Me Massokhna Kane,un des avocats d’Ousmane Sonko : «Cette affaire est manifestement une commande politique»

Me Massokhna Kane, membre du pool d’avocats qui assurent la défense d’Ousmane Sonko persiste et signe que leur client n’a jamais reçu de convocation pour se présenter devant cette juridiction. Il a déploré le fait que le juge soit déterminé à vider ce dossier, aujourd’hui (23 mai). Un empressement qui traduit, à ses yeux, que «cette affaire est manifestement une affaire politique, c’est une commande politique». Surtout que, poursuit-il, «il y a des vices de forme et de fond».

«En matière criminelle, personne ne doit être jugé sans assistance d’un avocat. C’est ce que la loi prévoit. Pour ce qui concerne notre client, il n’a jamais reçu de convocation pour se présenter devant cette juridiction, c’est très clair.

Parce qu’il y a un officier de Police à Ziguinchor qui a établi un procès-verbal pour dire qu’il a trouvé Ousmane Sonko devant sa maison pour lui signifier qu’il était convoqué devant la Chambre criminelle. Et cela date du 11 mai. Il a daté son document du 11 mai, alors que c’est le commissaire Adramé Sarr de Dakar qui, le 15 mai, a constaté dans son procès-verbal qu’il était allé au domicile d’Ousmane Sonko et il ne l’a pas trouvé. Et qu’il a dû faire recours à l’assistance du commissaire de Ziguinchor, puisqu’il avait appris qu’Ousmane Sonko était à Ziguinchor.

Donc, le 15 mai, le Commissaire Adramé Sarr dit, ‘j’ai cherché Ousmane Sonko à son domicile à la Cité Keur Gorgui. Je ne l’ai pas trouvé et j’ai fait appel à mon collègue qui est à Ziguinchor pour lui servir la signification’.

Et ce Commissaire-là dit, ‘moi, j’ai vu Ousmane Sonko il y a quatre jours». Or, poursuit-il, «c’est le 15 mai qu’on l’a requis. Quand il date son document en disant que c’est le 11 qu’il a vu Ousmane Sonko, ce qui est manifestement faux, donc, voilà comment ça s’est passé. Mais, Ousmane Sonko n’a jamais reçu de convocation pour venir à l’audience. Et ça, c’est très clair. Alors, c’est pourquoi, aujourd’hui, les avocats sont intervenus», a précisé Me Kane.

 

«Les conditions de sécurité font que Ousmane Sonko n’a  pas vu venir même s’il voulait venir»

Celui-ci après avoir relevé «cet élément, cette irrégularité» a tenté de justifier l’absence de son client. «Les conditions de sécurité font que Ousmane Sonko n’a pas pu venir même s’il voulait venir. Il n’exclut pas de venir, Sonko n’a jamais dit que pour cette affaire, il n’allait pas venir s’il était régulièrement convoqué et si on avait garanti sa sécurité. Voilà la situation».

«Evidemment, les avocats ont présenté les excuses-là. Ils ont expliqué ces motifs. Donc c’est très clair. Nonobstant et contre toute attente, le tribunal a estimé devoir faire table rase à tout ça, en violation de toutes ses règles. Il s’y est ajouté que Ndèye Khady Ndiaye, elle-même, a eu des avocats comme ils l’ont expliqué, qui se sont constitués. Donc, tout devait concourir à ce que cette affaire soit renvoyée», a souligné Me Massokhna Kane. Et ce, dit-il, parce que «le Code de procédure pénale dit, «il faut au moins trois renvois. Mais alors, où est l’urgence à vouloir retenir une affaire à la première audience ? Parce que le 16 mai, c’était simplement un renvoi d’office», s’interroge-Me Massokhna Kane.

Il rappelle que «quand les avocats ont voulu parler de renvoi pour pouvoir prendre connaissance du dossier, le tribunal avait dit ‘Non on ne plaide pas sur aucun motif. C’est un renvoi d’office’. Et c’est pourquoi, aujourd’hui, les avocats ont demandé le renvoi pour prendre connaissance du dossier», signale l’avocat.

«Refuser le renvoi à un avocat qui vient de se constituer… c’est violer non seulement les droits de l’avocat, mais les droits de son client»

«Comment peut-on, même en matière correctionnelle à plus forte raison en matière criminelle, demandé à des avocats de défendre quelqu’un qui est accusé, sans que l’avocat ne soit mis dans des dispositions qu’il faut pour défendre son client, c’est-à-dire, mettre le dossier à sa disposition ? Ça, c’est impossible ! Ça, même en rêve, un tribunal ne devait penser à cela», a déclaré Me Massokhna Kane qui s’insurge contre le fait de «Refuser le renvoi à un avocat qui vient de se constituer pour qu’il puisse prendre connaissance du dossier et sans s’entretenir avec son client sur la stratégie de défense. Ça, c’est violé non seulement les droits de l’avocat, mais les droits de son client, également, qu’on a voulu jugé dans la précipitation».

A ces yeux, c’est cela qui explique la posture des conseils de la défense. «Aujourd’hui, tous les avocats se sont retirés, aussi bien les avocats d’Ous­mane Sonko que les avocats de Ndèye Khady Ndiaye. C’est parce qu’on ne les a pas mis dans les conditions qu’il faut, au minimum pour assurer la défense de leur client. Donc, devant cette situation, le tribunal aurait dû constituer d’office un ou des avocats à Ndèye Khady Ndiaye au moins. Ce qu’ils n’ont pas fait. Ils lui ont même refusé le droit de s’asseoir parce qu’elle est enceinte de 8 mois. Donc, il a fallu que tout le monde insiste pour qu’on l’autorise finalement à s’asseoir. Mais, c’est pour dire qu’en aucun cas, cette affaire ne devrait être retenue aujourd’hui», argue-t-il.

«Pourquoi cette précipitation, alors qu’il y a des centaines de dossiers criminels qui n’ont pas été enrôlés»

L’avocat souligne que c’est parce que cela concerne une personne extraordinaire que cela se passe comme tel. «Maintenant, pourquoi cette précipitation, alors qu’il y a des centaines de dossiers criminels qui n’ont pas été enrôlés ou qui sont renvoyés tous les jours ou des mois. Pourquoi cette affaire, parce que c’est une affaire particulière qui concerne un homme extraordinaire. Ce n’est pas un accusé ordinaire, ça. Je pense que tout le monde le sait. Donc, si on veut rendre une justice équitable en respectant les droits des accusés, les droits des avocats pour les défendre, on ne devait en aucun cas plaider cette affaire aujourd’hui, c’est ce qui a expliqué que les avocats sont partis».

Concernant les éventuelles conséquences de leurs sorties, il s’explique. «Le risque… de toute façon, ce n’est pas parce qu’on n’est pas présent dans la salle qu’il y a le risque. Cette affaire est manifestement une affaire politique, c’est une commande politique. Donc, il y a des vices de forme et de fond», soutient Me Kane.

 

Vox Populi

Mamadou Nancy Fall
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