Gambie : vers la libération prochaine de certains membres de l’escadron de la mort de Jammeh

Certains anciens membres du tristement célèbre escadron « de la mort » de l’ex-président Yahya Jammeh sont sur le point d’être relâchés après avoir reconnu leur rôle dans de nombreux meurtres à travers le pays.

Le terme Jungler est entré dans la conscience nationale gambienne au début des années 2000, facilitant ainsi la formation d’un groupe qui finira par semer la terreur dans le cœur des citoyens, nous renseigne l’agence APA.

Depuis le démarrage en juillet dernier des audiences de la Commission vérité, réconciliation et réparation (TRRC), les anciens membres qui se sont succédé à la barre ont reconnu leur rôle dans la litanie de meurtres commis entre 2003 et 2016, après que Jammeh a perdu le pouvoir par les élections.

Comme l’ont déclaré les témoins devant la TRRC, les Junglers étaient directement sous le contrôle de l’ex-dictateur, en exil aujourd’hui en Guinée-Equatoriale. Sous son autorité, les Junglers éliminaient systématiquement tous ses ennemis, réels ou imaginaires, pendant plus d’une décennie.

L’opinion publique gambienne croyait que les Junglers étaient sortis de leur boîte lors de la grande purge de 2006, à la suite d’un coup d’Etat auquel  Jammeh a survécu.

Composée de gardes présidentiels triés sur le volet et de quelques soldats des Forces armées gambiennes, cette présumée machine à tuer a vu le jour en même temps qu’un groupe parallèle appelé simplement l’Equipe de patrouilles dont la tâche initiale consistait à parcourir la frontière et à lutter contre les crimes et le terrorisme transfrontaliers.

Dans les années qui ont suivi, les deux groupes ont fini par fusionner en une seule entité sous le nom de « Junglers ». Ils ont rapidement acquis cette notoriété qui faisait d’eux une machine à tuer impitoyable, éliminant les opposants politiques de Jammeh, notamment des hommes politiques locaux, des journalistes, des agents du renseignement, des étrangers et même des chauffeurs de taxi.

Comme au temps de la terreur en Ouganda sous le règne d’Idi Amin, les Junglers traquaient, filaient, attiraient ou piégeait leurs victimes dans des endroits où elles seraient neutralisées sans attirer beaucoup d’attention sur leurs actes ou sur eux-mêmes.

Ils portaient en leur sein des noms qui faisaient frémir de peur de nombreux Gambiens. Il s’agissait notamment des regrettés Tumbul Tamba, Sanna Manjang et Musa Jammeh, ce dernier plus connu sous le nom de Malyamungu, du nom du bourreau en chef d’Amin Dada.

Selon des témoignages devant la TRRC, l’une des premières victimes des Junglers était le propriétaire et rédacteur en chef d’un journal, Deyda Hydara, qui a été abattu en décembre 2004 alors qu’il était au volant de sa voiture par des hommes à bord d’un autre véhicule.

Malick Jatta, un ancien membre de l’escadron de la mort, a déclaré à la Commission que les assassins avaient effectué quelques opérations de reconnaissance sur Hydara. Ils avaient ensuite suivi sa voiture à l’aide d’un taxi utilisé pour l’opération en vue de le descendre.

Leur proximité avec le pouvoir a permis aux assassins de disposer facilement des preuves voulues, comme le taxi utilisé lors du meurtre de Hydara, qui n’a jamais été retrouvé.

Omar A. Jallow, un ancien assassin qui a avoué avoir participé au massacre de 48 personnes, pour la plupart des civils, a déclaré devant la TRRC que l’escadron de la mort comptait généralement en son sein au moins 30 membres en tout temps.

Il n’y avait pas de critères établis pour la sélection des membres de l’escadron, ce qui signifie que ces derniers étaient choisis au hasard par les dirigeants qui devraient avoir leurs propres normes pour le recrutement des futurs Junglers. Le premier rituel pour tout Jungular consistait à jurer de faire preuve de discrétion et de garder le secret sur les activités du groupe.

Toutes leurs activités seraient commanditées par Yahya Jammeh, qui donnerait des ordres par l’intermédiaire du chef des Junglers, Nuha Badjie, un suspect qui aurait déjà fui le pays.

Selon Omar A. Jallow, la deuxième cuvée de Junglers a été formée en 2004, une année caractérisée par des incendies criminels contre de journalistes, des assassinats, des tentatives d’assassinat et des enlèvements. Leur mode opératoire consistait à agir dans le plus grand secret, les Junglers n’étant même pas autorisés à partager entre eux des informations ou des points de vue.

L’ancien Jungular Jalllow a déclaré avoir utilisé différentes méthodes pour tuer ses victimes, notamment par strangulation ou suffocation, comme ce fut le cas pour l’ancien allié de Jammeh, Baba Jobe.

Selon l’ex-Jungular Amadou Badjie, la torture était un moyen de soustraire des informations ou d’obliger les victimes à reconnaître des actes qu’elles n’auraient peut-être même pas commis. Comme leurs homologues d’autres régions du monde, les Junglers étaient généralement de grands consommateurs de drogues et d’alcool.

Alors que certains d’entre eux tels que Malick Jatta, Omar A. Jallow et Amadou Badjie sont en détention et pourraient être libérés, d’autres comme Sanna Manjang, Michael Sang Correa, Muhammed Sambou et Paul Bojang sont toujours en fuite.

Source APA

Pape Ismaïla CAMARA
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