria et en Sierra Leone dans les années 1990 et au début des années 2000.

 

L’organisation régionale est censée avoir une force en attente, mais la mobilisation et le financement des troupes sont des défis majeurs.

 

En outre, dans le communiqué du sommet d’Accra, les dirigeants régionaux ont convenu de renforcer la force de la CEDEAO en Gambie, l’ECOMIG, déployée au lendemain de l’élection présidentielle contestée de décembre 2016 et le refus de l’ancien président Yahya Jammeh, désormais déchu et exilé, de concéder sa défaite à la le président sortant Adama Barrow.

 

Pendant ce temps, une action en justice intentée par les opposants au président Mbalo à propos de l’élection présidentielle de 2019 en Guinée-Bissau est pendante devant le tribunal communautaire de la CEDEAO à Abuja. Ils l’ont accusé d’avoir organisé « un coup d’État » en assumant la présidence sans que la Cour suprême certifie les résultats du scrutin.

 

Lors de leur réunion à Accra, les dirigeants de la CEDEAO ont également confirmé la suspension du Burkina Faso et « sous réserve de sanctions », ont exigé la libération sans condition du président Roch Marc Christian Kaboré, renversé par un coup d’État militaire le 24 janvier.

 

Deux délégations distinctes de chefs militaires de la CEDEAO et une équipe CEDEAO-ONU se sont rendues au Burkina Faso pour des entretiens avec la junte dirigée par le lieutenant-colonel Henri-Paul Damiba.

 

Le communiqué indique également que la réunion a décidé de maintenir les sanctions paralysantes controversées imposées au Mali, et a appelé les militaires dominés par le Col Assimi Goita l’administration intérimaire de proposer un calendrier de transition plus court, différent du programme quinquennal qui a précipité le blocus sans précédent de la CEDEAO sur le Mali.

 

Les relations diplomatiques entre le Mali et la France, l’ancienne puissance coloniale de ce pays, se sont depuis détériorées, la junte de Bamako ayant expulsé l’ambassadeur de France au Mali Joël Meyer suite aux propos récents du ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, qui a appelé le gouvernement Goita « illégitime » et ayant « perdu le contrôle ».

 

La CEDEAO s’est jointe de manière controversée à la France, qui réduit ses propres forces au Sahel, y compris au Mali, pour condamner la présence de militaires privés russes au Mali, une décision que les analystes ont qualifiée de contradictoire et d’ingérence.

 

Le communiqué a réitéré la suspension de la Guinée par la CEDEAO et les sanctions ciblées contre la junte dirigée par le colonel Mamady Doumbouya. Il s’est félicité de la formation d’un Conseil de transition annoncée récemment par la junte, mais a exigé un calendrier pour le retour à un régime civil.

 

Les dirigeants régionaux ont également réitéré leur précédente directive à la Commission de la CEDEAO d’accélérer l’action sur l’amendement du Protocole additionnel régional de 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance, qui prescrivait la tolérance zéro pour prendre ou conserver le pouvoir par des moyens anticonstitutionnels.

 

Pendant trop longtemps, l’interprétation du protocole a semblé avoir mis l’accent sur les coups d’État militaires, avec peu ou pas d’attention accordée à d’autres violations de l’instrument, telles que la modification flagrante des constitutions nationales pour l’allongement des mandats, le trucage des élections et les violations des droits de l’homme par des responsables politiques. dirigeants de la région.

 

Pour que tout amendement au protocole ait un sens, il faut qu’il y ait des dispositions pour mettre fin aux «coups d’État constitutionnels et politiques», et avec un mandat présidentiel expressément limité à deux mandats.

 

Plus important encore, le simple fait de mettre en œuvre les modifications est une chose, la volonté politique et l’engagement à les mettre en œuvre ou à les appliquer au niveau national et régional en sont une autre.

 

Alors que le régime militaire reste une aberration, seule la bonne gouvernance, et non les suspensions d’États membres ou les sanctions, arrêtera les incursions militaires croissantes en politique pour la consolidation de la démocratie dans la région.

 

Il est également impératif que la CEDEAO et les autres médiateurs recalibrent leurs stratégies d’intervention pour garantir des engagements constructifs, inclusifs et axés sur les résultats avec tous les segments de la société dans les États membres en difficulté.

 

Pour des résultats efficaces dans la gestion et la résolution des conflits, les négociations et les médiations doivent être fondées sur l’honnêteté, la bonne foi, l’impartialité, la cohérence, la flexibilité et dépourvues d’influences extérieures et au profit du collectif, en particulier des citoyens qui souffrent depuis longtemps.

 

*Paul Ejime est analyste des affaires mondiales et consultant indépendant en communications stratégiques d’entreprise, paix et sécurité et élections.

 

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