Président du Parti pour la construction etla solidarité (Pcs)/Jengu Tabax, Boubacar Camara, un des leaders de l’opposition, a théorisé hier, le report de la Présidentielle de 2024. Une proposition rejetée par le pouvoir, la société civile et même l’opposition.
Entre les deux camps, la société civile joue à l’arbitre. Babacar Fall, Secrétaire général du Groupe de recherches et d’appui à la démocratie participative et la bonne Gouvernance (Gradec) et Moundiaye Cissé Directeur exécutif de l’Ong 3D sont catégoriques : pas question de reporter la Présidentielle de février 2024. Babacar Fall :
««Cette proposition est inopportune. Quand je l’ai entendue, ça m’a fait un peu tiquer. J’ai été surpris. Qu’une telle proposition puisse émaner de la majorité présidentielle ne serait pas surprenante, mais la proposition émanant d’un responsable, l’un des plus en vue, de l’opposition me pose problème.
On a vu des situations plus difficiles et l’élection Présidentielle a toujours été marquée par des tensions, 1988, 1993 et récemment en 2012. On a vécu une situation délétère et pour autant, on n’a pas reporté les élections.
C’est vrai que depuis 2021, on a une situation politique extrêmement tendue marquée par la rupture du dialogue entre l’opposition radicale et le pouvoir. Il y a aujourd’hui l’emprisonnement de Ousmane Sonko avec la situation qu’il vit et qui est assez dramatique, mais je ne pense pas que ce soit des raisons valables qui puissent justifier le report de l’élection Présidentielle. Elle est capitale.
C’est une élection à enjeu et tous les enjeux qui s’attachent à cette élection, il faut les organiser. Le processus électoral est lancé.»
Il ajoute : «Il faut continuer le dialogue. Nous ne cessons de prêcher la libération de tous les détenus politiques. Il faut que le pouvoir montre des signes d’apaisement. Je n’ai pas souvenance qu’une élection Présidentielle ait été décalée ou même reportée. Il faut tenir ces élections à date échue afin que le prochain Président puisse s’attaquer aux défis auxquels le pays fait face. Il nous faut très rapidement dépasser le cap des élections et aller vers des réformes au plan économique et social qui permettent au pays de vivre une ère de stabilité.
La solution ne réside pas dans le report des élections. Si on reporte, d’autres types de problèmes vont encore se poser. On a toujours vécu des situations difficiles, en 1963, il y a eu les tueries des Allées du Centenaire, en 1988 lorsque Abdou Diouf traitait la jeunesse de malsaine, on a vu ce qui s’est passé à Thiès, à Dakar.
En 1993, on a eu des émeutes même en 2000, il y avait de la tension. Toutes les élections Présidentielles au Sénégal charrient des périodes de tension très fortes.» Moundiaye Cissé :
«Il faut respecter le calendrier républicain, à charge pour le nouveau Président de faire de la réconciliation une de ses priorités. On ne peut pas à quatre mois des élections parler de report. Ça va nécessiter un consensus qu’on ne va jamais trouver. Ça va polluer le débat.
Reporter cette élection peut avoir beaucoup de retombées négatives. Ce serait une première. Ce serait proroger le mandat du chef de l’Etat de quatre mois ou même de deux ans. Pour reporter l’élection, il faut le soumettre au Conseil constitutionnel et si c’est acté, il peut demander au Conseil de le faire sur deux ans ou trois ans. Travaillons à avoir des élections apaisées.
Qui a décidé que Ousmane Sonko est exclu ? Il ne faut pas s’ériger en juge. Seul le Conseil constitutionnel peut valider ou invalider une candidature. La situation politique a toujours été tendue en période pré-électorale.
Même si on reporte, il y aura toujours des contestations. La contestation est congénitale à des élections. C’est un gros risque qu’on court si on reporte les élections. Ce serait une brèche qu’on donnerait à n’importe quel président de trouver un prétexte pour proroger son mandat. On est catégorique. Pas question de reporter les élections. Le contexte a toujours été tendu. En 2019, deux candidats de l’opposition ont été écartés. Là, Ousmane Sonko n’est pas encore exclu et il n’y a que le Conseil qui peut dire que Sonko est exclu. Il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs.» La messe est dite.
Extraits de l’Obs