Crise persistante à la Poste : Le SNTPT dénonce un naufrage organisé

La colère ne gronde plus, elle s’installe. Hier, les membres du Comité sectoriel Poste du SNTPT, réunis à la permanence Ousmane Camara, ont posé des mots lourds sur une réalité qu’ils jugent désormais insoutenable. La Poste s’enfonce chaque jour un peu plus dans la paralysie, sans boussole, sans moyens, sans écoute. Face au mutisme prolongé de la Direction générale et à l’inertie de l’État, le syndicat tire une énième mais pressante sonnette d’alarme.

Dans un ton grave et direct, ils dénoncent une situation de faillite progressive du Groupe La Poste, entre paralysie logistique, silence stratégique et mépris institutionnel.

«En avril 2024, la nomination du nouveau Directeur général nous avait redonné espoir. Après tant d’années de turbulences, nous avions cru à un nouveau départ. Mais aujourd’hui, plus d’un an après, il faut reconnaître que rien n’a changé, ou plutôt que tout a empiré. Il n’y a ni cap, ni vision, ni mesures concrètes. Nous avançons à l’aveuglette», soulignent-ils. Dans les bureaux, le climat est plombé par l’absence de dialogue et de ressources.

«Les agents travaillent sans fournitures, sans intrants, sans carburant, sans perspective. Même la production des bulletins de salaire est bloquée depuis octobre 2024. Le service est à l’arrêt, et personne ne nous explique quoi que ce soit. On nous laisse seuls dans le flou», déplorent-ils. Le silence de la Direction générale est au cœur des inquiétudes du SNTPT. «Ce mutisme est insupportable. Aucune information, aucun plan de redressement, aucun échange. Comment voulez-vous motiver des travailleurs plongés dans l’incertitude ?» demandent-ils.

La récente fête de la Tabaski a cristallisé la détresse sociale des agents. «Ce moment de joie a viré au cauchemar pour beaucoup. Aucune avance sur salaire n’a été versée. Résultat : des dizaines de postiers ont dû contracter des dettes à la MECAP pour pouvoir célébrer la fête avec un minimum de dignité.

C’est inacceptable pour des agents publics», disent-ils avec amertume. Plus inquiétant encore, les fonctions historiques de La Poste sont aujourd’hui menacées. «Même les paiements de masse, qui faisaient notre fierté, nous échappent désormais. Le Trésor public a lancé sa propre application. La Poste, elle, reste en marge, sans solution numérique, sans stratégie d’adaptation. Et pendant ce temps, la BCEAO facilite l’expansion du secteur privé. C’est une perte de place stratégique que nous subissons en silence», alertent-ils.

Face à cela, les membres du SNTPT exigent des actes forts. «Nous demandons la suspension immédiate des missions à l’étranger qui continuent alors que nos centres manquent de tout. Chaque franc dépensé doit désormais servir à relancer l’exploitation. Ce n’est plus une option, c’est une obligation», insistent-ils.

Ils pointent aussi la lenteur de l’État, malgré des annonces récurrentes. «On nous parle de restructuration, de fonds de relance, de comité interministériel. Mais rien ne vient. Aucun acte n’a suivi les discours. Pendant ce temps, La Poste agonise et les autorités regardent ailleurs», disent-ils d’un ton grave.

Le syndicat rappelle cependant son rôle constructif et sa volonté de participer à un redressement sincère. «Nous n’avons jamais été dans la posture. Lors du panel du 1er mai dernier sur le «NewDeal technologique», nous avons formulé des propositions réalistes pour moderniser La Poste. Mais aucune suite ne leur a été donnée. Le silence, toujours le silence», rappellent-ils.

Pour les membres du Comité sectoriel, le temps presse. «La Poste n’est pas une entreprise ordinaire. Elle est au cœur de la continuité territoriale et du service public. Si elle tombe, ce sont les usagers, les populations rurales, les fonctionnaires les plus modestes qui en paieront le prix», disent-ils avec gravité.

Et de conclure, dans un appel solennel : «Nous sommes toujours prêts à travailler, à proposer, à collaborer. Mais il faut que cela commence maintenant. Il faut que la direction sorte de son silence. Il faut que l’État assume sa responsabilité. La Poste peut encore être sauvée. Mais l’heure n’est plus aux discours. Il faut agir», affirment-ils.

Source L’As

Oumou Khaïry NDIAYE
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