Adama Lam Président de la CNES : «Nous ne pouvons pas continuer à être des sous-traitants de notre commande publique, cela doit cesser»

Président de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal (Cnes), Adama Lam a sifflé la fin du traitement réservé au secteur privé national qui l’a tiré vers le bas. M. Ba a relevé un chapelet de faits qui expliquent les problèmes majeurs dont les acteurs de la société civile sont confrontés.

«Ce qui est paradoxal, c’est que le Sénégal a été l’un des pays qui a bénéficié d’un nombre énorme d’ingénieurs dans tous les domaines dès le lendemain des indépendances. Et il n’y a pas de domaine scientifique dans le secteur du BTP où nous n’ayons pas de personnalités connues et reconnues», a indiqué M. Lam dans une discours prononcé, au cours d’une table ronde, à la Chambre de commerce de Dakar.

Ingénieur, financier, industriel et administrateur de sociétés, il s’interroge. «Je dis cela parce que je ne comprends pas que 65 ans après, on nous fasse venir des compétences étrangères pour construire des villas, pour construire des routes, pour construire des ponts».

Mieux, poursuit-il, «si 65 ans après, on fait venir par des entreprises étrangères pour construire des villages, alors qu’on a construit Sicap Liberté 1, Liberté 2, Liberté 3, je pourrais continuer. Les HLM, les sociétés d’investissement privées, il y a une aberration qui est en train de se produire dans notre pays. Il faut reconquérir ces marchés pour obliger nos partenaires de l’Etat qui sont dans la rupture à restituer le BTP aux entreprises nationales, je dirais même aux entreprises communales».

«Je ne comprends pas que 65 ans après, on nous fasse venir des compétences étrangères pour construire des villas, des routes, pour construire des ponts»

Pour les compétences, il a rappelé qu’ils étaient disponibles dans notre pays. «Les ressources humaines sont là. Les ressources techniques sont là. Les ressources financières peuvent manquer, mais la situation est aggravée par le fait que la majeure partie du financement économique de notre pays échappe en réalité à la nation».

Le président Lam trouve qu’on n ne peut pas continuer à faire de l’industrie dans le domaine du bâtiment si on n’a pas de financements adéquats. Pour les grandes entreprises, pour les plus démunis. Les petites entreprises ne peuvent pas se développer. Je pense aussi que nous ne pouvons pas continuer à être des sous-traitants de notre commande publique. Cela doit cesser».

A l’en croire, il faut une redistribution du travail, et non l’inverse. «Je ne peux pas comprendre qu’on parle simplement de contenu local dans le domaine des mines et du pétrole. Le contenu local doit être global», a confié M. Lam.

Selon ce dernier, «dans tous les secteurs, ce sont les entreprises sénégalaises qui doivent redistribuer le travail en accord avec les autorités. Nous avons les moyens, nous avons les compétences, et nous devons, si nous voulons sortir de l’emploi, retenir deux choses. L’une des niches les plus importantes où il y a de l’emploi, c’est le BTP», a-t-il noté.

Le retard des payements de leur du par l’Etat est aussi un fait condamné par Adama Lam et ses camarades. «Le financement comme nous l’avons vu ici a conduit de nombreuses entreprises à fermer boutique. Pourquoi ? Parce que les marges sont faibles, les taux bancaires sont élevés, les paiements ne sont pas effectués à temps. Pratiquement toutes les entreprises PTP mangent leurs marges bénéficiaires en payant des taux d’intérêt. Cela ne peut pas continuer à devenir un champion dans ce domaine», a-t-il indiqué.

«Dans tous les secteurs, ce sont les entreprises sénégalaises qui doivent redistribuer le travail en accord avec les autorités»

Pour lui, «la commande publique doit être payée dans des délais raisonnables ou à défaut, pour supporter les intérêts dus aux retards de paiement. 90 jours est le maximum que nous devrions pouvoir supporter dans un marché normal. Nous avons parfois des paiements qui dépassent un an», a-t-il signalé.

Cela signifie, selon lui, «qu’au bout du compte, l’entreprise ne se rétablit pas. Son bastion est bloqué et les petites entreprises ne peuvent plus se développer et sont sur la voie de la croissance pour atteindre un certain niveau. Je pense qu’il y a beaucoup de choses que nous pouvons développer dans ce domaine», a-t-il confié devant ses semblables.

«Je crois aussi à la culture de l’acceptation des ordres des représentants du gouvernement et à la critique constructive. J’ai eu le privilège d’appartenir au secteur privé et ce secteur privé a été la branche économique reçue par les autorités lors de ce basculement. Nous avons entendu le président de la République et le Premier ministre dire que tout ce qui peut être fait par des Sénégalais ne sera plus donné aux étrangers. Mais il faut être capable de respecter les contrats qui nous sont soumis», a-t-il préconisé.

Le fait d’octroyé des marchés à des acteurs qui ne sont pas du secteur ont aussi été dénoncé. «Ces contrats, en général, nous avons vu par le passé que de nombreux intervenants ne sont pas qualifiés dans le domaine des BTP. Il faudra mettre de l’ordre dans ce domaine. Les qualifications, les classements des entreprises doivent être mis à jour pour que nous sachions ce qui se passe dans le secteur des BTP. Je crois que c’est une nécessité. Le respect des normes. Nous avons vu que beaucoup de matériaux de construction entrent dans le pays sans respecter les normes».

Il y a des problèmes à regarder en profondeur dans notre secteur BTP. Il y a aussi le fait que j’ai remarqué que beaucoup d’entreprises viennent acheter des marchés chez nous alors que nous n’avons même pas la possibilité d’ouvrir des boutiques chez elles» a-t-il noté. «Ce n’est pas normal. Nous ne pouvons pas être un pays qui ouvre son marché public, son marché intérieur à des pays dans lesquels nous n’avons même pas accès à la moindre activité commerciale. Cela aussi doit être interdit».

Pour conclure, il a soutenu que «dans le cadre de notre collaboration communautaire, nous avons constaté que des entreprises de la CEDEAO accèdent à nos marchés alors que nous n’avons pas la possibilité d’accéder à leurs marchés domestiques. Il faut aussi régler cela pour que l’aspect communautaire soit une règle générale que tout le monde respecte».

Source Vox populi

Oumou Khaïry NDIAYE
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