Le candidat de Benno Bokk Yakaar qui a été choisi au bout du bout après plusieurs mois de réflexion, peine à occuper sa place. Le président qui dit toujours qu’il a les possibilités légales de faire un troisième mandat, n’avait guère pensé à un remplaçant, du moins d’un dauphin choisi pour la candidature.
En supprimant le poste de Premier ministre en 2019 après la victoire, il cherchait à faire le vide autour de lui. D’autant plus, qu’il avait, par la même occasion, écarté des personnalités de grande envergure de son parti à qui on prêtait des ambitions présidentielles. Aly Ngouille Ndiaye, El Hadji Oumar Youm, Matar Cissé et Amadou Ba ont été ainsi « écartés ».
Le dernier cité a été « migré » vers le ministère des Affaires étrangères avant d’être remplacé. Il est revenu par la grande porte en étant désigné Premier ministre. Un Pm qui a longtemps soutenu et défendu une troisième candidature crisogéne de son président. Un Pm qui n’inaugure même pas les chrysanthèmes. Un fusible peu visible qui est loin de jouer les premiers rôles.
En réalité, Ba semble maîtriser Macky en faisant ce qu’il veut même s’il n’y croit pas. Difficile de le prendre à défaut. Il a beaucoup manœuvré pour être au-devant de la scène sans vraiment se « mouiller ». Quand l’heure du choix a sonné, il s’est imposé. Macky a été dans l’obligation de faire de lui le candidat de la coalition Benno Bokk Yakaar à la présidentielle du 25 février 2024. Sans grand enthousiasme. Pas d’insistance sur ses qualités, ses points forts, les raisons de son choix.
Dés lors, les défections dans les rangs du parti comme celles d’Aly Ngouille Ndiaye, de Mameboye Diao, d’Abdoulaye Daouda Diallo (qui revient sans grand enthousiasme, entrent manifestement dans une logique clairement indiquée. Ba n’a pas toute la confiance du chef. Un candidat par défaut pour espérer garder le pouvoir ? Le temps passe, l’élection se rapproche, la tension déjà vive, monte, les incertitudes s’amoncellent. Et Ba ne met pas en confiance le régime. Celui-ci continue de corser les dossiers des figures de Pastef.
En refusant de donner la liberté provisoire à Fadilou Keïta et à Bassirou Diomaye Faye qui croupissent en prison depuis plus de six mois, Macky sur le départ, veut s’entourer de toutes les garanties. Il ne veut donner la moindre chance au parti qu’il a dissous. Il veut ainsi aménager un boulevard à son « champion » qui ressemble fort bien à un géant aux pieds d’argile.
Affaibli par une désignation sur le tard, le candidat de Benno qui est fortement contesté à l’intérieur de son parti, n’est pas assez soutenu au sein de la large majorité présidentielle et n’est pas du tout adulé par Macky Sall qui l’à choisi du bout des lèvres masquées. Une telle situation alambiquée suscite cette interrogation pas du tout simple : que veut réellement Macky ? Un président qui a renoncé à une troisième candidature et qui manœuvre avec autant d’efforts à quelques mois de son départ, ça ne peut qu’inquiéter.
A y regarder de près, on se rend compte que Sall se perd dans ses calculs. Et les emprisonnements, l’utilisation de la justice pour des règlements de comptes politiques ne font que rendre beaucoup plus remarquable son passif déjà si lourd. Et lui-même ne sait pas ce qui attend son camp au soir du 25 février 2024. Option périlleuse Le réveil pourrait être brutal pour lui et les siens si le tir n’est pas rectifié.
Les propos du ministre de la République Mbaye Ndiaye dans l’émission « Faram Facce » sur la Tfm affirmant que le pouvoir peut bien user et abuser de sa force pour réduire à néant l’opposition sont toxiques et repoussants mais ils ne surprennent pas ceux qui ont l’habitude de suivre ce politicien pleurnichard, peu charismatique.
Lors des élections locales de 2014, il avait clairement demandé à Khalifa Sall alors maire de Dakar, de renoncer à sa candidature pour permettre au candidat du pouvoir de prendre sa place. Khalifa n’obtempéra pas, participa, gagna. Il ne géra pas. Macky lui a mis les roues partout.
Amadou Ba son actuel candidat alors ministre de l’Économie et des finances, avait complètement refusé un emprunt obligataire qui devait complètement changer le visage de la capitale sénégalaise. Accusé de détournements, l’édile de Dakar est envoyé en prison. Il perd sa mairie et son poste de député.
Un triomphe pour Ndiaye ? Un petit triomphe car il n’a pas empêché le camp de l’ennemi à abattre de rester maître de Dakar jusqu’aux locales dernières qui ont consacré le sacre de Barthélémy Dias soutenu par la coalition Yewwi Askan Wi avec comme chef de file un Ousmane Sonko au sommet de sa gloire, de sa popularité. Il est clair donc que la force du pouvoir, des gouvernants est à relativiser. La vraie force non surfaite est du côté du peuple.
Pourtant, Mbaye Ndiaye lui-même devait en être conscient. C’est grâce à la mobilisation du peuple contre Wade qu’il se trouve là où il est aujourd’hui. La fureur de l’ex-pouvoir n’a pas résisté à la vérité des urnes et à la détermination des Sénégalais. Maintenant, s’ils comptent rester au pouvoir contre vents et marées, tout le monde connaît l’issue dangereuse d’une telle option hasardeuse.
Chronique De Mame Gor Ngom
S L’Info