La tension monte en RD Congo où le dialogue politique est dans l’impasse. Les évêques, médiateurs de la crise, ont échoué à concilier majorité et opposition autour de l’accord de transition dit de la Saint-Sylvestre.
La signature de l’accord de la Saint-Sylvestre, conclu entre l’opposition et la majorité en RD Congo pour juguler une nouvelle crise politique née de la décision du président Joseph Kabila de rester au pouvoir, avait dans un premier temps suscité le soulagement et l’espoir d’une ère de stabilité. Les deux parties s’entendaient pour gouverner ensemble jusqu’à la tenue d’une nouvelle élection présidentielle fin 2017 à laquelle le président en place s’engageait à ne pas se présenter.
Mais très vite, l’enthousiasme autour de cette cogestion du pays s’est mué en un fort scepticisme face à l’enlisement des tractations sur les modalités d’application de certains points de l’accord, notamment celui relatif au mode de désignation du Premier ministre, dont il est convenu qu’il doit être issu de l’opposition.
Aujourd’hui, c’est très clairement un sentiment échec qui prédomine alors que la Cenco, la Conférence épiscopale nationale du Congo, qui avait pris la main sur la médiation, jette l’éponge après un nouveau round de négociations infructueux. « C’est quand même une déception, la façon dont se sont comportés les hommes politiques. Une déception du fait que cette classe politique n’a pas tenu compte de la misère de la population alors que les évêques se sont engagés, non pas pour faire la passe aux hommes politiques, mais plutôt pour trouver une solution qui apporterait un soulagement à la misère », a regretté le secrétaire général adjoint de la Cenco, l’abbé Nshole, lors d’un point presse mardi 28 mars relayé par RFI.
Dans un communiqué, la Cenco appelle la classe politique congolaise à prendre ses responsabilités, à « se faire violence pour se dessaisir de (ses) intérêts égoïstes afin de mettre en place le gouvernement et le Conseil national de suivi de l’accord et du processus électoral avant la fin de l’année 2017 ».
« Un accord mort-né » aujourd’hui « en état de mort clinique »
Pour Thierry Vircoulon, chercheur à l’Institut des relations internationales (Ifri) interrogé par France 24, il ne fait aucun doute que l’accord de la Saint-Sylvestre est aujourd’hui caduc : « Les partis vont dire qu’il est encore valide, qu’ils sont d’accord pour reprendre les discussions, mais c’est une politique de façade. »
« Cet accord était mort-né. C’est aujourd’hui un constat de mort clinique, malgré le volontarisme louable de la part de la Cenco, explique à France 24 Vincent Hugeux, journaliste à l’Express, spécialiste du continent africain. La Cenco a vraiment essayé de jouer rôle positif, dénué de tous calculs politiques, mais sur une base un peu candide de son aptitude à convaincre la majorité. »
L’opposition congolaise — marquée début février par la disparition de son leader historique Étienne Tshisekedi puis par des difficultés à resserrer ses rangs — et la majorité se renvoient l’échec des négociations. En attendant, la rue grogne. À Kinshasa, des manifestants se sont réunis mardi 28 mars pour exprimer leur colère devant le siège du grand parti d’opposition, l’UPDS. « La population congolaise comprend que Kabila va revenir au pouvoir, que l’opposition ne réussira pas à le faire partir », analyse Thierry Vircoulon. L’UDPS a d’ores et déjà appelé une manifestation pacifique le 10 avril en cas de poursuite du blocage des tractations.
Parallèlement, la situation sécuritaire dans le pays se détériore.
Le gouvernement congolais a annoncé mardi avoir retrouvé les corps des deux experts de l’ONU qui avaient disparus le 12 mars dans le Kasaï, dans le sud du pays, suscitant l’émoi de la communauté internationale. C’est dans cette région, agitée par la rébellion de Kamwina Nsapu, qu’une dizaine de fosses communes viennent récemment d’être découvertes, ont dévoilé nos confrères de RFI et Reuters dans une enquête commune.
Source france24.com