Tensions migratoires en Mauritanie -Coopération ou complicité ?: L’aide européenne finance la répression, la migration devient une monnaie d’échange !

Entre la visite du président de la République en Mauritanie, les échanges au niveau de la primature et les discussions engagées par les ministres sénégalais de la Pêche et des Affaires étrangères avec leurs homologues mauritaniens, les autorités sénégalaises ont exploré tous les canaux diplomatiques pour protéger leurs ressortissants et tenter d’apaiser la crise migratoire en cours. Mais cette crise, aujourd’hui marquée par une traque systématique et des arrestations d’étrangers, notamment dans les grandes villes comme Nouakchott et Nouadhibou, suscite de vives inquiétudes.

L’argent de l’Union européenne en question !

En août 2024, l’Union européenne a promis une enveloppe de 210 millions d’euros à la Mauritanie pour renforcer le contrôle de ses frontières et freiner l’immigration dite « clandestine ». À cette somme s’est ajouté un appui complémentaire de 20 millions de dollars pour lutter contre le djihadisme au Sahel. Si la lutte contre l’extrémisme violent est unanimement saluée, Horizon Sans Frontières (HSF), organisation internationale de défense des droits des migrants, dénonce fermement la monétisation de la dignité humaine à travers ce qu’elle qualifie de nouvelle économie des migrations.

Ce mécanisme, habillé d’un discours sécuritaire souvent empreint d’amalgames, constitue une grave violation des droits fondamentaux. Pour HSF, la migration, loin d’être un péril, est une soupape de sécurité pour des États en crise, et ne saurait être réduite à un simple enjeu budgétaire.

Éviter le chaos en Afrique !

Il est paradoxal qu’un pays comme la Mauritanie, dont plus de 10 % des ressortissants vivent en Afrique à l’étranger, adopte une politique aussi répressive à l’encontre des migrants. Le pays accueille pourtant plus de 200 000 Subsahariens, soit environ 7 % de sa population, œuvrant dans des secteurs stratégiques tels que la pêche.

Par ailleurs, le Sénégal et la Mauritanie entretiennent des relations multiséculaires, culturelles et cultuelles profondes. Dans ce contexte, j’invite le président de la République du Sénégal à convoquer sans délai une conférence de haut niveau, afin de prévenir tout basculement géopolitique dans la sous-région.

Comme HSF l’a toujours recommandé, cette initiative permettrait au Sénégal d’assumer un leadership africain en proposant une nouvelle stratégie de gestion du triptyque : immigration, paix et sécurité.

L’Afrique a besoin d’unité, non de tensions. L’heure est venue de construire des perspectives communes pour faire face aux défis de la mondialisation.

Boubacar Seye
Consultant et chercheur en migrations internationales
Président de Horizon Sans Frontières

Momar Diack SECK
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