Le secteur agricole est l’un des piliers de l’économie sénégalaise, représentant environ 17 % du Produit Intérieur Brut (PIB) et employant plus de 60 % de la population active. Il joue un rôle crucial dans la sécurité alimentaire et contribue à la réduction de la pauvreté.
Toutefois, malgré son importance, la commercialisation des produits agricoles reste entravée par de nombreuses difficultés, notamment l’accès limité aux marchés, les infrastructures insuffisantes et la dépendance aux intermédiaires.
Ce document vise à analyser ces défis et à proposer des solutions pratiques pour améliorer les circuits de commercialisation des produits agricoles au Sénégal.
En faisant l’état des lieux de la commercialisation agricole au Sénégal, il est ressorti de la manière dont les circuits de commercialisation existants s’organisent
La commercialisation des produits agricoles au Sénégal s’organise à travers des circuits formels et informels. Les circuits formels incluent les marchés urbains, les exportations et les coopératives agricoles.
Cependant, une grande partie des transactions s’effectue encore dans des circuits informels, où les producteurs vendent directement aux consommateurs ou passent par des intermédiaires non réglementés. Parmi les produits agricoles les plus commercialisés figurent l’arachide, le mil, le riz, ainsi que les fruits et légumes.
Il convient de signaler que la commercialisation est également influencée par des facteurs déterminants ayant trait à l’alternance des productions, à la saisonnalité des cultures, à la périssabilité des produits frais, aux pertes et gaspillage des produits agricoles ainsi qu’à la variabilité climatique.
Les problématiques de commercialisation diffèrent également en fonction de la taille des exploitations agricoles. Dans ce cadre, les grands exploitants, regroupés notamment en organisations professionnelles et bien structurés, arrivent généralement à mieux maitriser et articuler les interactions entre la production et la commercialisation et ainsi à optimiser la valeur ajoutée de leurs produits. Ils parviennent ainsi à accéder facilement et de manière plus sécurisée au marché interne et/ou marché extérieur.
A l’inverse, les petits et moyens agriculteurs, peu organisés et insuffisamment outillés en compétences et en moyens, rencontrent régulièrement plusieurs difficultés pour écouler leurs produits. Ils sont soumis à de fortes pressions des intermédiaires entraînant un renchérissement des prix de vente au consommateur final. Par ailleurs, une réflexion doit être engagée sur les meilleurs moyens à mettre en œuvre pour rendre justice aux petits agriculteurs, particulièrement en ce qui concerne la commercialisation de leurs produits, et la lutte vigoureuse contre les spéculations et la multiplication des intermédiaires .
Les infrastructures, telles que les routes rurales et les installations de stockage, restent largement insuffisantes, entraînant des pertes post-récolte importantes et limitant l’accès aux marchés.
Concernant les acteurs de la commercialisation, faudrait noter que la chaîne de valeur agricole sénégalaise comprend plusieurs acteurs : les producteurs, les intermédiaires, les commerçants et les coopératives. Les intermédiaires, tels que les collecteurs et les grossistes, jouent un rôle central en facilitant l’acheminement des produits, mais ils augmentent les coûts et réduisent souvent les marges des producteurs, en particulier des petits exploitants.
Les coopératives agricoles, bien qu’importantes, manquent souvent de ressources et d’organisation pour négocier efficacement avec les intermédiaires et accéder aux marchés plus formels.
Cette analyse nous pousse à poser la problématique rencontrée dans les circuits de commercialisation
Plusieurs obstacles empêchent le bon fonctionnement des circuits de commercialisation :
– Dysfonctionnements logistiques : Les coûts de transport élevés et la mauvaise qualité des infrastructures limitent l’accès aux marchés.
– Manque de modernisation et de digitalisation : Les producteurs manquent d’informations sur les prix des marchés, ce qui les désavantage face aux intermédiaires.
– Insuffisance des infrastructures de stockage et de conservation : L’absence de systèmes de conservation adéquats (chaînes de froid, entrepôts modernes) entraîne des pertes importantes, surtout pour les produits périssables.
Enjeux et défis de la commercialisation agricole sont multiples
Fragmentation des acteurs et faiblesse des coopératives
Ce qui fait les petits producteurs sénégalais peinent à s’organiser pour accéder à des ressources partagées (transport, stockage, information sur les prix). Cette fragmentation limite leur capacité à négocier des prix équitables ou à maximiser leur accès aux marchés locaux et internationaux.
Cette faiblesse de la commercialisation dans les filières agricoles nous a poussé à faire l’état des lieux et du dysfonctionnements , il en est ressorti que les modes de commercialisation sont complexes et diversifiés
La commercialisation est considérée comme l’une des plus importantes étapes de la chaîne de production agricole. Elle revêt une grande importance compte tenu notamment de son rôle dans l’amélioration des revenus des agriculteurs.
En tant que réceptacle de la chaine des valeurs, la commercialisation fait appel, de l’amont à l’aval aux différents intervenants à savoir les producteurs/agriculteurs, les commerçants, les intermédiaires, le consommateur et l’Etat/ départements ministériels concernés. Par conséquent, elle a deux grands objectifs à savoir répondre aux besoins en quantité et en qualité des consommateurs et générer des profits à tous les intervenants tout au long de la filière agricole.
Pour ce faire, la commercialisation ne doit pas être réduite à un simple transfert d’un produit agricole du producteur au consommateur, mais être inscrite dans un ensemble cohérent d’activités allant de la production, la récolte, le transport, le stockage, la distribution jusqu’à la vente.
La réussite du processus de commercialisation d’un produit est tributaire également de l’intégration des exigences et droits légitimes du consommateur en termes de qualité et normes de sécurité sanitaire des aliments. Elle interpelle, de ce fait, tous les acteurs publics, privés ainsi que l’interprofession en raison de son rôle crucial dans la dynamisation du secteur agricole.
Sans oublier la pénurie d’infrastructures adaptées, les infrastructures de transport, particulièrement dans les zones rurales, sont insuffisantes. Cela affecte la capacité des producteurs à acheminer leurs produits vers les marchés urbains ou d’exportation. De plus, l’absence de chaînes de froid et de centres de stockage adaptés accentue les pertes après récolte et réduit la durée de conservation des produits.
Spéculation et poids des intermédiaires, le rôle des intermédiaires non régulés mène souvent à une hausse des prix et à une réduction des marges des producteurs. Le manque de transparence dans les prix du marché aggrave cette situation.
Il est aussi à noter que le défis pour l’exportation, des produits agricoles sénégalais font face à des barrières sanitaires et phytosanitaires sur les marchés internationaux. En outre, les producteurs peinent à se conformer aux normes de qualité exigées, limitant ainsi leur capacité à accéder aux marchés d’exportation.
A cet effet nous recommandations pour améliorer la commercialisation des produits agricoles
De renforcement des coopératives et groupements d’intérêt économique (GIE)
Il est essentiel de renforcer les coopératives agricoles pour qu’elles puissent négocier plus efficacement avec les intermédiaires et accéder aux ressources nécessaires (transport, financement). La formation des agriculteurs en gestion des coopératives, en marketing et en négociation est cruciale pour assurer leur réussite.
De modernisation des infrastructures. Des marchés régionaux modernes et des centres de stockage bien équipés, incluant des installations de réfrigération, doivent être développés pour minimiser les pertes post-récolte et faciliter l’écoulement des produits. Le renforcement des infrastructures de transport est également essentiel pour améliorer l’accès des producteurs aux marchés urbains et internationaux.
Miser sur la promotion des circuits courts et commerce de proximité pour réduire le rôle des intermédiaires, il est recommandé de promouvoir la vente directe entre les producteurs et les consommateurs à travers des marchés locaux et des coopératives. Cela permettrait d’augmenter les revenus des producteurs tout en offrant des prix plus équitables aux consommateurs.
La digitalisation des processus de commercialisation
La mise en place de plateformes numériques de vente permettra aux producteurs d’accéder directement aux consommateurs et entreprises agroalimentaires. La diffusion d’informations sur les prix et les tendances des marchés via des systèmes numériques réduira la spéculation et améliorera la transparence.
D’encourager la transformation locale des produits agricoles. Le développement d’unités de transformation locale permettra d’ajouter de la valeur aux produits agricoles et de réduire la dépendance aux exportations de matières premières. Cela stabilisera les prix et créera des emplois locaux.
Il est tout aussi nécessaire de renforcer le cadre réglementaire
Il est essentiel de mieux encadrer le rôle des intermédiaires et de mettre en place des lois pour lutter contre la spéculation sur les prix des produits agricoles. Des incitations fiscales devraient également être proposées aux entreprises investissant dans la transformation et la commercialisation des produits agricoles.
En améliorant les infrastructures, en renforçant les coopératives et en digitalisant les processus de commercialisation, le Sénégal pourrait considérablement améliorer l’accès aux marchés pour ses producteurs agricoles. Une action collective impliquant les autorités publiques, les acteurs privés et les agriculteurs est nécessaire pour surmonter les défis actuels et garantir un développement durable de la commercialisation des produits agricoles au Sénégal.
Souleymane Sène, spécialiste de la vente, du marketing opérationnel et de la distribution, responsable commercial Agro Business Senegal
Email : souleymaane.sene@gmail.com