** « La mort engloutit l’homme ; elle n’engloutit pas son nom et sa réputation» Ahmadou Kourouma **
Le mercredi 30 janvier 2019, l’Etat du Sénégal faisait enfin acte de contrition et de reconnaissance envers son premier Chef − Je dis bien son premier Chef ̶ en baptisant le Building Administratif «Building administratif Président Mamadou Dia».
Ce haut lieu de la République fut inauguré le 30 juin 1954 par le gouverneur général. Haut-commissaire de l’Afrique occidentale française (Aof) Mr Bernard Cornut-Gentille. C’est dans ce lieu également que le Président Dia a préparé le Sénégal plus que n’importe quel autre pays de l’Aof à devenir indépendant avec l’appui des cadres universitaires et techniques de l’époque, notamment les Pr Abdoulaye Ly, Amadou Mahtar Mbow, François Dieng, Dr Amadou Karim Gaye, Cheikh Hamidou Kane et tant d’autres. Hommage appuyé doit être rendu aussi au Pr François Perroux du Collège de France, au Père Louis-Joseph Lebret et à son fidèle Directeur de cabinet Mr Rolland Colin pour leur engagement social auprès des populations démunies : « Le développement de tout l’Homme et de tous les Hommes ».
C’est cette vision généreuse qui avait scellé une alliance entre eux et le musulman humaniste et ouvert que fut le Président, dans une communion à la fois spirituelle, intellectuelle et politique au sens le plus noble. Le Président Dia avait formulé le premier Plan quadriennale Développement économique et social du Sénégal qui partait de 1960 à 1964 : Plan généreux. pertinent et inclusif. Il fut aussi l’inspirateur de l’architecture administrative du Sénégal moderne rompant ainsi avec la vision verticale «Faidherbienne».
Point n’est besoin de revenir les événements douloureux du 17 décembre 1962 surtout pour les principaux protagonistes. L’appréciation de l’historienne Janet G, Vaillant de l’Université de Harvard sur ces événements dans son essai monumental sur la vie du Président Léopold Sédar Senghor (1) et préfacé par Mr le Président Abdou Diouf̶ est éloquent :
« Dans une certaine mesure, l’issue des événements de décembre a été une victoire pour le pays tout entier. Mais son dénouement tragique a coûté au Sénégal un de ses dirigeants les plus éminents et les plus marquants, un homme que le pays pouvait difficilement perdre. Senghor et Dia avait formé une équipe remarquable. Il semble que les deux hommes avaient voulu trouver un compromis mais ils étaient sous la pression de leurs partisans respectifs qui les ont engagé à ne pas céder jusqu’au moment où tous deux se sont trouvés dans une position où ils ne pouvaient reculer sans perdre la face ».
Cette crise artificielle et politicienne a bridé durablement le développement du Sénégal qui hélas est livré aux crocs du capital international avec ses deux bras séculiers le Fmi et la Banque mondiale qui ont fini de transformer notre pays en un centre de paupérisation où les cinq (5) géants de William Beveridge (Pauvreté, Chômage, Maladie; Insalubrité Ignorance) continuent de s’’imposer aux masses populaires sans défense et qui ne savent plus à quel Plan se fier.
Cerise sur le gâteau social-libéral républicain : l’infatuation ; l’insolence, l’impéritie, le cynisme et la concussion continuent de gangrener nos institutions au service exclusif des élites politiciennes mondialisées et de leurs souteneurs paresseux et rentiers de l’ignorance des masses. Victor Hugo ne s’y était guère mépris : « L’ignorance est un crépuscule, le mal y rode. Songez à l’éclairage des rues , songez aussi, songez surtout, à l’éclairage des esprits»
Je remercie ALLAH le Clément, le Miséricordieux d’avoir épargné au Président Mamadou Dia et à ses valeureux compagnons, au Pr Abdoulaye Ly et au Pr Cheikh Anta Diop de vivre dans ce pandémonium. Ils ne l’auraient point supporté !
Docteur. Ibrahima Dème
E- mail : idemgfatm@gmail.com
(1) Janet G, Vaillant : « Vie de Léopold SédarSenghor, Noir, Français et Africain » Khartala-Sephis, 2006, 446p
