Depuis quelques jours, une banque congolaise semble s’attaquer aussi aux proches des lanceurs d’alerte. Le père d’un des lanceurs d’alerte, M. Gradi Koko Lobanga, qui est lui aussi un employé d’une branche d’Afriland, a été convoqué au siège de la banque le 1er mars 2021. Présenté devant les directeurs et l’avocat de la banque, et quelques « journalistes », il a été soumis à une véritable pression afin qu’il démente les propos de son fils. Cet entretien aurait été enregistré.
Il a été à nouveau convoqué le 2 puis le 4 mars 2021.
« Quand on n’arrive pas à démentir de graves accusations et qu’on ne parvient pas à réduire au silence un courageux lanceur d’alerte, on s’en prend à sa famille. Ce sont des méthodes indignes », ont déclaré William Bourdon et Henri Thulliez, respectivement président et directeur de PPLAAF.
Menaces et chantage contre les médias et les ONG
Outre ces actes de représailles, des intimidations hors-norme ont eu lieu avant les publications, afin de tenter de les annuler, et après, afin de les décrédibiliser.
Le président de PPLAAF, William Bourdon, avait indiqué à Médiapart dès juillet 2020 avoir fait l’objet d’un véritable chantage diligenté par les avocats de M. Dan Gertler, notamment en faisant planer le risque d’une campagne publique et en faisant allusion à un enregistrement effectué à son cabinet une année auparavant dans des conditions absolument frauduleuses.
William Bourdon a également été contacté à de nombreuses reprises par un média israélien, Yediot Aharonot, dans les jours précédant la publication du rapport en juillet. Ce média a fait les mêmes allégations fantaisistes mentionnées par les avocats de Gertler et certaines vidéos diffamatoires, en menaçant de publier des articles d’investigation, avant de cesser la correspondance subitement.
La veille de la publication du rapport, le 1er juillet 2020, la principale banque visée par les enquêtes, Afriland, a déposé plainte contre PPLAAF et Global Witness devant le parquet de Paris. Elle faisait suite à une menace faite par Dan Gertler par l’intermédiaire de ses avocats, notamment le cabinet londonien Carter Ruck, qui ont expressément évoqué la possibilité de déposer une telle plainte pénale, le 11 juin 2020. Cette plainte pénale reprend les principales allégations contenues dans les citations directes envoyées au siège de PPLAAF et dans le jugement du 23 septembre 2020.
Enfin, le 2 octobre 2020, plusieurs avocats connus en France pour leur prétendu engagement en faveur des droits de l’Homme ont annoncé avoir déposé trois plaintes avec constitution de partie civile en diffamation contre PPLAAF et Global Witness : Me Emmanuel Daoud (un des avocats de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme), avocat de Dan Gertler, Me Eric Moutet (ancien avocat anti-corruption et ancien membre du conseil d’administration de Sherpa), avocat d’Afriland, et Me Patrick Klugman (ancien adjoint à la Maire de Paris en charge des Relations internationales et de la Francophonie) avocat de deux personnes visées par l’enquête (MM. Elie Berros et Ruben Katsobashvili).
Ces procédures baillons ont été vivement dénoncées par 48 organisations de protection des lanceurs d’alerte et de la presse, de groupes anti-corruption et de protection des droits humains.
Journalisme d’investigation contre fausses informations en masse
Ces plaintes et ces révélations se sont accompagnées d’une campagne diffamatoire contre les deux associations et les journalistes sur les réseaux sociaux. Certains des éléments diffusés sur les réseaux sont des enregistrements que M. Gertler et ses représentants avaient menacé de publier en cas de publication du rapport.
Depuis quelques jours, une chaine Youtube qui se faisait passer pour l’organisation Transparency International, a pu diffuser des publicités payantes (elles ont été vues des dizaines de milliers de fois) sous la forme de vidéos diffamatoires et grotesques contre PPLAAF, Global Witness et les lanceurs d’alerte.
Ces attaques ne sont qu’une campagne grossière et malveillante, dont le but est de distraire l’opinion publique et d’épuiser ceux qui se battent pour l’intérêt public. La banque et les hommes d’affaires concernés sont accusés de faits extrêmement graves de blanchiment. Au lieu de répondre sur le fond aux enquêtes, des ressources considérables sont dépensées pour intimider et pour répandre de fausses informations dommageables pour l’intérêt public.
Quant aux procédures judiciaires, le but réel n’est de toute évidence pas de faire condamner des journalistes ou des associations, mais de les harceler, les pousser à l’auto-censure, de décrédibiliser leur parole et de détourner l’attention de l’opinion publique de l’extrême gravité des informations publiées.
PPLAAF reste confiante que ces révélations portant sur des faits extrêmement graves, mèneront à des enquêtes et des sanctions, montreront la nécessité de reformer le système financier congolais et international, et – surtout- encourageront d’autres citoyens congolais à dénoncer la corruption qui gangrène leur pays.
Ces attaques montrent une énième fois que de courageux citoyens congolais sont prêts à tout pour combattre la corruption et défendre les intérêts de leur pays. Ils devraient être célébrés, remerciés et non condamnés.
PPLAAF et William Bourdon ont chargé leurs Conseils d’initier toute procédure aux fins qu’il soit mis un terme à ces agissements et que les responsables de l’ensemble de ces infractions soient punis et condamnés, et ce tant en France qu’à l’étranger.