Etats-Unis : La mort d’un juge enflamme la tension entre démocrates et républicains

Le juge américain Antonin Scalia est décédé samedi 13 février, à l’âge 79 ans. Durant trois décennies et jusqu’à sa mort, il a incarné à la Cour suprême les thèmes les plus chers de l’Amérique conservatrice, en matière de famille (il était fermement opposé à l’avortement et l’union homosexuelle), de religion (c’était un catholique traditionnaliste), ou de maintien de l’ordre (partisan du port d’arme).

Si son nom résonne comme celui du pilier conservateur du Temple du droit américain, il pourrait bien devenir celui d’une nouvelle polémique entre le président démocrate Barack Obama et le Congrès républicain. Et ce en pleine campagne pour l’élection présidentielle.

Quelques heures après l’annonce de la mort du juge Scalia, Barack Obama a salué un « homme remarquable », un « juriste brillant » qui a « consacré sa vie à la pierre angulaire de notre démocratie, l’Etat de droit ». Il a ordonné que les drapeaux soient mis en berne dans tout le pays jusqu’à la fin des funérailles.

Mais dans son allocution solennelle depuis son lieu de résidence en Californie, le président des Etats-Unis s’est engagé à « remplir [ses] responsabilités constitutionnelles » pour désigner un successeur au juge Scalia.

La fin du mandat de Barack Obama est prévue pour le 20 janvier 2017. Sauf qu’en tant que président des Etats-Unis, c’est lui qui nomme à vie les neuf juges de la Cour suprême et il revient au Sénat de confirmer ces nominations. Or, le processus pour désigner et confirmer un nouveau juge risque d’être ardu en moins d’un an, surtout face à un Congrès contrôlé par les républicains.

Lors d’un débat télévisé samedi soir, tous les candidats à l’investiture républicaine en vue de la présidentielle de novembre ont appelé le Sénat à bloquer toute nomination par Barack Obama d’un nouveau juge à la Cour suprême.

Dès l’annonce du décès d’Antonin Scalia, le chef de la majorité républicaine au Sénat Mitch McConnell a averti qu’il reviendrait au prochain locataire de la Maison Blanche de désigner un remplaçant. A ses yeux, « le peuple américain doit avoir son mot à dire dans le choix du prochain juge de la Cour suprême [et] cette vacance ne doit pas être remplie avant que nous n’ayons un nouveau président ».

Au contraire, son opposant au Sénat, le démocrate Harry Reid, a réclamé une nomination « tout de suite ». Ce serait « sans précédent dans l’histoire récente de la Cour suprême d’avoir un siège vacant pendant un an », a insisté l’élu. L’ex-Première dame et candidate démocrate à la présidentielle, Hillary Clinton, a accusé de son côté les républicains de « déshonorer la Constitution ».

Cette bataille électrise la campagne américaine essentiellement parce que Baracck Obama peut ainsi modifier le rapport de force à la Cour suprême. Avec la mort d’Antonin Scalia, les juges conservateurs et les libéraux se retrouvent désormais à égalité (quatre contre quatre).

La nomination du remplaçant d’Antonin Scalia pourrait donc faire basculer durablement a plus haute instance juridique américaine dans l’un ou l’autre camp. Surtout que les juges disposent d’un rôle essentiel depuis la neutralisation des pouvoirs exécutif et législatif, avec une présidence démocrate et un Congrès républicain. C’est ainsi à eux qu’il est revenu de valider la grande réforme du système de santé voulue par Barack Obama (dite « Obamacare »).

Le candidat républicain ultraconservateur Ted Cruz ne cesse de pointer l’importance de la Cour suprême lors de ses meetings, et a donc demandé « que le Sénat fasse en sorte que le prochain président nomme un successeur » au juge Scalia.

Pas sûr que Barack Obama laisse passer cette occasion pour faire basculer l’instance du côté des libéraux.

Reste que, d’ici l’élection présidentielle du 8 novembre prochain, le décès d’Antonin Scalia risque fort de paralyser le fonctionnement de la Cour suprême, en particulier sur le rendu d’arrêts concernant des dossiers extrêmement sensibles, comme l' »affirmative action » (la discrimination positive), l’avortement ou la légalité des décrets pris par la présidence pour régulariser temporairement plusieurs millions de sans-papiers.

Source tempsreel.nouvelobs.com

Michel DIEYE

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