En réponse aux nouvelles constatations alarmantes confirmant la famine dans certaines régions du Darfour, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) appelle à une cessation immédiate des hostilités et à une augmentation rapide de l’aide alimentaire, nutritionnelle et monétaire ainsi que de l’aide agricole d’urgence.
Ces mesures sont essentielles dans les zones touchées par le conflit pour répondre aux besoins immédiats et éviter que la famine ne s’aggrave et ne touche d’autres régions du Soudan, informe un communiqué de la FAO.
Le Comité d’examen de la famine de l’IPC (FRC) a conclu de manière concluante que les conditions de famine perdurent dans le camp de personnes déplacées à l’intérieur du pays (PDI) de Zamzam, qui accueille 500 000 PDI à l’extérieur de la ville d’El Fasher au Darfour.
Le Soudan est plongé dans une crise alimentaire sans précédent, avec des niveaux de faim jamais enregistrés par l’IPC dans le pays et la plus grande crise de déplacement interne au monde. Un nombre effarant de 755 000 personnes sont actuellement confrontées à des niveaux catastrophiques de faim aiguë (IPC Phase 5) – la pire forme de faim – tandis qu’un total de 25,6 millions de personnes souffrent de niveaux élevés de faim aiguë (IPC Phase 3 et plus).
« Nous sommes témoins de conditions de famine épouvantables dans certaines parties du Darfour Nord et d’un risque croissant de famine dans d’autres zones d’installation et de conflit, notamment au Darfour, au Kordofan Sud, à Khartoum et à Al Jazirah », a déclaré le Directeur général de la FAO, M. Qu Dongyu.
« Nous avons tiré la sonnette d’alarme face à cette catastrophe imminente, mais en raison du conflit en cours et de l’accès humanitaire limité, ces communautés ne reçoivent toujours pas l’aide immédiate dont elles ont besoin. Nous devons agir de toute urgence et de manière concertée pour empêcher qu’une catastrophe encore plus grave ne se produise. La famine peut être stoppée, mais la cessation immédiate des hostilités est une première étape essentielle. La paix est une condition préalable à la sécurité alimentaire et le droit à l’alimentation est un droit humain fondamental ».
Le Soudan est très dépendant de l’agriculture, près de 65 % de sa population travaillant dans ce secteur. Or, c’est ce secteur, les moyens de subsistance ruraux et les systèmes agroalimentaires qui sont en première ligne du conflit, subissant de graves dommages et perturbations, avec des conséquences en cascade inquiétantes pour la sécurité alimentaire et la nutrition.
La situation risque d’être encore aggravée par des précipitations supérieures à la moyenne et des températures supérieures à la moyenne prévues dans les États du sud et du centre du Soudan en raison du phénomène La Niña prévu pour août-septembre. Les inondations potentielles pourraient accroître le risque de pertes supplémentaires de récoltes et de bétail, tandis que l’accès humanitaire limité aggrave l’approvisionnement alimentaire et augmente le risque de famine grave, prévient la FAO.
La FAO et ses partenaires mènent des efforts multisectoriels pour empêcher une aggravation de la famine dans le pays. Si l’intensification de l’aide alimentaire et monétaire est cruciale pour les personnes confrontées à de graves pénuries alimentaires, elle ne peut à elle seule combler les lacunes causées par la baisse de la production alimentaire locale.
Pour y remédier, la FAO distribue des semences à 1,2 million de ménages agricoles pour la principale saison de plantation, qui a commencé en juin. La campagne se concentre sur la distribution de semences à environ 6 millions de personnes à travers le pays, notamment dans les régions d’Al Jazirah, du Nil Bleu, du Nil Blanc, du Grand Darfour et du Kordofan, où les niveaux d’insécurité alimentaire sont les plus élevés. Si la campagne de semences de la FAO est pleinement mise en œuvre, elle permettra aux agriculteurs de produire une récolte prévue de 2,4 à 3,6 millions de tonnes de grains de sorgho.
Les interventions essentielles dans les domaines de l’élevage, de la pêche et de la protection sociale demeurent également largement sous-financées. La FAO fournit des services vétérinaires essentiels et prévoit de fournir des fournitures d’urgence pour le bétail et la pêche, ce qui est essentiel pour préserver la principale source de nutrition et de revenus de millions de personnes, atténuer les taux de malnutrition en hausse chez les enfants et stabiliser les moyens de subsistance dans un contexte de crise qui s’aggrave.
En 2024, la FAO et ses partenaires ont vacciné plus de 2,7 millions d’animaux contre les maladies courantes du bétail, touchant ainsi plus d’un demi-million de ménages pastoraux et agropastoraux. 2,5 millions d’animaux supplémentaires devraient bénéficier d’un soutien vétérinaire pendant la saison hivernale (de novembre à février), au profit de 170 000 ménages au total.
Nous ne devons pas attendre les déclarations de famine
Il est urgent d’agir à plus grande échelle, non seulement pour inverser la situation de famine qui sévit au Darfour, mais aussi pour venir en aide aux communautés en situation d’insécurité alimentaire aiguë dans tout le Soudan. Il faut répondre aux besoins immédiats et renforcer les moyens de subsistance des populations afin de renforcer leur résilience face aux conflits, aux chocs climatiques et économiques, et de les préparer à ce qui les attend. La communauté internationale ne peut pas attendre que l’état de famine soit déclaré, elle doit agir à grande échelle et dans l’urgence, en se fondant sur les avertissements pour déclencher une action.