La loi sur le domaine national de 1964, communément appelée la loi de Senghor, la terre appartenait à la nation. C’était parti de notre conception négro-africaine qui voulait que chacun profite de la terre aussi bien que les ancêtres que les générations présentes et futures. Mais, avec l’avènement de l’agro-industrie au Sénégal, certaines collectivités territoriales se sont retrouvées avec d’énormes difficultés pour mettre la main sur leurs terres. Raison de plus pour les acteurs de plaider pour une meilleure application de la loi sur le domaine national.
La thématique de la gouvernance foncière qui est d’actualité dans ce pays, a été le samedi dernier à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) dans toutes les lèvres lors d’un colloque sur « la gouvernance foncière dans les collectivités territoriales au Sénégal ». Une occasion pour les théoriciens et praticiens du droit et administration des collectivités de s’illustrer par des argumentaires très clairs pour le bonheur des populations, comme c’est le cas du Collectif pour la promotion du droit et administration des collectivités territoriales (Cpdact), constitué de groupe d’étudiants et professionnels spécialisés en droit, qui est l’initiateur de cette rencontre.
De grands noms de l’administration sénégalaise ont pris part à ce grand rendez-vous, comme le Procureur Birame Séne, l’ancien gouverneur, le professeur Léopold Wade, le professeur Abdoul Wahab Ndiaye et tant d’autres. Le professeur Amsatou Sow Sidibé modératrice de cette activité, est allée droit au but, en démontrant que la gestion qui est faite aujourd’hui de la terre au Sénégal est largement insuffisante. « C’est une gestion qui crée énormément de difficultés aux Sénégalais. Ce que l’on observe aujourd’hui c’est une boulimie foncière de la part de certains acteurs qui fait que les crises ne sont pas à écarter », a –t-elle déclaré, tout en rappelant que la crise casamançaise est partie de la gestion des terres. Selon lui les Sénégalais sont amnésiques du fait que dans la loi sur le domaine national de 1964 (Loi de Senghor), la terre appartenait à la nation.
« Nous avons tout en place pour que ces crises soient ressuscitées partout dans le Sénégal parce que le droit à la terre n’est un droit vécu par une grande partie de la population. Ce sont les plus riches et les étrangers qui prennent les terres du Sénégal. Et cela pose problème pour les générations présentes, mais surtout pour les générations futures que vont devenir nos enfants », a réitéré Pr Amsatou Sow Sidibé. Avant de se questionner « Est-ce qu’ils vont avoir des terres quand des centaines et des milliers d’hectares sont exploités par un petit groupe, un noyau en faisant du reste de la population des ouvriers agricoles ». Raison de plus pour ce colloque d’apporter des réformes nécessaires pour que cette loi sur le domaine national fasse l’objet de la meilleure application possible. « Les personnes qui sont riches s’arrangent les terres au détriment de la majorité », a-t-elle insisté.
Dans cette gouvernance foncière, dira Mme Amsatou Sow Sidibé, les femmes souffrent de « discrimination notoire » et « fâcheuse » en matière d’octroie de terres. « Elles sont les principales personnes discriminées dans l’attribution des terres du fait de certaines traditionnelles ou elles sont étrangères dans un endroit. Mais pour les collectivités, cette dernière d’aller plus loin en faisant comprendre que dans la distribution pratique, il y a une mentalité de discrimination qui fait que quand les femmes ne doivent pas avoir accès à la terre. Ce qui est un problème majeur pour le développement économique. Ainsi, pour apporter une solution à cette problématique, cette dernière de proposer une meilleur gestion au niveau des collectivités territoriales. « Il faut que les autorités compétentes veillent à ce que la loi sur le domaine national profite à chacun, en mettant un terme sur la privatisation sauvage des terres du domaine national qui appartiennent à la communauté. « Elles sont nationales et n’appartiennent pas à l’État dans les règles de la loi de 1964 sur la question foncière. Donc il faut au niveau de l’administration territoriale qu’on reprenne les textes, la loi et les décrets d’application et que les populations se l’approprient, tout en connaissant leurs droits. Il faut appartenir à la collectivité pour avoir accès à la terre et non des personnes étrangères à cette collectivité », a-t-elle précisé.