«Lendemains incertains» au Groupe La Poste : Le SNTPT accuse un «Etat meurtrier et funeste»

Les postiers remettent la rengaine du désarroi qui est en train de gagner depuis des années le Groupe La Poste. Le Syndicat national des travailleurs des postes et télécommunications est sortie hier de son mutisme, à travers une note parvenue à 24 Heures, pour tirer sur la sonnette d’alarme.

«La Société Nationale La Poste est aujourd’hui, plus que jamais, confrontée à des difficultés financières et de gestion qui la précipitent, si rien n’est fait, dans une mort certaine. Cette situation, longtemps décriée par les travailleurs, a atteint aujourd’hui un niveau insoutenable qui la plonge dans une agonie douloureuse et lente. En effet, l’activité est complètement à l’arrêt avec des bureaux sevrés de clients, une trésorerie systématiquement erratique, des produits et services délaissés, des Agents désemparés, gagnés par l’angoisse des lendemains incertains…», indique le communiqué des travailleurs de la Poste. Ibrahima Sarr, le secrétaire général, et Cie de poursuivre : «Le paiement des salaires connait des retards inhabituels et la perception est un véritable calvaire, faute de liquidité dans les bureaux et agences. La Poste se meurt d’une mort vulgaire et choquante, assassinée qu’elle est par un Etat meurtrier et funeste sous les mains ensanglantées de directeurs généraux tortionnaires».

«Un solde débiteur de 174 milliards occasionné par un stock de compense de plus de 200 milliards»

Pourtant, indique-t-il, «à la lumière de la convention de dettes croisées, il ressort un solde débiteur de 174 milliards occasionné par un stock de compense de plus de 200 milliards qui n’ont absolument pas servi à La Poste et aux postiers. Cette importante manne financière qui a transité à La Poste n’a servi qu’à enrichir des Directeurs généraux cupides, charognards, parrainés par des autorités étatiques complices, si elles ne sont les véritables commanditaires. C’est à se demander si La Poste n’est pas seulement un canal de transition savamment utilisé par les autorités de l’Etat pour mieux détourner des deniers publics par le mécanisme de la compense. C’est la seule explication par rapport à un Etat qui a laissé cours pendant des années à ces pratiques de dilapidation des ressources publiques à des fins purement politiques et personnelles. Pire, pendant tout ce temps, l’Etat n’a daigné envoyer les corps de contrôle, ni sanctionner les acteurs coupables».

Menace sur 4500 pères et mères de familles….

Ibrahima Sarr et ses camarades de renchérir : «Les travailleurs que nous sommes n’accepteront jamais d’être les victimes expiatoires d’un Etat irresponsable qui sacrifie l’avenir de plus de 4500 mères et pères de familles à l’autel de caprices pernicieux d’une poignée de personnes. En effet, cette stratégie du pourrissement savamment orchestrée, avec la complicité du Directeur général, traduit la volonté de l’Etat de liquider ce patrimoine national. Sinon comment comprendre l’inertie de l’Etat, l’accumulation des dettes sur les Bourses de sécurité Familiale et la rémunération du service public, la diabolisation des opérations postales qui cachent mal des velléités de rupture unilatérale des contrats sur les paiements IPRES et les Bourses de Sécurité Familiale, l’absence de régulation du secteur (avec un foisonnement d’opérateurs irréguliers dont Dakar Dem Dikk, une concurrence déloyale, des «thiak-thiak» qui pullulent sans aucune forme d’organisation du business…), des sociétés nationales et privées qui violent allègrement le monopole du service postal réservé, le courrier de l’Etat qui échappe à l’opérateur historique, confié à des concurrents déloyaux…»..

Postefinances, la poule aux œufs d’or de la CDC

Les syndicalistes de pester : «Non satisfait de toutes ces mesures dévastatrices, qui n’ont pour dessein que d’asphyxier La Poste déjà en proie à des difficultés financières, l’Etat, par le biais de la Caisse des Dépôts et Consignations, fait main basse sur les fonds de garantie des dépôts de POSTEFINANCES d’une valeur de plus de 17 milliards. Cet argent aurait pu permettre d’alimenter le réseau du Groupe en trésorerie et de relancer l’exploitation. Autant de faits qui nous confirment que l’Etat jette les bases d’une liquidation programmée de La Poste. Qu’il se le tienne pour dit : cette stratégie funeste ne passera pas ou elle se fera sur nos cadavres».

«La Poste est un bien public, un patrimoine historique et symbolique, membre d’un réseau international (UPU), affilié à l’ONU. Au-delà de son aspect économique, elle traduit une souveraineté nationale et constitue un enjeu diplomatique important. Ainsi, elle a survécu à bien des crises par la responsabilité d’autorités conscientes des enjeux et l’application de mesures concertées», ont-ils martelé.

La valse de «Directeurs généraux pilleurs»

Et de poursuivre : «Aujourd’hui, ce qui se passe est tout autre. Au lieu de prendre des mesures conservatoires pour stopper l’hémorragie et préserver les emplois menacés, l’Etat, au premier chef duquel le Président de la République, encourage et promeut des Directeurs généraux pilleurs qui ne sont intéressés que par leur ambition politique et leur enrichissement personnel. Les pratiques de mal gouvernance et les actes de gestion gaélique, posés en toute impunité, l’attestent amplement».

Flinguant la gestion de l’actuel gestionnaire de leur boîte, ils pointent : «L’actuel Directeur général, Abdoulaye Balde, perpétue cette tendance et l’amplifie dans des proportions inédites en instituant un mode de gestion clanique, basé sur une gabegie désinvolte, où les rares ressources existantes sont consumées dans des marchés inopportuns, des activités personnelles et politiques, au grand dam de l’exploitation et des priorités de survivance.

Malgré les difficultés criardes, il poursuit le recasement de sa clientèle politique, les contrats spéciaux et onéreux au profit de sa bande de rapaces (des fonctionnaires recrutés sous contrat et reclassés à La Poste), l’utilisation des rares moyens mobiliers et financiers pour ses activités politiques, la gestion par procuration (des absences prolongées sans aucun rapport avec ses activités à La Poste), des subventions douteuses accordées à des structures fictives, la couverture (si ce n’est une complicité active) de détournements importants et connus».

Toujours selon eux, «Son attitude cynique et audacieuse nous interroge sur sa véritable mission à La Poste. Tout semble indiquer qu’il est de connivence avec l’Etat dans sa volonté inavouée de liquider l’entreprise». «Qu’il sache que les travailleurs ne se laisseront pas bernés par des mercenaires aventuriers et défendront jusqu’au dernier souffle leur outil de travail. La Poste l’a préexisté et continuera toujours à rayonner bien après son passage», ont-ils conclu.

24 Heures

Saphiétou Mbengue
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