Guy Marius Sagna est désormais député : une élection, trois gains

Réputé pour son activisme à tout crin, Guy Marius Sagna est assurément le grand gagnant des législatives du 31 juillet dernier. Son élection comme député lui procure en effet trois gains. Ayant demandé une disponibilité comme assistant social pour cause de tracasseries de la part de sa tutelle, il retrouve une fonction, obtient une tribune pour mieux exposer les doléances des populations et se couvre d’immunité alors qu’il a battu ces dernières années le record d’arrestations pour sa propension à combattre l’injustice.

Soit on l’aime, soit on le déteste. Tout dépend du bord où l’on se situe. Engagé politiquement très jeune, militant de la première heure dans les cercles de la Gauche sénégalaise, Guy Marius Sagna avait très tôt dévoilé son attachement aux luttes sociales. C’est dans cette foi politique qu’il a été éduqué et qu’il a bâti ses croyances dans la lutte contre l’antisystème.

Pour lui, l’antisystème n’est rien d’autre que le combat contre la corruption, contre la domination économique, contre toutes les formes d’injustice, contre une élite politique qui regarde de loin de le peuple.

Après avoir quitté ces formations de Gauche, tout en gardant en lui l’idée d’une reconstruction telle que l’avait théorisé Mao – cent ans de travail pour mille années de bonheur – Guy Marius n’a pas hésité à se transformer en un activiste détestable pour les tenants du pouvoir, mais adulé par une frange de la société.

L’activiste s’offre une tribune (officielle)…

La première victoire de Guy Marius avec son élection comme est de s’être offert une tribune pour mieux se faire entendre. Dos au perchoir (place du président de l’Assemblée nationale) et face à ses collègues, le député Guy Marius Sagna aura désormais la meilleure tribune dont il pouvait rêver pour cracher ses « vérités ».

Il pourra mieux dénoncer ce qu’il a toujours dénoncé en tant qu’activiste. Les débats du peuple étant portés et soutenus à l’Assemblée nationale, il y posera gaillardement le débat sur la gestion du foncier. Il pourra parler des problèmes liés à l’eau, à l’électricité. Il pourra dénoncer les contrats léonins signés en faveur de multinationales pour la gestion de nos ressources énergétiques et défendre la préférence nationale.

Il pourra prendre la parole à l’occasion de toute séance plénière pour se faire l’avocat de ceux qu’il a toujours défendus à travers ses prises de position publiques. A coup sûr, la tribune de la Représentation nationale est un podium qui lui permettra de ne plus vivre ce qu’il vivait sur le terrain face aux éléments de la Police

…acquiert une légitimité …

Chaque jour arrêté, chaque semaine, gardé à vue, chaque mois emprisonné. Voilà ce qui était jusque-là le sort réservé à Guy Marius Sagna. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a fini par être connu à l’échelle internationale. Systématiquement emprisonné, son cas était «sous haute surveillance» des sommités mondiales (acteurs, écrivains, avocats, journalistes, acteurs de la société civile) répartis entre l’Afrique, l’Europe, l’Amérique et l’Asie, et qui n’ont pas hésité à signer une pétition pour réclamer sa libération.

Devenu souteneur d’Ousmane Sonko lors de la présidentielle de 2019, il a fini par être son « protégé ». Et pour cause, propulsé tête de liste départementale de la coalition Yewwi Askan-Wi dans le département de Ziguinchor, il a remporté la victoire de la représentativité. Gouye (baobab), face à l’adversité d’une ministre du Président Macky Sall, a démontré à la face du Sénégal, qu’il avait fini de se construire une base.

Comme pour Ousmane Sonko lors des élections départementales et territoriales, les populations de Ziguinchor l’ont porté au pinacle en l’élisant député. Une première victoire pour un activiste qui a été brimé moralement et physiquement par rapport aux combats qu’il a toujours menés au nom de la justice.

En gagnant devant Victorine Ndèye et face à d’autres pontes de Benno Bokk Yakaar comme Benoit Sambou, Doudou Kâ, Abdoulaye Baldé, entre autres, Guy Marius a fini de relever le défi de la représentativité. Il a aussi désormais une légitimité qui lui permet, de par sa fonction de député, à être la voix des sans voix comme il l’a toujours revendiqué.


…et se couvre d’immunité

La troisième victoire de Guy Marius Sagna en se faisant élire député, est bien celle de l’immunité. Parlementaire sous la quatorzième législature qui sera installée dans les prochaines semaines, l’activiste portera désormais le titre « d’honorable député ». Sous ce registre, beaucoup de choses vont forcément changer. Il est désormais recouvert du « manteau » qui ne « s’achète » que dans les urnes.

Pour rappel, l’immunité parlementaire est une disposition du statut des parlementaires qui a pour objet de les protéger dans le cadre de leur fonction. C’est donc dire que celui qui était constamment mis aux arrêts, quel que soit le type d’évènements, a toutes les chances de pouvoir porter autrement ses combats en sa qualité de représentant du peuple.

L’écharpe aux couleurs nationales en bandoulière, policiers et gendarmes vont désormais le traiter différemment, si ce n’est avec égard. Un cap de franchi pour ce « combattant » qui, à un moment donné, était critiqué par certains Sénégalais qui lui reprochaient d’être partout et de vouloir mener partout des combats qui peuvent ne pas le concerner directement.

D’un calme olympien pour qui connait l’homme qu’il est dans sa vie de tous les jours, affable et affichant le sourire en toutes circonstances, Guy Marius Sagna a démontré que la conviction et la constance paient forcément, surtout pour quelqu’un qui a toujours tiré sur la transhumance.

Le Vrai Journal

Mamadou Nancy Fall
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